En 1942 les parents de Donald l’ont placé dans une ferme distante d’environ 10 miles de chez
eux. Lorsqu’en mai 1945 j’ai rendu visite au couple de fermiers qui s’occupaient de lui, j’ai été
stupéfaite de leur sagesse. Ils réussissaient à donner des buts aux stéréotypies de Donald : ils
lui ont fait utiliser sa préoccupation pour les mesures en lui demandant de creuser un puits dont
il mesurait la profondeur ; lorsqu’il s’est mis à ramasser les bestioles et les oiseaux morts, il
lui ont donné un emplacement pour faire un cimetière
et lui ont fait mettre des marques sur les
tombes : sur chacune d’elles il écrivait un prénom, l’espèce de l’animal comme nom et en dernier le
nom du fermier, comme ceci : John Snail Lewis. Né, date inconnue. Mort (date du jour où il
avait trouvé l’animal).
Lorsqu’il a commencé à compter interminablement les rangs de maïs, ils
lui ont fait compter les rangs en même temps qu’il les labourait. Durant ma visite il a labouré
six longs rangs et il était remarquable de voir comme il dirigeait bien le cheval et comme il
savait labourer. Il était évident que Monsieur et Madame Lewis l’aimaient beaucoup, et tout aussi
évident qu’ils étaient gentiment fermes avec lui. Il fréquentait une école de campagne où ses
bizarreries étaient acceptées et où il progressait.
Le reste de son histoire est contenu dans une lettre de sa mère, datée du 6 avril 1970 :
Don a maintenant 36 ans, il est célibataire et vit à la maison avec nous. Il a eu une crise
aiguë de rhumatisme en 1955. Heureusement, cela n’a duré que quelques semaines. Physiquement, à
compter de cette époque, il a toujours été en parfaite santé … Depuis qu’il a été reçu à son
diplôme de fin d’études universitaires en 1958, il travaille comme caissier à la banque locale. Il
n’a aucun désir de promotion et est content de rester caissier. Il accueille très bien le public.
Sa distraction principale est le golf auquel il joue quatre ou cinq fois par semaine au club local,
et bien qu’il ne soit pas joueur professionnel il a gagné six trophées dans des compétitions
locales. D’autres intérêts qu’il a eus sont le club des Kiwanis (dont il a été président pendant un
mandat), les Jaycees, un Club d’investissement, le secrétariat de la Presbyterian Sunday School. Il
est fiable, précis, fait preuve d’originalité en publiant le programme d’information des Jaycees ;
il est d’humeur égale mais sait ce qu’il veut … Il possède sa seconde voiture et aime son
indépendance. Sa chambre comprend sa télévision personnelle. son électrophone et beaucoup de
livres. À l’université, son sujet principal était le français, et il était particulièrement doué
pour les langues. Don joue bien au bridge mais n’en prend jamais l’initiative une partie. Le manque
d’initiative semble être sa plus importante séquelle. Il participe très peu aux conversations et ne
montre aucun intérêt pour le sexe opposé.
Bien que Don ne soit pas complètement normal, il a très bien trouvé sa place dans la société,
beaucoup mieux que nous ne l’avions jamais espéré. S’il peut maintenir ce statu quo, je crois
qu’il est suffisamment adapté pour se prendre en charge lui-même. De tant de progrès, nous sommes
vraiment reconnaissants … transmettez nos amitiés au Docteur Kanner, et dites-lui que nous sommes
toujours amis avec Monsieur et Madame Lewis, le couple chez qui Don a vécu pendant quatre ans ;
nous nous voyons assez souvent. Don n’a jamais eu de traitement médicamenteux pour ses troubles
émotionnels. J’aimerais tant savoir ce qu’il ressent réellement. Tant qu’il continuera tel qu’il
est maintenant, nous pourrons toujours être reconnaissants.