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Besoins des adultes autistes

Questionnaire de l’association Asperansa

6 avril 2017 – 13 avril 2018

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Analyse par Amélie Tsaag Varlen

Table des matières

1.Méthode, échantillon et recrutement

2.Questionnaire et contextualisation

2.1.Diagnostic

2.1.1.Avez-vous déjà été diagnostiqué ?

2.1.2.Si oui, à quel âge ?

2.1.3.Qu’est-ce qui a lancé la procédure de diagnostic ?

2.1.4.Qui en est à l’origine ?

2.1.5.Combien de temps a-t-il fallu pour recevoir votre diagnostic actuel ? Si la procédure est en cours, depuis combien de temps ?

2.1.6.Y a-t-il eu des changements dans votre vie suite à ce diagnostic ?

2.1.7.Si oui, quels ont été ces changements ?

2.2.Lieu de vie

2.2.1.Vous habitez …

2.2.2.Si vous n’habitez pas chez vos parents, touchez-vous une aide au logement ?

2.3.Ressources

2.3.1.Quelles sont les ressources dont vous disposez ?

2.3.2.Quel est le montant approximatif de ces ressources (hors aides au logement et hors ressources du conjoint) ?

2.3.3.Trouvez-vous que c’est suffisant pour vivre dignement ?

2.4.Gestion du quotidien

2.4.1.Avez-vous des problèmes avec la gestion de votre quotidien ?

2.4.2.Si oui, quels domaines posent problème ?

2.4.3.Avez-vous une aide humaine ?

2.4.4.Si oui, de quel type ?

2.4.5.Êtes-vous titulaire du permis de conduire ?

2.4.6.Si non, pourquoi ?

2.5.Activités

2.5.1.Avez-vous des activités ou occupations avec d’autres personnes ?

2.5.2.Si oui, avec qui ? (plusieurs réponses possibles)

2.5.3.Si vous n’avez pas d’activités ou d’occupations avec d’autres personnes, pourquoi ?

2.5.4.Avez-vous des loisirs / hobbies (en termes de nombre) ?

2.5.5.Si oui, quels types de loisirs/hobbies avez-vous ?

2.5.6.Combien de temps cela vous prend-il par semaine ?

2.6.Recours aux structures

2.6.1.Avez-vous recours à une structure ?

2.6.2.Si oui, de quel type ?

2.7.Vie amoureuse et familiale

2.7.1.Êtes-vous en couple ?

2.7.2.Si oui, votre partenaire est-il / est-elle …

2.7.3.L’autisme est-il, ou a-t-il été un problème dans votre relation ?

2.7.4.Vous vous considérez plutôt comme …

2.7.5.Avez-vous des enfants ?

2.7.6.Si non,voulez-vous en avoir ?

2.7.7.Dans les deux cas (de la question 2.7.6), pourquoi ?

2.8.Formation

2.8.1.Êtes-vous actuellement en poursuite ou en reprise d’études ?

2.8.2.Choisissez le dernier cursus fréquenté ou celui en cours

2.8.3.Quel est le diplôme le plus élevé que vous ayez obtenu ?

2.8.4.Avez-vous rencontré des difficultés au cours de votre scolarité ?

2.8.5.Si oui, quels types de difficultés ?

2.8.6.Avez-vous bénéficié d’aménagements pendant vos études ?

2.8.7.Si oui, lesquels ?

2.8.8.Si non, pourquoi ?

2.8.9.Avez-vous eu votre diagnostic …

2.9.Emploi

2.9.1.Avez-vous eu un emploi pendant les six derniers mois ou êtes-vous actuellement employé(e) ?

2.9.2.Si oui, quel type de contrat ?

2.9.3.Si oui, quel type d’emploi ?

2.9.4.Dans quel type d’établissement était-ce/est-ce ?

2.9.5.Êtes-vous actuellement en recherche d’emploi ?

2.9.6.Bénéficiez-vous vous avez-vous bénéficié d’un suivi (avant, après, ou pendant votre diagnostic) ?

2.9.7.Si oui, quel type de suivi ?

2.9.8.Si non, pourquoi ?

2.9.9.Bénéficiez-vous de la RQTH ?

2.9.10.Avez-vous demandé une orientation vers un centre spécialisé ?

2.9.11.Un médecin du travail vous a-t-il prescrit des aménagements pour votre emploi ?

2.9.12.Avez-vous rencontré des problèmes concernant votre emploi ?

2.9.13.Si oui, lesquels ?

2.9.14.Souhaiteriez-vous bénéficier d’aménagements dans votre travail ?

2.10.Accès aux soins

2.10.1.Avez-vous des difficultés pour l’accès aux soins ?

2.10.2.Si oui, lesquelles ?

2.10.3.Quelles solutions envisageriez-vous ?

2.10.4.Avez-vous déjà renoncé à des soins ?

2.10.5.De quel(s) droit(s) disposez-vous actuellement pour le remboursement des soins ?

2.10.6.Avez-vous déjà été hospitalisé(e) en Hôpital Psychiatrique (HP) ?

2.10.7.Si vous avez été hospitalisé(e) en HP, pensez-vous que c’était …

2.10.8.Avez-vous déjà connu des épisodes dépressifs :

2.11.Représentations et militantisme

2.11.1.Trouvez-vous qu’il y a une représentation correcte des personnes autistes en France (associations, médias…) ?

2.11.2.Trouvez-vous que l’information autour de l’autisme en France est …

2.11.3.Trouvez-vous qu’il y a encore beaucoup de préjugés sur l’autisme en France ?

2.11.4.Donnez quelques exemples de préjugés dont vous avez connaissance ou que vous avez déjà rencontrés

2.11.5.Êtes-vous membre d’une association ?

2.11.6.Comment trouvez-vous que les personnes autistes doivent être représentées (plusieurs réponses possibles) ?

2.12.Commentaires libres des répondants

3.Profil des répondants

3.1.Quel est votre âge ?

3.2.Genre

3.3.Type d’autisme

3.4.Situation familiale

3.5.Situation juridique

3.6.Région

4.Conclusion

5.Notes

1.Méthode, échantillon et recrutement

Ce questionnaire fait suite à l’enquête menée sur les besoins des adultes autistes, publiée le 16 octobre 2016, également par l’association Asperansa, et en particulier Guillaume Alemany.

Il a été proposé prioritairement aux membres du forum de cette association, âgés de plus de 16 ans, à partir du 6 avril 2017. Il est resté ouvert jusqu’au 13 avril 2018. Durant ce laps de temps, des membres du forum ont proposé à d’autres personnes concernées d’y répondre, notamment via les réseaux sociaux.

Si la méthode présente des faiblesses communes aux questionnaires longs auto-administrés et aux questionnaires à recrutement associatif (manque de diversité des répondants, partage d’éléments de culture communs, marge d’erreur plus grande que sur les questionnaires administrés par un tiers, possibilité pour une même personne de répondre deux fois), la taille de l’échantillon des répondants permet de s’en affranchir en partie, puisque 573 personnes ont participé, dont 415 ont fourni des réponses complètes.

De par l’objet de l’association et l’accès via son forum, les répondants sont principalement des personnes diagnostiquées ou auto-diagnostiquées avec un syndrome d’Asperger1.

Cette enquête, après la caractérisation des besoins des adultes autistes effectuée en 2016, permet de quantifier plus précisément les besoins spécifiques, et d’obtenir un panorama plus précis quant aux habitudes de vie, aux besoins d’aides à l’autonomie, à la scolarité, ou encore à l’emploi, des adultes autistes en France.

Elle peut, à ce titre, s’articuler avec l’enquête du CRAIF consacrée à la qualité de vie des adultes autistes, publiée en avril 20182 ; à la différence majeure que l’enquête du CRAIF fut très majoritairement remplie par des aidants, et ne part pas directement des besoins exprimés par les adultes autistes.

2.Questionnaire et contextualisation

En raison d’une focalisation sur l’enfance, les études qui explorent la condition d’adulte autiste manquent. D’après Patricia Howlin, Pr de psychologie et rédactrice en chef de la revue britannique Autism, bien des gens […] sont significativement désavantagés en ce qui concerne l’emploi, les relations sociales, la santé physique et mentale, et la qualité de vie. Le soutien qui faciliterait l’intégration à l’ensemble de la société est souvent manquant, et il n’y a presque pas eu de recherche sur les façons d’élaborer des programmes d’interventions plus efficaces pour les adultes3.

Si l’on me pardonne de ne pouvoir retrouver l’origine de cette très juste phrase, les difficultés rencontrées par les adultes autistes pour vivre dans un monde qui n’a pas été bâti autour de leurs priorités et de leurs centres d’intérêts sont probablement sous-estimées.

En France, comme le fait remarquer Josef Schovanec (Dr en philosophie et sciences sociales) dans son rapport consacré à l’emploi des adultes autistes, publié en mars 2017, […] rarissimes sont les personnes autistes ayant eu un parcours de vie linéaire. La norme statistique dominante voire quasiment unique en la matière est l’alternance de phases de plus ou moins grande inclusion, de types divers de précarité, avec de multiples interruptions de parcours et de longues périodes sans solution4. Il ajoute n’avoir remarqué à peu près aucune corrélation entre l’entropie d’un parcours de vie et les potentialités de la personne5.

Le présent sondage ne saurait permettre une exploration de ces parcours de vie sur le long terme, mais vise à fournir une photographie, la plus fidèle possible, de la condition d’adulte autiste en France en 2017-2018.

Quelques répondants (au moins deux) ont souligné un biais épistémologique dans la tournure des questions. Il est vrai, comme le fit remarquer Mme Catalina Devandas-Aguilar, Rapporteuse des droits de l’ONU, au terme de sa visite française en octobre 2017, que l’accent est mis sur la déficience de l’individu et non pas sur la transformation de la société et de l’environnement pour assurer des services accessibles et inclusifs ainsi qu’un accompagnement de proximité6. Ce point induit une différence dans la perception de l’autisme entre la France et d’autres pays francophones, Canada notamment.

Le sociologue américain Gilles Eyal a, avec son équipe, publié en 2010 un ouvrage à succès dans le monde anglophone, The Autism Matrix. Il y met en évidence les spécificités de l’approche de l’autisme dans une vingtaine de pays occidentaux. La France y est caractérisée par le plus faible nombre de personnes diagnostiquées parmi tous ces pays, par le plus haut taux d’institutionnalisation, par le prestige que la psychanalyse continue d’y revêtir, enfin par l’utilisation de critères diagnostiques spécifiques, différents de ceux en usage dans le reste du monde7, ayant notamment abouti à une reconnaissance tardive du syndrome d’Asperger, en l’an 2000.

Les commentaires inclus à ce questionnaire visent à explorer la question de transformation sociétale via le modèle social du handicap, et par là, à dégager des pistes de réduction de la situation de handicap expérimentée par les adultes autistes français.

2.1.Diagnostic

Cette enquête est ouverte aux personnes autistes diagnostiquées ou auto-diagnostiquées. Les enquêtes et études permettant la participation de personnes auto-diagnostiquées restent rares ; pourtant, d’après le Pr Laurent Mottron, les auto-diagnostics d’autisme mènent généralement à une confirmation de la part de professionnels spécialistes8. De plus, la méconnaissance de l’autisme dit sans déficience intellectuelle reste forte en France, entraînant un phénomène probable de sous-diagnostic9, ainsi que des diagnostics erronés, dans un sens (par ex. hommes autistes diagnostiqués à tort comme schizophrènes, femmes autistes comme bipolaires), ou plus récemment, dans l’autre10.

2.1.1.Avez-vous déjà été diagnostiqué ?

Oui : 53,2% Non : 26,0% Le diagnostic est en cours : 20,8%
305 (53,2%) : Oui
149 (26,0%) : Non
119 (20,8%) : Le diagnostic est en cours

Sur les 573 répondants ayant initié ce questionnaire, une majorité sont diagnostiqués (53,2%), contre environ un quart 149 (26 %) qui ne le sont pas. 119 (20,8 %) ont indiqué avoir entamé des démarches pour obtenir un diagnostic.

Un peu plus de la moitié des répondants disposent donc d’un diagnostic officiel de TSA (trouble du spectre de l’autisme) ou de TED (trouble envahissant du développement), très majoritairement sous l’intitulé de syndrome d’Asperger, comme nous le verrons en section 3.3.

Dessin de Blequin

2.1.2.Si oui, à quel âge ?

322 personnes ont répondu à cette question ouverte, ce qui indique une marge d’erreur d’environ 10-11 %, correspondant aux personnes qui ont déclaré ne pas avoir de diagnostic ou être en cours de diagnostic, mais ont néanmoins répondu. Parmi ces 322 personnes, 2 n’ont pas fourni de réponse exploitable.

L’âge moyen du diagnostic (sur les 320 réponses exploitables) est de 26,78 ans. L’amplitude est très variable, les deux diagnostics les plus précoces ayant été posés, respectivement, à 18 mois et à 2 ans, le plus tardif l’ayant été à 61 ans. La majorité ont été posés en fin d’adolescence et au début de l’âge adulte, ce qui est révélateur d’un fort retard dans l’obtention de ce type de diagnostic, comparativement aux recommandations officielles en la matière11.

Si les raisons de ces retards sont multiples, la méconnaissance de l’autisme en France, bien qu’en recul grâce à une médiatisation croissante, semble toujours être un facteur important. De plus, la multiplication des sources d’information à propos de l’autisme s’accompagne d’une sensation de flou en raison de la circulation d’informations contradictoires et de fausses nouvelles (fake news).

2.1.3.Qu’est-ce qui a lancé la procédure de diagnostic ?

417 personnes ont répondu à cette question ouverte, ce qui indique une légère marge d’erreur, l’ensemble des personnes déclarées diagnostiquées et en cours de diagnostic comptant pour 424 répondants au total. Les réponses sont variées et difficilement exploitables, en raison de grandes différences dans la compréhension de l’intitulé. Elles présentent néanmoins les récurrences suivantes :

Sur les 417 répondants, 20 (4,79 %) indiquent avoir entamé une procédure diagnostique à la suite d’une dépression. En prenant en compte la disparité des réponses et le possible oubli de situations similaires, une attention particulière peut être portée sur ce point14. De plus, les personnes autistes rencontrent des difficultés notoires pour identifier leur propre état dépressif15, qui concernerait jusqu’à 47 % des personnes avec TSA d’après un récent article de Spectrum News16.

Contrairement à ce qu’évoquent certains professionnels de santé17, aucun répondant ne parle (dans les champs libres prévus à cet effet) de sa recherche d’un diagnostic d’autisme à l’âge adulte comme de la résultante d’un phénomène de mode, ni d’une seule volonté d’une meilleure connaissance de soi, ou encore de celle d’enfiler un vêtement social après la lecture d’une biographie à succès. Le sentiment exprimé de manière dominante est une réaction face à de multiples difficultés vécues, tant dans le domaine professionnel que dans l’environnement familial et social, souvent appuyée par une reconnaissance de ses difficultés personnelles à travers des exemples cités dans des écrits biographiques ou des conférences.

La problématique de la connaissance de soi est cependant évoquée : il appartient aux professionnels de santé de poser le diagnostic approprié, et de ne pas céder aux demandes insistantes de diagnostic d’autisme / de TSA lorsque celles-ci sont infondées.

Enfin, si des cas de personnes recherchant un diagnostic sans pour autant éprouver de situation de handicap sont régulièrement rapportés, les résultats de l’enquête démontrent clairement que ces cas constituent une nette minorité des demandes de diagnostic.

2.1.4.Qui en est à l’origine ?

Moi-même : 61,0% Un parent : 19,5% Mon médecin : 2,5% Un professeur : 1,7% Un psychologue : 4,4% Un psychiatre : 3,1% Autre : 7,8%
291 (61,0%) : Moi-même
93 (19,5%) : Un parent
12 (2,5%) : Mon médecin
8 (1,7%) : Un professeur
21 (4,4%) : Un psychologue
15 (3,1%) : Un psychiatre
37 (7,8%) : Autre

477 personnes ont répondu à cette question, ce qui indique que 10 à 15 % de personnes déclarées non-diagnostiquées ont néanmoins répondu. Une certaine confusion avec la question précédente est palpable. La majorité des répondants indiquent avoir pris d’eux-mêmes la décision de se faire diagnostiquer (291, soit 61%), très généralement à l’âge adulte. Un parent (au sens large) en est à l’origine dans 19,5 % des cas, plus généralement concernant les enfants ou adolescents.

Les autres cas sont beaucoup moins fréquents, avec 2,5 % (12) de diagnostics évoqués par le médecin traitant, 1,7 % (8) par un professeur, 4,4 % (21) par un psychologue et 3,1 % (15) par un psychiatre.

Certaines réponses du champ autre (7,8 %, 37 réponses) devraient être ventilées dans les catégories parent, psychologue ou médecin, néanmoins ces réponses évoquent aussi le rôle positif d’amis et de collègues de travail, d’une assistante de vie scolaire (AVS), et d’un praticien de médecine non-conventionnelle.

Bien que la question ait généré une confusion manifeste avec la précédente, elle met en relief un probable manque de connaissances de l’autisme parmi les professionnels de santé, très peu d’orientations vers une démarche de diagnostic ayant été initiées par des professionnels.

La méconnaissance de l’autisme par les médecins généralistes en France a déjà été soulignée, faisant l’objet d’études diverses. De nombreux médecins généralistes associent prioritairement l’autisme au retard ou à l’absence de langage, et au repli sur soi18. Cette croyance non-conforme aux évolutions des connaissances ne leur permet généralement pas de repérer efficacement la population concernée par ce sondage. De plus, l’autisme leur apparaît souvent comme une entité floue, à la frontière entre la psychiatrie et la neurologie ; l’intérêt de poser ce diagnostic ou d’orienter une personne pour qu’elle se fasse diagnostiquer ne semble pas toujours évident. Un médecin généraliste interrogé pour les besoins d’une enquête menée à Angers en 2016 questionne l’intérêt de la prise en charge des troubles peu sévères, et craint que la pose d’un diagnostic d’autisme puisse empêcher [les enfants] d’avoir accès à une scolarité normale, les confiner dans des centres adaptés et contrarier le développement de certaines capacités19. D’autres médecins généralistes avouent manquer de connaissances et de compétences en ce domaine20.

La diffusion virale de théories fallacieuses (fake news), telles que l’hypothèse farfelue d’un lien entre autisme et expositions aux écrans21, la théorie désormais totalement discréditée selon laquelle les vaccins causeraient l’autisme22, ou encore les annonces régulières de découverte des causes et des traitements prometteurs de l’autisme, entraîne vraisemblablement un lourd préjudice pour les professionnels de santé et les personnes autistes elles-mêmes, notamment en termes d’accès au diagnostic et de diffusion des connaissances.

2.1.5.Combien de temps a-t-il fallu pour recevoir votre diagnostic actuel ? Si la procédure est en cours, depuis combien de temps ?

Entre 1 et 3 mois : 22,0% Entre 3 et 6 mois : 17,2% Entre 6 et 8 mois : 14,4% Entre 8 et 10 mois : 4,3% Entre 10 mois et 1 an : 7,4% 1 an et plus : 34,7%
92 (22,0%) : Entre 1 et 3 mois
72 (17,2%) : Entre 3 et 6 mois
60 (14,4%) : Entre 6 et 8 mois
18 (4,3%) : Entre 8 et 10 mois
31 (7,4%) : Entre 10 mois et 1 an
145 (34,7%) : 1 an et plus

418 personnes ont répondu, ce qui indique une légère marge d’erreur. Les réponses sont très hétérogènes, un peu plus d’un tiers des répondants (145 ; 34,7 %) indiquant une attente supérieure à un an, soit la plus longue durée possible parmi les propositions. La seconde réponse en importance indique une attente courte, dans une fourchette d’un à trois mois.

Il est difficile d’analyser cette réponse, sinon en combinaison avec l’évaluation des CRA, Centres ressources autisme, publiée par l’IGAS fin 2015, concluant à une durée d’attente très variable selon les régions23. Les diagnostics sont notoirement obtenus beaucoup plus vite en secteur libéral qu’en secteur public. Couplé à l’information relative aux ressources et aux moyens de déplacement des adultes autistes, ce fait permet aisément de conclure que l’accès au diagnostic reste très difficile en France, en particulier pour les adultes autistes les plus financièrement précaires et les moins mobiles.

Une personne habitant hors des grands axes de transport en Bretagne, n’ayant pas de permis de conduire ni de fonds, à titre d’exemple, pourra très difficilement accéder au CRA de sa région, situé à Brest, et dont le délai d’attente pour un accès au diagnostic est actuellement (2018) de trois ans.

2.1.6.Y a-t-il eu des changements dans votre vie suite à ce diagnostic ?

Oui : 69,1% Non : 30,9%
260 (69,1%) : Oui
116 (30,9%) : Non

376 personnes ont répondu, plus des deux tiers (69,15 %) par l’affirmative, un peu moins d’un tiers (30,85 %) par la négative.

2.1.7.Si oui, quels ont été ces changements ?

257 personnes ont répondu à cette question ouverte, globalement pour évoquer des changements positifs. Certains répondants emploient des termes forts, tels que libération, délivrance et révélation24. Ces changements positifs s’effectuent en termes d’acceptation de soi (réponse la plus récurrente), d’acceptation de la part des proches, de compréhension de son mode de fonctionnement (réduction de la culpabilité), d’adaptations du poste de travail, d’arrêts de médications inadaptées, ou plus factuellement pour obtenir des compensations telles que l’Allocation Adultes Handicapés (AAH), la Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH ), une assistante de vie scolaire (AVS) ou des thérapies cognitivo-comportementales (TCC).

Les témoignages en termes d’acceptation évoquent de façon très claire une cessation de sentiment de culpabilité, en particulier celui relatif aux compétences sociales, et la fin du blâme d’autrui contre les personnes autistes grâce à la prise en compte de la situation de handicap. Parmi ces réponses figurent : mes parents ont […] cessé de penser que je ne faisais pas d’efforts, que je leur ait manqué de respect, je n’ai plus envie de me suicider, Je me suis pardonnée mes échecs, incapacités, maladresses et étrangetés, J’ai repris confiance en moi, ou encore j’ai presque instantanément arrêté de boire de l’alcool après mon diagnostic. Les termes sont, là aussi, parfois forts : Il n’y a rien de plus affreux que de vivre autiste sans le savoir.

Globalement, la pose du diagnostic semble resserrer les liens entre membres de la famille, plutôt que de créer du rejet envers la personne autiste. Ce fait est important à communiquer, nombre de professionnels de santé retardant ou refusant la pose d’un diagnostic d’autisme par peur d’étiqueter ou de condamner à une vie d’exclusion (voir commentaires et études liées en 2.1.4).

L’importance des échanges entre personnes concernéesest mise en avant de façon récurrente par les répondants, qui soulignent le bénéfice apporté par les contacts via les forums de discussion, les groupes de discussion sur les réseaux sociaux, ou encore les cafés Asperger. Il est difficile de mesurer l’importance de cet aspect dans la mesure où les répondants sont en majorité des membres du forum d’Asperansa, créant un biais évident dans les réponses. La nette évocation du rôle positif de ces échanges peut cependant être soulignée.

Dessin de Blequin

Certains changements sont certainement vécus comme positifs par la personne diagnostiquée, mais comme négatifs par son entourage, essentiellement en termes d’éloignement social, de fin d’efforts de socialisation, et de cessation des efforts de compensation du handicap. Un répondant écrit  : Je refuse de porter un masque, de cacher mes tics, mes troubles, mes difficultés, mes particularités, mes capacités, mon hypersensibilité ; un autre Je ne me force plus aux interactions sociales, un troisième décrit l’abandon de certaines activités sociales au profit de nouvelles (en lien avec l’autisme). Ce point peut expliquer une certaine divergence d’opinions entre les parents militants dans l’autisme et les personnes autistes elles-mêmes, la fatigue et le sentiment de décalage générés par le phénomène de compensation du handicap social (se forcer aux interactions sociales) n’étant pas toujours pris en compte au quotidien, ni compris par l’entourage. On peut supposer que la réception du diagnostic d’autisme entraîne une prise de conscience du fait que les interactions sociales seront difficilement vécues comme une situation agréable, et ce quels que soient les efforts fournis.

Deux personnes insistent sur leur refus d’être considérées comme malade, ou comme handicapées, évoquant la non-reconnaissance de leurs compétences en France.

Les publications d’ordre médical abordant l’autisme mettent presque systématiquement en avant les compétences sociales comme étant le principal facteur de handicap dans l’autisme. Ce point mériterait une enquête plus approfondie. En effet, le ressenti des personnes autistes quant à ce qui génère chez elles une situation de handicap peut être différent de celui des professionnels de santé et de leur famille, une partie des répondants assumant un mode de vie solitaire avec évitement volontaire de contacts sociaux, et exprimant plutôt des difficultés d’ordre sensoriel, alimentaire, ou encore organisationnel.

Une minorité de réponses (une vingtaine) évoquent la survenue d’évènements de vie négatifs après le diagnostic (pertes d’emploi, ruptures de couple, harcèlement à l’école, non-acceptation de ce diagnostic, etc), et d’un rejet de la part de l’entourage familial. Une réponse indique que pour l’entourage, le diagnostic [est] non accepté (les vrais autistes ont de vraies difficultés etc), pas de compréhension ou d’acceptation des implications dans la vie de tous les jours […], en précisant l’existence d’une petite sœur non-verbale. Une autre personne a perdu [s]on emploi car les gens ne voient pas [s]on handicap. Enfin, un répondant évoque son habitude du camouflage social, et le fait que la communication de son diagnostic ait chang[é] le regard de certains de [s]es proches, ce qui est déplorable !.

Une certaine récurrence est palpable en matière de ressentiment contre le personnel du secteur médico-social, s’il n’a pas été en mesure de poser le diagnostic assez tôt, et en raison la sensation d’avoir perdu des années de vie en errance diagnostique. Des réponses isolées soulignent une infantilisation par des professionnels de santé et par l’entourage après la pose du diagnostic, ainsi qu’une angoisse quant au devenir à moyen terme.

2.2.Lieu de vie

Les répondants de ce sondage ne sont pas représentatifs de la situation générale des adultes autistes en France en matière de lieux de vie, dans la mesure où les personnes considérées comme les plus handicapées sont en général placées dans des institutions spécialisées, en milieu fermé. Ici, les répondants vivent dans une très nette majorité en milieu dit ordinaire.

2.2.1.Vous habitez ?

Chez vos parents : 26,8% Chez des proches : 0,8% Dans une maison ou un appartement, seul ou en couple : 55,5% Dans une maison ou un appartement, en colocation : 3,5% En résidence étudiante : 2,2% En FJT : 0,8% Dans un foyer pour personnes handicapées : 1,0% Sans domicile fixe : 0,6% Autre : 8,9%
136 (26,8%) : Chez vos parents
4 (0,8%) : Chez des proches
282 (55,5%) : Dans une maison ou un appartement, seul ou en couple
18 (3,5%) : Dans une maison ou un appartement, en colocation
11 (2,2%) : En résidence étudiante
4 (0,8%) : En FJT (Foyer de jeunes travailleurs)
5 (1,0%) : Dans un foyer pour personnes handicapées
3 (0,6%) : Sans domicile fixe
45 (8,9%) : Autre

508 personnes ont répondu à cette question. La majorité (282, soit 55,51 %) des répondants disposent de leur propre logement, seuls ou en couple. Le chiffre élevé de 26,77 % (136) personnes habitant au domicile de leurs parents, montre, mis en relation avec la moyenne d’âge des répondants, qu’un nombre conséquent d’entre eux vivent au domicile parental à un âge adulte avancé. Ce fait est révélateur des difficultés d’autonomisation rencontrées par les personnes autistes, et d’un manque d’autres solutions (logement inclusif avec soutien temporaire à l’autonomisation, co-locations solidaires, etc). Parmi la population générale, l’âge moyen de départ du foyer familial en France est de 23,2 ans en 200925. Bien qu’il soit difficile de tirer une statistique globale pour la population autiste en milieu dit ordinaire, il est évident que l’âge de départ du foyer familial est généralement plus tardif, lorsque ce départ a lieu26. Cela entraîne nombre de questionnements, relatifs en particulier au besoin d’autonomisation et d’affirmation de soi. Point non-exploré par ce sondage, certains adultes autistes, en raison de difficultés relationnelles avec leur entourage, choisissent d’eux-mêmes de quitter le domicile parental malgré l’absence d’autre solution afin d’expérimenter une certaine liberté. Ces situations peuvent facilement déboucher sur des périodes sans domicile fixe (SDF).

Les nombre de personnes en co-location, en résidence étudiante et en foyer pour jeunes travailleurs semble assez cohérent avec les chiffres en population générale27. Le nombre d’hébergements en foyer pour personnes handicapées est très faible (5, soit 1 %), comparativement aux personnes autistes non-verbales ou diagnostiquées avec un handicap sévère.

Le nombre de déclarations sans domicile fixe (3 personnes) est probablement sous-estimé par comparaison à la situation réelle des personnes autistes en milieu dit ordinaire, une étude galloise de 2015 ayant montré que 12 % des autistes ont été sans domicile fixe à un moment de leur vie28, en cohérence avec une étude anglaise publiée en 2018, donnant un taux similaire de 12,3 %29. Par ailleurs, il peut être difficile de trouver une connexion à internet et de répondre à un sondage dans cette configuration. Il est vraisemblable qu’une part plus importante des répondants aient expérimenté, à un moment de leur vie, la situation de SDF, ce qui ne pourrait être exploré que via une question formulée en termes de parcours de vie. Le taux de personnes sans domicile fixe parmi les répondants (0,6 %) reste plus élevé que l’estimation du nombre de personnes sans domicile fixe en France parmi la population totale (0,172 %)30, bien que l’échantillon soit trop faible pour être significatif.

Parmi les réponses du champ autre, un nombre conséquent devraient être ventilées dans les catégories Dans une maison ou un appartement, seul ou en couple, chez vos parents ou chez des proches, d’autres apportent des précisions quand à l’organisation du logement (proximité des parents, hébergement dans un logement possédé par un membre de la famille), ou à un retour au domicile parental après des échecs professionnels et de vie de couple.

Un dernier point, en lien avec l’ensemble des réponses précédentes, serait un questionnement du mode d’habitation sédentaire, norme actuelle en France, par nature incompatible avec un certain nombre de difficultés de gestion du quotidien citées par les répondants en 2.4.2. Une offre de logement permettant un mode de vie à la fois nomade et relativement économe réduirait d’autant certaines situations de handicap (telles que le syndrome de Diogène, ou un besoin d’accumulation), en plus d’élargir le champ des possibles. Il est à ce titre intéressant qu’aux États-Unis et au Vietnam notamment, des cadres amenés à des déplacements réguliers aient renoncé à louer ou à être propriétaire d’un logement dans leur pays de résidence, pour devenir nomades digitaux31. Ces évolutions semblent contraires à celles de la France, où la norme de la sédentarité et de l’endettement pour devenir propriétaire d’un logement est presque érigée en dogme, et où divers impératifs d’ordre administratif complexifient toute tentative d’adoption d’un mode de vie totalement nomade, jusqu’à l’impossible pour les personnes disposant de peu de revenus32. Le cas des bénéficiaires du RSA recevant des notifications de rendez-vous par courrier à leur domicile une semaine avant la date, et ne pouvant s’en soustraire sous peine de perte de leurs faibles revenus, n’est qu’un exemple de forme d’assignation à résidence parmi d’autres33.

2.2.2.Si vous n’habitez pas chez vos parents, touchez-vous une aide au logement ?

Oui : 34,5% Non : 65,5%
127 (34,5%) : Oui
241 (65,5%) : Non

368 personnes ont répondu, 127 (34,5 %) par oui et 241 (65,5 %) par non, ce qui indique une légère marge d’erreur.

Les deux tiers environ des répondants ne touchent aucune aide au logement, environ un tiers déclarent en toucher une. Il est manifeste qu’une part importante de personnes éligibles aux aides personnelles au logement (APL) ne les demandent pas, bien que le phénomène soit difficile à quantifier, en raison de la marge d’erreur.

Ce taux de non-recours a été étudié parmi la population générale34, laissant apparaître des raisons multiples. Il est probable que les personnes autistes soient gênées par des éléments tels que la nécessité de téléphoner ou d’entrer en contact avec le personnel de la CAF – Caisses d’allocations familiale (voir 2.4.2).

2.3.Ressources

Si diverses études ont montré que le statut social des adultes autistes est généralement précaire35, en France, les données au sujet des ressources dont ils disposent restent extrêmement parcellaires, voire inexistantes, comme l’a bien souligné Mme Devandas-Aguilar fin 201736.

Les données du présent chapitre montrent que plus de la moitié des adultes autistes vivent sous le seuil de pauvreté.

2.3.1.Quelles sont les ressources dont vous disposez ?

50 100 150 200 AAH RSA Indemnités de chômage Bourse étudiante Salaire Aide familiale Ressources d’activité non-salariée Autre
108 (21,3%) : AAH (Allocations adulte handicapé)
44 (8,7%) : RSA (revenu de solidarité active)
44 (8,7%) : Indemnités de chômage
26 (5,1%) : Bourse étudiante
180 (35,6%) : Salaire
82 (16,2%) : Aide familiale
11 (2,2%) : Ressources d’activité non-salariée
125 (24,7%) : Autre

506 personnes ont répondu. Un peu plus d’un tiers (35,6 % — 180) touchent un salaire découlant d’un emploi, bien que le taux d’emploi soit, en prenant en compte les ressources d’activité non-salariée et les réponses du champ autre qui devraient être ventilées dans l’une de ces deux catégories, nettement inférieur à celui de la population générale (65,6 % en 2015).

Les allocations adulte handicapé sont le deuxième type de ressources le plus fréquemment perçu (21,3 % — 108), leur demande pouvant découler de mauvaises expériences en emploi, ou d’une réorientation depuis le Pôle Emploi ou la Caisse d’Allocations Familiales, d’après certains commentaires du champ autre.

Les aides familiales (16,2 % — 82) sont le troisième type de ressources le plus fréquemment perçu. RSA et indemnités de chômage sont à égalité (8,7 % — 44). Une bourse étudiante est touchée par 5,1 % des répondants (26).

Le nombre de répondants touchant des Ressources d’activité non salariée (2,2 % — 11) est théoriquement plus élevé, un certain nombre de réponses du champ Autre (au moins 10) concernant des activités de type micro-entrepreneur (ex auto-entrepreneur).

Le champ autre est quantitativement important (125 personnes — 24,7 %). Une vingtaine de réponses de ce champ concernent une AAEH — Allocation d’éducation de l’enfant handicapé, versée aux parents. 7 ou 8 réponses y concernent l’ASS — Allocation de solidarité spécifique, pour les personnes ayant eu un emploi salarié au moins cinq ans de suite, et qui peut être assimilée au RSA. Enfin nous trouvons des précisions quant à des prestations en attente, des ressources propres à d’autres pays (Québec, Suisse…), et des erreurs déclaratives (confusion entre APL et ressources, etc).

Au moins cinq personnes disent n’avoir aucune ressource. Quelques-une utilisent le champ autre pour manifester leur refus de répondre.

2.3.2.Quel est le montant approximatif de ces ressources (hors aides au logement et hors ressources du conjoint) ?

De 0 à 400 € : 21,5% De 400 à 800 € : 22,9% De 800 à 1200 € : 24,3% De 1200 à 1600 € : 9,9% Plus de 1600 € : 21,5%
108 (21,5%) : De 0 à 400 €
115 (22,9%) : De 400 à 800 €
122 (24,3%) : De 800 à 1200 €
50 (9,9%) : De 1200 à 1600 €
108 (21,5%) : Plus de 1600 €

503 personnes ont répondu à cette question. Une grande diversité dans le montant des ressources perçues est manifeste. En 2014, le seuil de pauvreté en France s’établissait à 1008 euros par mois pour une personne seule37, ce qui signifie que plus de la moitié des répondants vivent sous le seuil de pauvreté. Encore plus préoccupant, un quart environ des répondants vivent en situation de très grande pauvreté, correspondant à la moitié du seuil de pauvreté (moins de 500 € par mois).

Ces chiffres viennent contredire l’image médiatique selon laquelle les personnes autistes Asperger ou à haut niveau de fonctionnement seraient essentiellement des chefs d’entreprise, des informaticiens, ou encore des artistes à succès. Les faits statistiques confortent plutôt l’article d’une femme anonyme, Alice, doctorante, selon laquelle cette légende est insidieusement entretenue par l’imagination collective et la culture de masse, même à travers l’utilisation de biographies d’autistes avérés38. Dans la culture anglo-saxonne, ce phénomène consistant à ne mettre en avant que des personnes exemplaires servant de source d’inspiration, est connu sous le nom d’inspiration porn.

Le rôle de l’effet Pygmalion négatif (image déficitaire associée à la condition d’autiste, particulièrement en France) mérite lui aussi d’être exploré, par comparaison avec les statistiques d’emploi en provenance d’autres pays tels que le Canada et la République tchèque39.

2.3.3.Trouvez-vous que c’est suffisant pour vivre dignement ?

Oui, bien : 25,2% Oui, mais juste : 20,3% Sans opinion : 11,9% Non, pas vraiment : 24,9% Absolument pas : 17,7%
127 (25,2%) : Oui, bien
102 (20,3%) : Oui, mais juste
60 (11,9%) : Sans opinion
125 (24,9%) : Non, pas vraiment
89 (17,7%) : Absolument pas

503 personnes ont répondu à la question de savoir si leurs ressources leur suffisent. 45,5 % estiment pouvoir vivre dignement (127 soit 25,2 % répondent Oui, bien, 102, soit 20,3 % Oui, mais juste), ce qui, mis en relation avec la question précédente, tend à montrer que les adultes autistes se satisfont d’un niveau de ressources globalement inférieur à celui de la population générale, dans un contexte d’appauvrissement des classes moyennes et populaires40. Une explication pourrait résider dans l’absence fréquente d’enfants : les enfants génèrent en effet des dépenses incompressibles, rarement couvertes par les aides financières d’État. Une autre explication, souvent évoquée dans le cadre de discussions entre personnes autistes, mais jamais à notre connaissance de façon officielle, pourrait être une habituation à un mode de vie économe, adopté notamment par les personnes d’un certain âge ayant connu des phases de précarité.

Un total de 42,6 % (125 soit 24,9 % répondent Non, pas vraiment, 89, soit 17,7 % Absolument pas) estiment ne pas pouvoir vivre dignement. 60 (soit 11,9 %) sont sans opinion.

La question mériterait d’être creusée par une exploration de ce qui constitue un mode de vie digne pour les adultes autistes. Les attentes sont visiblement différentes de celles de la population non-autiste : pas ou peu de vacances à but social, pas de sorties au bar ou en boîte de nuit dans le but de faire des rencontres (voir la section hobbies de cette même enquête), peu de souhaits de possession d’objets visant à obtenir de la validation sociale (tels que des vêtements à la mode ou des montres onéreuses)41. En contrepartie, l’expression de besoins entrant dans le cadre d’intérêts spécifiques, quels qu’ils soient, peut être fréquente (allant de l’achat de dictionnaires à l’accès à un conservatoire de musique, en passant par l’achat d’objets de collection, ou la pratique d’un sport).

De nombreux observateurs non-autistes considéreraient ces besoins comme un luxe ou un simple loisir, sans imaginer que des adultes autistes puissent couper drastiquement dans ce qui est vu comme des besoins de base, selon la pyramide des besoins de Maslow (ex : se priver de chauffage l’hiver), pour se rendre par exemple à un cours de chant au conservatoire local42. Tony Attwood note qu’un certain nombre d’inculpations d’adultes Asperger pour vol découlent d’impossibilités d’accéder à un centre d’intérêt spécifique43.

2.4.Gestion du quotidien

Les difficultés rencontrées par les adultes autistes dans la gestion de leur quotidien ont été largement démontrées par un faisceau d’études concordantes, généralement cantonnées aux pays anglo-saxons et scandinaves44. La situation de handicap découle probablement d’une incompatibilité entre le fonctionnement autiste, notamment en matière de mémoire de travail ou trouble des fonctions exécutives, et la nature des tâches de gestion quotidienne attendues, notamment, dans la société française.

En rappelant que le présent sondage compte plus de répondantes que de répondants, d’après l’analyse de témoignages (et leur possible subjectivité), ces difficultés pourraient être plus nombreuses et importantes chez les femmes autistes que chez les hommes45 : Lorsque l’on demande aux parents d’évaluer le fonctionnement de leur enfant au quotidien, il s’avère que les filles ont plus de mal avec les aptitudes qui permettent l’autonomie. Ce qui est étonnant, car les filles présentant un TSA ont généralement de meilleures aptitudes sociales et de communication durant les évaluations cliniques. Il serait normal de supposer que ces aptitudes les aideraient à mieux fonctionner dans leur quotidien, cependant nous avons trouvé que ce n’est pas toujours le cas.

Cette particularité entraîne vraisemblablement une situation de handicap importante, dans la mesure où les attentes sociales concernant les femmes portent encore souvent, et traditionnellement, sur la gestion des tâches domestiques, malgré des évolutions sociétales récentes.

De nombreux témoignages, sur les réseaux sociaux ou sur forum, font état d’oublis récurrents dont les conséquences peuvent être graves (perte totale de ressources du fait de l’oubli d’envoi d’un document, mise en danger au domicile tels que risque d’incendie ou oubli de verrouiller sa porte, etc), justifiant dans le cas de suivis médico-sociaux l’octroi d’une aide à domicile.

2.4.1.Avez-vous des problèmes avec la gestion de votre quotidien ?

Non, pas du tout : 3,2% Non, pas vraiment : 10,5% Sans opinion : 3,4% Oui, un peu : 53,5% Oui, totalement : 29,4%
16 (3,2%) : Non, pas du tout
53 (10,5%) : Non, pas vraiment
17 (3,4%) : Sans opinion
269 (53,5%) : Oui, un peu
148 (29,4%) : Oui, totalement

Sans surprise, une très nette majorité des 503 répondants (82,9 %) déclare rencontrer des difficultés dans la gestion du quotidien. Seuls 3,18 % (16) n’en déclarent aucune, 10,54 % (53) disant ne pas vraiment en connaître, 3,38 % (17) ne s’exprimant pas à ce sujet.

Ces résultats sont cohérents avec la littérature scientifique disponible, faisant largement état de l’existence de ces problèmes de gestion, y compris parmi la population autiste considérée comme la plus autonome.

Autre constat, expérimenter une situation de handicap est, très clairement, la norme des personnes autistes, l’absence de cette sensation de handicap, bien qu’exprimée par certains témoignages, relevant de l’exception.

Pour autant, il n’en faudrait conclure que cette situation de handicap soit un état immuable et permanent, dans la mesure où elle résulte d’une inadéquation entre les conditions de vie imposées et les particularités de la personne.

2.4.2.Si oui, quels domaines posent problème ?

50 100 150 200 250 300 350 Hygiène Rangement, ménage Administration Cuisine Courses Gestions financières Déplacement
122 (27,6%) : Hygiène
285 (64,5%) : Rangement, ménage
326 (73,8%) : Administration
181 (41,0%) : Cuisine
197 (44,6%) : Courses
226 (51,1%) : Gestions financières
201 (45,5%) : Déplacement

442 personnes ont répondu à cette question à choix multiples, soit toujours une légère marge d’erreur, 417 répondants à la question précédente ayant déclaré des problèmes.

La gestion administrative constitue le domaine le plus fréquemment cité, par 73,8 % des répondants (326 personnes). Ce point fournit une explication au fort taux apparent de non-recours aux prestations sociales, constaté dans la section 2.3.1. Il est vraisemblable qu’un nombre conséquent d’adultes autistes soient dans l’impossibilité de demander les prestations de compensation auxquelles ils ont légalement droit. De même, en relation avec cette notion de situation de handicap, vivre dans un pays très administratif tel que la France pourrait générer davantage de difficultés pour les habitants autistes que de vivre au sein d’un pays dans lequel les procédures administratives seraient moins nombreuses et plus simples.

Les éléments collectés quant à l’existence ou non d’une phobie administrative plaident plutôt pour l’inexistence de cette éventuelle entité46. Cependant, les sources liées à l’article précité montrent qu’un nombre conséquent de personnes témoignent laisse[r] s’entasser les courriers administratifs sans y répondre, dans une fuite en avant47, un fait relaté par quelques adultes autistes sur des forums et réseaux sociaux. Il serait intéressant de savoir combien de personnes autistes sont concernées, et de favoriser leur autonomisation au sein de cette jungle à paperasseries que peut être l’administration française.

En seconde position, le rangement et le ménage sont cités par 64,5 % des répondants. Si ce point est souvent mis en relation avec des troubles associés à l’autisme, tels que la dyspraxie et la difficulté de planification motrice (voir introduction 2.4) dans les publications d’ordre médical, ce que recouvre la notion de situation de handicap reste à explorer. Le mode de vie occidental pousse à l’accumulation de nombreux objets, et à valoriser un vaste espace de vie comme symbole de réussite sociale, plutôt qu’au minimalisme. De même, le désordre est socialement connoté de façon très négative, ce alors qu’à titre d’unique exemple, un bureau en désordre serait associé à davantage d’efficacité et de créativité chez son utilisateur48. Il est possible qu’un certain nombre de répondants soient influencés par un biais sociétal, sans par ailleurs nier le sentiment de difficulté éprouvé.

En troisième position, la gestion financière est citée par 51,1 % des répondants, soit un peu plus de la moitié. Une exploration de ce que les répondants placent sous la définition de gestion financière permettrait d’affiner, car il semble logique que le suivi de son propre compte bancaire sur internet soit globalement plus simple, et moins source de stress, que des situations incluant la mobilisation de compétences sociales, telles qu’un rendez-vous physique avec un conseiller financier, ou encore la négociation d’un prêt immobilier, attendu que les personnes autistes puissent être, d’après des retours concordants, facilement abusées par le personnel de leur propre agence bancaire.

En relation avec la section 2.5.5, les priorités que les adultes autistes accordent à leurs postes de dépenses pourraient n’être pas comprises par leur entourage, en particulier si cela les conduit à couper dans ce qui est traditionnellement vu comme un besoin vital (alimentation, chauffage…), pour financer ce qui est vu extérieurement comme une passion, des centres d’intérêts que les personnes autistes considèrent comme un besoin vital, une part fondamentale de leur identité et de leur être.

Les difficultés dans les déplacements, évoquées par 45,5 % des répondants, sont sans doutes multifactorielles. La fréquente impossibilité de passer l’examen du permis de conduire est examinée en 2.4.5. Les transports en commun posent des problèmes en termes de sensorialité et de foule notamment : les annonces sonores des gares, stations de métros et aéroports sont généralement trop bruyantes pour les personnes autistes, la saturation d’espaces publicitaires lumineux et mouvant créée de la fatigue. L’aspect financier peut aussi entrer en compte.

Dessin de Blequin

44,6 % des répondants déclarent des difficultés à faire leurs courses. L’aspect sensoriel entre probablement pour une large part dans le refus de fréquenter grandes surfaces et autres centres commerciaux, ces lieux concentrent l’ensemble des agressions sensorielles et situations sociales pénibles pour la population autiste : diffusion de musique, foule à certaines heures, éclairage au néon, couleurs juxtaposées et criardes pour attirer l’œil, difficultés à repérer le produit recherché au sein d’une masse de produits similaires, consignes peu claires. Il est à ce titre dommage qu’aucune chaîne de grandes surfaces française n’ait mis en place d’horaires calmes, équivalent de l’initiative anglo-saxonne connue sous la nom de quiet hour49, dont l’intérêt dépasse de loin la réponse aux hypersensibilités sensorielles de la population autiste. Gageons que les difficultés à faire des courses seraient alors nettement amoindries. Une autre solution réside dans les commandes en ligne et livraisons à domicile.

41 % des répondants évoquent des difficultés avec la cuisine. En ce domaine, les particularités listées hors du cadre du présent sondage sont très nombreuses, telles que présentées par exemple dans l’ouvrage collaboratif Je cuisine un jour bleu50. Lister toutes ces particularités alimentaires (refus de textures, focalisation sur une couleur, sensibilité aux agressions gustatives, impossibilité de manger cuit) conduirait à dérouler une liste conséquente. La difficulté à cuisiner peut-être accrue par les problèmes d’organisation et de planification, ne serait-ce qu’à en juger par la fréquence des témoignages d’attentats culinaires51. Rien ne semble cependant s’opposer par nature à un apprentissage progressif de l’art culinaire.

27,6 % des répondants déclarent des soucis d’hygiène. Ce chiffre pourrait être sous-estimé, car les problèmes d’hygiènes sont unanimement, ou presque, vécus comme un marqueur de honte, poussant théoriquement à les dissimuler plutôt qu’à les avouer.

Point rarement, sinon jamais abordé : les évolutions sociétales et la nécessité d’économiser l’eau ont favorisé la disparition des baignoires au profit des douches, ce alors que des témoignages concordants évoquent l’aspect sensoriellement désagréable de l’eau coulant sur la peau depuis un pommeau de douche, par comparaison à la prise d’un bain (ou, pour citer un exemple dont la disparition est souhaitable, l’attrait des enfants institutionnalisés pour les pataugeoires, par opposition aux difficultés pour leur faire prendre une douche). La réduction croissante du temps libre favorise elle aussi la relégation des baignoires aux musées. Peut-être les problèmes d’hygiène sont-ils accrus parce qu’une partie des gens autistes vivent la prise d’une douche comme une expérience désagréable, au contraire de la grande majorité des gens non-autistes.

Un autre point, étonnamment jamais mentionné dans les médias français, serait une modification de l’hygiène générale de la population du fait d’un appauvrissement touchant, en particulier, les classes moyennes52. La moitié des répondants vivant sous le seuil de pauvreté, une volonté d’économiser l’eau entre peut-être en compte.

Dans son rapport de mars 2017, Josef Schovanec avait évoqué un lien possible entre le syndrome dit de Diogène et l’autisme53, relation soulignée par une étude isolée54, qui en conclut que The co-occurrence of these two conditions is an intriguing one as certain key features of autistic spectrum disorder may predispose to Diogenes syndrome (en français : La co-occurrence de ces deux conditions est intrigante, car certaines caractéristiques clés du trouble du spectre de l’autisme peuvent prédisposer au syndrome de Diogène). Le syndrome de Diogène se caractérise par des conditions de vie tendant vers l’insalubre, et un besoin d’accumulation. Une possibilité tenable de mode de vie nomade en France (voir 2.2.1) empêcherait, ou du moins diminuerait fortement ce risque.

2.4.3.Avez-vous une aide humaine ?

Oui : 35,0% Non : 65,0%
172 (35,0%) : Oui
319 (65,0%) : Non

491 personnes ont répondu à cette question. Presque les deux tiers des répondants (65 %) ne reçoivent aucune aide humaine, malgré des difficultés nettement exprimées. Ce fait peut trouver de multiples explications, la principale étant probablement l’absence de diagnostic et de reconnaissance du handicap, la suivante une mésentente avec les membres de la famille. Un refus des autorités administratives d’accorder l’aide, ou un refus personnel des intrusions à son domicile, constituent d’autres pistes possibles.

La question de la finalité des aides humaines fait partie des points douloureux, qui devront être un jour ou l’autre explorés. Ce type d’aide devrait, dans l’idéal, viser au maximum l’autonomisation des personnes, ce qui n’est pas toujours le cas lors des constats de terrain, ne serait-ce que pour des raisons de pérennisation d’emplois. Parmi les familles, dont le dévouement ne saurait être remis en cause, perdurent des discours d’infériorisation et de pathologisation des adultes autistes, de type il ne saura pas faire / n’y arrivera pas, conduisant à pérenniser des situations de dépendance.

2.4.4.Si oui, de quel type ?

20 40 60 80 100 120 AVS Auxiliaire de vie SAMSAH Famille Coach privé Autre
12 (6,3%) : AVS
10 (5,2%) : Auxiliaire de vie
6 (3,1%) : SAMSAH
118 (61,8%) : Famille
8 (4,2%) : Coach privé
77 (40,3%) : Autre

191 personnes ont répondu à cette question à choix multiples. Il existe donc une marge d’erreur, 172 personnes ayant déclaré avoir une aide humaine à la question précédente. Il est logique qu’une partie de ces erreurs découlent du fait que certains répondants ne comptent pas spontanément les membres de leur famille parmi ces aides humaines.

Sans surprise, c’est la famille qui le plus souvent fournit une aide aux adultes autistes français, à une nette majorité, soit 61,8 % des réponses. Ce constat permet aussi d’appuyer la nécessité d’une reconnaissance du statut d’aidant familial.

Les réponses du champ autre témoignent d’une certaine confusion dans la compréhension de la question, des personnes citant hôpital de jour, psychologue, éducateur, ou encore des membres de leur famille, une bonne part (environ le tiers) des réponses de ce champ autre pouvant être ventilées vers la catégorie famille. 7 personnes (3,66 %) citent un SAVS, service d’aide à la vie sociale : le recours à ce service chez les adultes autistes est par conséquent un peu plus fréquent que celui au service d’accompagnement médico-social pour adultes handicapés (SAMSAH). Deux personnes (1,04 %) mentionnent une Aide médico-psychologique (AMP). Deux répondants s’estiment insultés par cette question, précisant qu’ils sont autonomes dans leur vie quotidienne.

2.4.5.Êtes-vous titulaire du permis de conduire ?

Oui : 58,8% Non : 37,6% Je suis en train de le passer : 3,6%
295 (58,8%) : Oui
189 (37,6%) : Non
18 (3,6%) : Je suis en train de le passer

502 personnes ont répondu à cette question, ce qui permet de constituer le premier échantillon de réponses représentatives à la question du permis de conduire, sujet n’ayant été abordé que très récemment dans le cadre des plans autisme gouvernementaux. La majorité des répondants ont leur permis (58,8 %), quelques-uns déclarant être en train de le passer (3,6 %). La part d’adultes autistes français n’ayant pas leur permis de conduire (37,6 %) est vraisemblablement plus élevée que dans la population générale, bien qu’il soit impossible de le calculer plus précisément. La France comptait environ 30 millions de conducteurs en 2011, sur une population totale (mineurs inclus) de 64 933 400 personnes cette même année55.

On estime par ailleurs que 300 000 à 2,5 millions (moyenne 500 000 ?) Français conduisent sans avoir le permis (chiffres 2011 et 2015)56, comportement que l’on peut présumer être plus rare chez les adultes autistes en raison de leur tendance à suivre les lois et les règles.

En relation avec les questions précédentes, notamment celles concernant les revenus, il apparaît qu’ une personne autiste ayant de faibles revenus et ne disposant pas du permis de conduire puisse être sévèrement limitée dans ses déplacements, en particulier en cas d’habitation dans une zone rurale telle que la Bretagne, région d’où sont originaires une bonne partie des répondants. La suppression annoncée des lignes de train non-rentables réduit d’autant leur mobilité. Les solutions alternatives, bus longue distance et covoiturage, ne sont pas forcément accessibles, notamment le covoiturage, qui peut exiger une mobilisation importante de compétences sociales.

2.4.6.Si non, pourquoi ?

20 40 60 80 100 Coût du permis Tiers temps Peur au volant Pas d’utilité Opposé (pollution, environnement…) Autre
54 (28,3%) : Coût du permis
8 (4,2%) : Tiers temps
77 (40,3%) : Peur au volant
34 (17,8%) : Pas d’utilité
25 (13,1%) : Opposé (pollution, environnement…)
92 (48,2%) : Autre

191 personnes ont répondu à cette question à choix multiples, soit une très petite marge d’erreur, 189 personnes ayant déclaré ne pas avoir passé le permis.

Le champ autre recouvre la majorité des réponses fournies. Une part conséquente de ces réponses devrait être ventilée vers la peur au volant, les répondants évoquant par exemple une peur d’être dangereuse pour les autres et moi-même, une peur de le passer, du stress, un manque de réflexes, un manque de courage, ou un sentiment global d’inaptitude, résumé par exemple dans la réponse Je pense sincèrement ne pas être capable de l’obtenir (pas assez de réactivité, prises de décision trop lentes, etc…).

Ces réponses rendent très palpable l’expérience d’un sentiment d’infériorité, récurrent chez les répondants. Quelques réponses évoquent des handicaps précis : dyspraxie, TDAH (certaines personnes avec TDAH sont interdites de conduite par leur médecin traitant), difficultés de concentration et d’attention, fatigue, prise de médicaments incompatibles avec la conduite. Il est cependant manifeste que nombre de répondants ont intériorisé un manque de confiance en eux-mêmes. Une remarque subséquente pourrait être faire, loin d’une volonté de blâme, quant à un certain manque de persévérance, avec des abandons rapides par peur d’un nouvel échec57. Ce constat est en cohérence avec la faible estime de soi constatée dans les réponses du champ autre.

Une partie des réponses de ce champ autre précisent le nombre d’échecs de passage du permis ou à l’examen du code, ne répondant pas de ce fait à la question initiale.

La peur de conduire est la première raison objectivement exprimée, en additionnant les 40,3 % de répondants qui ont choisi ce champ, et les réponses du champ autre. En second motif, le coût du permis (28,3 % des répondants) est corrélé au constat fait dans la section ressources du présent sondage, le passage du permis de conduire représentant une charge financière lourde pour des personnes en situation de pauvreté ou de grande pauvreté.

Un texte de loi en vigueur actuellement (depuis 2005) concerne les affections médicales incompatibles avec l’obtention ou le maintien du permis de conduire ou pouvant donner lieu à la délivrance de permis de conduire de durée de validité limitée. Il recouvre des affections pouvant exposer un candidat ou conducteur, à la délivrance ou au renouvellement d’un permis de conduire, à une défaillance d’ordre neurologique ou psychiatrique de nature à provoquer une altération subite des fonctions cérébrales constituant un danger pour la sécurité routière58.

La question de savoir si un diagnostic d’autisme entre ou non dans cette configuration n’est pas tranchée. Cependant, dans la mesure où le descriptif médical de l’autisme oscille actuellement entre la neurologie et la psychiatrie, il y a fort à parier que tout adulte autiste soucieux, par nature, de respecter la loi, se sente concerné par cet Arrêté du 21 décembre 2005.

Une clarification du statut de l’autisme dans le cadre de cet Arrêté apparaît nécessaire.

2.5.Activités

La nature et l’intensité des activités font partie du descriptif médical de l’autisme, et ce en des termes plus ou moins respectueux, allant du dépréciatif mais très officiel intérêts restreints (DSM 5, CIM 10, CIM 11), jusqu’aux intérêts spécifiques, formulation ayant la préférence de Tony Attwood. Le présent questionnaire utilise la formulation loisirs/hobbies, pas forcément la mieux adaptée.

La part d’adultes autistes ayant des intérêts spécifiques mériterait d’être mieux étudiée et clarifiée. Outre qu’un certain nombre d’adultes se font refuser, ou au contraire reçoivent un diagnostic, faute de/ malgré l’absence d’intérêt spécifique clairement perçu par les professionnels de santé59, la question de la disparition de ces centres d’intérêt attire une attention toute particulière, dans la mesure où elle peut entraîner une disparition de la qualité d’autiste même. Josef Schovanec l’explore tout au long de son essai Nos intelligences multiples (éditions de l’Observatoire, 2018), concluant que les mondes de l’autisme ne dureront pas éternellement60.

Nombre de parcours de vie d’adultes autistes considérés comme les mieux insérés socialement se caractérisent par la disparition ou la dilution progressive de leur centre d’intérêt, en parallèle de l’apprentissage ou du maintien de compétences sociales, et au profit parfois d’occupations sans but manifeste, telles que la pratique d’un jeu vidéo des heures durant. Cette observation fut déjà faite concernant une fillette autiste non-verbale d’origine ukrainienne, très célèbre dans les années 1980, Nadia Chomyn. Elle perdit son talent pour le dessin en parallèle de sa socialisation dans un centre d’éducation spécialisé, et à l’âge de vingt ans, ne dessinait plus guère, passant le plus clair de son temps à regarder la télévision61.

La présente section Activités ne permet pas d’explorer la question de la fréquence des intérêts spécifiques, ni celle de leur pérennité. Néanmoins, une conclusion évidente peut être tirée : la solitude est davantage subie du fait de difficultés éprouvées dans les rapports interpersonnels, que volontairement recherchée par les répondants.

Autre point remarquable, cette section montre que l’association médiatique entre l’autisme dit Asperger et les emplois ou intérêts dans le secteur informatique est fausse.

2.5.1.Avez-vous des activités ou occupations avec d’autres personnes ?

Oui : 73,9% Non : 26,1%
359 (73,9%) : Oui
127 (26,1%) : Non

486 personnes ont répondu à cette question. Un peu plus d’un quart des répondants n’ont pas déclaré d’activités avec d’autres personnes. La formulation de la question incluant la précision avec d’autres personnes, les activités en solitaire, qui forment la majorité des activités autistiques (voir question 2.5.5), sont par conséquent exclues du champ des réponses.

Contrairement à l’image populaire et médiatique de la bulle solitaire, il apparaît qu’une très nette majorité (73,9 %) des répondants partagent des activités avec d’autres personnes.

2.5.2.Si oui, avec qui ? (plusieurs réponses possibles)

50 100 150 200 250 Ma famille Mon conjoint Mes amis Mes collègues de travail Mes collègues de loisirs Réseaux sociaux (Facebook, forums…) Jeux en ligne Autre
212 (58,4%) : Ma famille
114 (31,4%) : Mon conjoint
161 (44,4%) : Mes amis
47 (12,9%) : Mes collègues de travail
74 (20,4%) : Mes collègues de loisirs
163 (44,9%) : Réseaux sociaux (Facebook, forums…)
43 (11,8%) : Jeux en ligne
79 (21,8%) : Autre

363 personnes ont répondu à cette question à choix multiples, soit une marge d’erreur de 3. La majorité des activités partagées le sont avec des membres de la famille, ce qui tend à démontrer une relation avec la question 2.4.4, les adultes autistes recevant le plus souvent l’aide de leur famille pour leur organisation quotidienne, ce qui favorise des activités en commun.

Seconde réponse, les réseaux sociaux comptent pour 44,9 % des répondants. Permettant des échanges d’informations sans contact en face-à-face, leur fréquence est logique. Les relations amicales classiques comptent pour 44,4 % des activités de groupe. La quatrième réponse par ordre de fréquence (31,4 %) est un partage d’activités avec le conjoint ou la conjointe, reflétant la faible part d’adultes autistes engagés dans une vie de couple. Les collègues de loisir et collègues de travail comptent, respectivement, pour 20,4 et 12,9 % des répondants.

La part occupée par les jeux en ligne (11,8 %) est étonnamment basse, sachant qu’environ 7 français sur 10 jouent à des jeux vidéo de tout type, dont 58,3 % déclaraient jouer à des jeux vidéo en ligne ou hors ligne en 201462. De plus, ce type de jeu est par nature attirant pour la population autiste en raison de l’absence d’interactions en face à face63. Deux études américaines basées sur les anciens critères diagnostiques du syndrome d’Asperger ont montré, d’une part, que l’addiction aux jeux massivement multijoueurs (type MMORPG) est fréquente chez les personnes diagnostiquées Asperger64, d’autre part qu’une population randomisée de joueurs de MMORPG répondait à de nombreux critères diagnostiques du SA65. Il est possible que des répondants aient mal compris l’énoncé, ou réduit la réponse oui aux seuls cas d’une pratique importante de jeux en ligne.

Parmi les 21,8 % de réponses du champ Autre, sont mentionnées, encore une fois, les rencontres périodiques avec d’autres personnes autistes, des activités de bénévolat en association (restaurants du Cœur, bibliothèque, rencontres entre membres de Mensa), des activités sportives en groupe (basket, cours d’équitation…) ou religieuses (messe hebdomadaire), de la gestion de communautés en ligne, et des réponses qui devraient être ventilées dans les catégories Amis, Collègues et Famille. Une part assez importante des réponses du champ autre ne sont pas exploitables, ou ne répondent pas à la question. Une dizaine de ces réponses évoquent notamment la fatigue générée par les interactions sociales : 3 jours par semaine et c’est déjà trop […] Je n’en peux plus, ou encore je suis fort isolé malgré de titanesques efforts d’aller vers les autres, et cela me fait souffrir […].

2.5.3.Si vous n’avez pas d’activités ou d’occupations avec d’autres personnes, pourquoi ?

50 100 150 200 Je ne pense pas en avoir besoin Je n’en ai pas envie J’ai du mal à communiquer/me faire des amis Je ne connais personne Problèmes avec l’environnement (bruits, lumières…) Coût des sorties Autre
29 (12,7%) : Je ne pense pas en avoir besoin
69 (30,1%) : Je n’en ai pas envie
175 (76,4%) : J’ai du mal à communiquer/me faire des amis
73 (31,9%) : Je ne connais personne
91 (39,7%) : Problèmes avec l’environnement (bruits, lumières…)
48 (21,0%) : Coût des sorties
33 (14,4%) : Autre

229 personnes ont répondu à cette question, ce qui indique une grosse marge d’erreur, car seuls 127 répondants avaient déclaré non à la question 2.5.1. Il est vraisemblable, en cohérence avec la dizaine de réponses non-exploitables à la question précédente, que nombre de répondants aient ressenti le besoin d’expliciter leurs difficultés dans les activités de groupe. Constat remarquable, contrairement à un stéréotype ou préjugé répandu dans le domaine de l’autisme, seule une minorité de personnes (12,7 %) pense n’avoir pas besoin de partager des activités avec d’autres personnes. La solitude apparaît, en ce sens, non recherchée, mais plutôt subie. Il est possible qu’une évolution au fil du parcours de vie entre en compte : ce constat demande à être vérifié, mais le nombre d’adultes autistes qui entretiennent des efforts de socialisation durant leur jeune âge, avant de cesser ces efforts l’âge venant, semble conséquent. Le même constat vaut pour les expériences de vie de couple.

Plus des trois quarts (76,4 %) des répondants évoquent des difficultés à communiquer et se faire des amis. La compréhension et la gestion des amitiés est notoirement difficile pour les personnes autistes66, que ce soit en terme de compréhension des attentes de l’autre, ou en terme de défaut d’estime de soi, due à la répétition des situations de harcèlement. La fréquence de cette réponse par comparaison aux autres propositions est très nette, permettant d’affirmer sans risque qu’il s’agit de la première cause d’évitement des activités de groupe. La troisième réponse par ordre de fréquence, je ne connais personne (31,9 %), n’indique pas si cette situation est voulue ou subie, mais entre dans une même catégorie de difficultés dans les rapports sociaux.

En seconde position, à 39,7 %, sont évoqués les problèmes sensoriels dans l’environnement. En la matière, la France, qui n’a pas franchi l’étape de la désinstitutionnalisation contrairement à nombre d’autres pays, accuse aussi un net et très logique retard en matière de création ou de repérage d’environnements inclusifs pour les personnes autistes, ou plus simplement de sensibilisation.

En quatrième position, le manque d’envie est cité par 30,1 % des répondants, réponse pouvant être mise en lien avec les 12,5 % de répondants qui pensent n’avoir pas besoin d’activités en groupe. Si la recherche volontaire de solitude apparaît minoritaire en comparaison à la solitude subie, cette réponse tend à démontrer qu’il n’en faudrait pas pour autant négliger ou nier le besoin d’activités uniquement solitaires.

Des questions de coût entrent en compte pour 21 % des répondants, là aussi à mettre en lien avec le constat d’un échantillon de répondants sous le seuil de pauvreté pour plus de la moitié d’entre eux.

2.5.4.Avez-vous des loisirs / hobbies (en termes de nombre) ?

Oui, beaucoup : 20,8% Oui, un peu : 74,7% Non, aucun : 4,5%
101 (20,8%) : Oui, beaucoup
363 (74,7%) : Oui, un peu
22 (4,5%) : Non, aucun

486 personnes ont répondu à cette question. La grande majorité des répondants (74,69 %) estiment avoir un peu de loisirs et hobbies en termes de nombre, ce qui est cohérent avec le descriptif du profil autistique, notoirement davantage porté sur un type réduit d’activités explorées en profondeur, que sur la pratique en surface d’un grand nombre d’activités. La part de répondants oui, beaucoup est cependant quantitativement significative (20,78 %).

Enfin, 4,53 % des personnes déclarent n’avoir aucune activité. Une exploration subséquente du sondage permettrait de creuser la piste d’un lien potentiel entre absence de pratiques de loisirs / de hobbies et état dépressif, que l’on sait être fréquent chez les adultes autistes, et qui se caractérisent par une perte des émotions positives associées à la pratique d’une activité habituellement vécue comme agréable.

2.5.5.Si oui, quels types de loisirs/hobbies avez-vous ?

(Si non, passez à la question 27)

50 100 150 200 250 300 Lecture Écriture Informatique (codage, programmation…) Jeux vidéos / de société Réseaux sociaux (Facebook, Twitter…) Cinéma Dessin Modelage Peinture Broderie Couture (confection…) Sports en équipe Sport solo Autre
297 (64,6%) : Lecture
152 (33,0%) : Écriture
69 (15,0%) : Informatique (codage, programmation…)
168 (36,5%) : Jeux vidéos / de société
141 (30,7%) : Réseaux sociaux (Facebook, Twitter…)
124 (27,0%) : Cinéma
87 (18,9%) : Dessin
12 (2,6%) : Modelage
52 (11,3%) : Peinture
7 (1,5%) : Broderie
26 (5,7%) : Couture (confection…)
18 (3,9%) : Sports en équipe
87 (18,9%) : Sport solo
224 (48,7%) : Autre

460 personnes ont répondu à cette question. Les activités solitaires mobilisant le sens de la vue, ainsi qu’une certaine imagination, prédominent très nettement (lecture, écriture, peinture, dessins) sur celles qui s’effectuent en groupe (sports en équipe, théâtre), mobilisent d’autres sens (musique), ou s’appuient sur de la motricité fine hors activités informatique (modelage, broderie, couture…), bien que ce dernier point soit soit moins significatif. Les activités pratiquées sont en cohérence avec les descriptifs de l’intelligence autiste effectués notamment par les chercheurs de l’université de Montréal67.

La première activité déclarée par les adultes autistes est la lecture (64,6 %), sans précision toutefois quant à la question de savoir si elle s’effectue sur écran ou dans des livres papiers. Il existe cependant un biais possible en faveur d’une sur-représentation de la lecture : considérée comme une activité intellectuellement et socialement valorisante, elle peut être mentionnée même si le temps passé y est faible. Le même type de biais pousse des répondants, lors d’enquêtes à propos d’émissions de télévisions, à mettre en avant le visionnage de reportages sur des chaînes comme Arte et La 5, au détriment de celui de programmes considérés comme peu valorisants pour leur public, tels que les talk-shows et les jeux, même si le temps passé à la première activité est extrêmement faible comparativement à la seconde. Néanmoins, l’attrait des personnes autistes pour les bibliothèques68 et la lecture de contenu entrant dans leur domaine d’intérêt sont amplement démontrés. La proposition faite par le présent gouvernement français d’ouvrir les bibliothèques publiques le dimanche, et de permettre une ouverture plus tardive le soir, répondrait sans doute à un besoin nettement exprimé ici.

La proposition regarder la télévision n’existe passeules 5 personnes (1,08 %) mentionnent cette activité dans le champ autre. La proportion est sans doute plus élevée, mais on peut théoriser que le temps de visionnage d’émissions de télévision soit inférieur, parmi les répondants, à celui de la population générale (3h41 /J de moyenne en 2014)69.

Seconde activité en termes de temps, les jeux vidéo et les jeux de société, pratiqués par 168 (36,5 %) des répondants. Ces deux types d’activités sont assez différents dans le contexte présent : les jeux vidéos sont en général pratiqués en solitaire, ou en ligne avec d’autres personnes (dans le cadre, par exemple, des MMORPG), alors que les jeux de société se pratiquent en la présence physique d’un groupe. La pratique des jeux vidéo est sans doute statistiquement plus importante que celle des jeux de société (voir références en 2.5.2). A ces deux activités, on peut adjoindre la mention des jeux de rôle (3 fois, 0,65 %) dans le champ autre, activité qui semble par ailleurs concerner un nombre important de personnes autistes70.

L’écriture est la troisième activité la plus mentionnée (33 %), ce qui marque là aussi une différence probable avec la population générale, bien qu’il soit difficile d’obtenir des chiffres comparatifs fiables71. Le même biais dans les réponses (valorisation culturelle et intellectuelle) que pour l’activité de lecture, s’applique. Cette réponse inclut logiquement des activités de rédaction de blogs sur internet, qui comptent certainement pour une bonne part. Il existe aussi des exemples de personnes autistes rédigeant en solitaire du contenu amené à n’être publié qu’à très petite échelle. Par ailleurs, un certain nombre d’écrivains connus pourraient être concernés par l’autisme, en particulier dans des littératures dites de niche telles que celles de l’imaginaire, science-fiction, fantasy et fantastique72.

Vient ensuite le cinéma (27 %), qui constitue un loisir potentiellement adapté à qui veut éviter les relations sociales, puisque le visionnage d’un film en salle n’implique pas de discussions avec d’autres personnes, et qu’il est possible de l’effectuer seul(e). Un premier constat pourrait être fait : la moyenne de fréquentation des cinémas français étant de 3,2 entrées par personne en moyenne en 2017, le fait que seuls 27 % des répondants déclarent fréquenter des cinémas semble indiquer que ce loisir soit moins fréquent chez les répondants que parmi la population générale, 59 à 60 % des Français ayant fréquenté au moins une fois une salle de cinéma en 201473. Cependant, le questionnaire ne précise pas à partir de quel taux de fréquentation d’une salle de cinéma cela puisse être comptabilisé comme un loisir ou hobby significatif.

Le dessin est mentionné à une fréquence remarquablement élevée (18,9 %), bien que là encore, il ne semble pas exister de statistiques permettant de comparaison fiable avec la population générale, au sein de laquelle l’évolution classique est une pratique du dessin s’arrêtant durant l’enfance. Ce constat pourrait avoir plusieurs explications. Un certain nombre de répondants ont fréquenté des établissements dans lesquels la pratique du dessin est encouragée. Plusieurs adultes autistes ont, comme Temple Grandin, témoigné avoir une pensée en images ou une imagerie mentale adaptée à la pratique du dessin. Uta Frith avait, suivant sa formulation habituelle, identifié le dessin comme un îlot de compétences chez les enfants autistes ; quelques études isolées, mais concordantes, sont venues confirmer l’attrait des personnes autistes pour le dessin74. Il est vraisemblable que pour certains répondants, le dessin ne constitue pas qu’un loisir ou un hobby, mais aussi, et avant tout, une activité professionnelle. Voire, un moyen de communication plus intuitif que e l’est l’usage de la parole, en cohérence avec plusieurs autobiographies (Grandin, Williams…).

Les sports en solo sont pratiqués aussi fréquemment que le dessin (18,9 %), ce qui constitue une fréquence 5 fois plus élevée que celle des sports en équipe (3,9 %), reflétant des préférences pour les activités en solitaire, qu’elles soient voulues ou non.

Les activités informatiques comptent pour 15 % des répondants. Malgré une image médiatique populaire associant autisme de haut niveau et syndrome d’Asperger aux métiers de l’informatique et à la Silicon Valley, cette statistique montre clairement que l’informatique est un centre d’intérêt minoritaire, comme l’a d’ailleurs souligné Josef Schovanec dans son rapport : les personnes autistes réellement intéressées par l’informatique sont minoritaires, voire relativement rares. D’autre part, phénomène moins visible, existe une disproportion manifeste entre l’intensité de leur implication et le nombre de personnes parvenant effectivement à tirer un revenu décent et régulier de ces activités75.

La peinture est citée par 11,3 % des répondants, ce qui, additionné aux 18,9 % de pratiquants du dessin, vient renforcer le constat d’un attrait certain pour les activités artistiques en solitaire. Cependant, les mentions d’activités de modelage (2,6 %) sont plutôt rares.

La couture (5,7 %) et la broderie (1,5 %), bien qu’activités solitaires, sont mentionnées de façon beaucoup plus rare que le dessin, la peinture et la lecture. La raison n’est pas à chercher dans un biais de genre, les répondants au présent questionnaire étant majoritairement des femmes. De façon générale, peu de français semblent pratiquer couture et broderie ; en ce qui concerne les adultes autistes répondants, des problèmes de motricité fine entrent peut-être en compte.

Parmi les réponses très variées du champ autre, apparaissent une certaine récurrence des activités dans les domaines de la musique (19 mentions ; 4,14 %, dont 3 pianistes), le jardinage (16 mentions, soit 3,47 %), la photographie (15 mentions, 3,26 %), l’apprentissage des langues (14 mentions ; 3,04 %), les activités dans l’entourage d’animaux (11 mentions ; 2,39 %, probablement sous-estimé), et dans une moindre mesure, des voyages (5 mentions, 1,09 %, là aussi probablement sous-estimé). Parmi les réponses multiples de ce champ figurent aussi 4 collections.

La fréquentation d’animaux et les voyages ne sont pas toujours perçus comme des loisirs ou des hobbies par certains répondants, dans la mesure où ils représentent par exemple un aspect de leur activité professionnelle. L’enquête du CRAIF (2018) montre une certaine cohérence avec ces réponses, cette dernière enquête citant des intérêts pour les animaux, le jardinage, l’informatique/internet, du bénévolat associatif, et un besoin d’être à l’extérieur.

Une enquête publiée début 2018, au sujet des centres d’intérêts des personnes autistes, conclut à des différences qualitatives et quantitatives entre hommes et femmes : les hommes interrogés présentaient plus fréquemment un centre d’intérêt clairement défini. Par ailleurs, les intérêts les plus fréquents chez les femmes sont l’autisme lui-même, la nature et le jardinage, tandis que chez les hommes, dominent l’informatique, les jeux et la musique76.

2.5.6.Combien de temps cela vous prend-il par semaine ?

385 personnes ont répondu à cette question ouverte, ce qui indique une nette perte de répondants, 464 personnes ayant déclaré avoir des hobbies en 2.5.4. Les durées indiquées sont variées, s’égrenant de 0,1 heure jusqu’à 150 heures, cette dernière réponse étant peu réaliste puisqu’une semaine dure 168 heures. Cette réponse a néanmoins été conservée.

Les réponses sans données chiffrées (type tout mon temps, longtemps, je ne saurais le quantifier, des heures, presque tout le temps sauf quand je dors, etc.) ont été éliminées du calcul de la moyenne, de même que les réponses ne permettant pas de sortir une moyenne de temps, ce qui permet d’aboutir à un total de 336 réponses exploitables.

La moyenne est de 24,45 heures. S’il y a quelques mentions de durées très conséquentes (124, 110, 100 heures), dans la majorité, les réponses se situent dans une fourchette de 10 à 35 heures.

2.6.Recours aux structures

La France reste le pays occidental ayant le plus haut taux d’institutionnalisation d’Europe77, dans un contexte de conflit avec l’ONU, concernant le respect des droits humains fondamentaux des personnes autistes.

Cette particularité influence sans doute les réponses, dans la mesure où le recours au structures tendra à apparaître comme une réponse plus logique et spontanée pour un Français que pour une personne concernée par l’autisme dans un autre pays.

2.6.1.Avez-vous recours à une structure ?

Oui : 20,0% Non : 59,8% Non, mais j’aimerais bien : 20,2%
94 (20,0%) : Oui
281 (59,8%) : Non
95 (20,2%) : Non, mais j’aimerais bien

470 personnes ont répondu à cette question. La majorité des répondants (59,8 %) n’ont pas recours à une structure, et ne souhaitent pas le faire. 20 % y ont recours, 20,2 % le souhaiteraient. Il est possible que l’emploi du mot structure ait généré une confusion, dans la mesure où ce mot est souvent associé, dans l’esprit des personnes concernées par l’autisme, à des institutions de soins telles que les hôpitaux de jour, instituts médico-éducatifs et hôpitaux psychiatriques, et non à une structure associative.

2.6.2.Si oui, de quel type ?

Club ou association : 51,6% Groupes d’entraide mutuelle (GEM) : 12,6% Services publics (maisons de quartier…) : 3,8% Rencontres via internet : 8,8% Autre : 23,3%
82 (51,6%) : Club ou association
20 (12,6%) : Groupes d’entraide mutuelle (GEM)
6 (3,8%) : Services publics (maisons de quartier…)
14 (8,8%) : Rencontres via internet
37 (23,3%) : Autre

159 personnes ont répondu à cette question, soit une marge d’erreur importante, seules 94 personnes ayant répondu oui en 2.6.1. De plus, le champ Autre compte une part importante de réponses non-exploitables ou hors-sujet, faussant les statistiques. L’impossibilité de choix multiples a poussé des personnes à préciser dans le champ Autre avoir recours, par exemple, à une association et à un groupe d’entraide mutuelle (GEM).

La mention des rencontres via internet parmi les structures est une erreur de formulation, mais n’explique néanmoins pas le différentiel, qui semble davantage résulter de la mention club ou association  parmi les structures. C’est d’ailleurs, à 51 %, la forme de structure d’aide choisie par la majorité des répondants. Il y a évidemment un biais d’échantillonnage, les répondants ayant été majoritairement recrutés via le forum de l’association Asperansa.

Les groupes d’entraide mutuelle, qui forment la deuxième réponse, n’arrivent que loin derrière à 12,6 %. Parmi les réponses du champ Autre, on trouve mention du SAVS (2 fois), d’un centre médico-psychologique (CMP — 2 fois), de l’IME – institut médico-éducatif (2 fois), d’un MAS/FAM (ces trois derniers cas concernant logiquement les enfants de répondants), et d’un hôpital psychiatrique. Un répondant explique s’être senti insulté par la question.

2.7.Vie amoureuse et familiale

La vie amoureuse et familiale des personnes autistes reste un sujet de publication rare, mais qui a néanmoins inspiré un certain nombre d’ouvrages spécialisés, dont Sexualité et syndrome d’Asperger d’Isabelle Hénault78, probablement l’un des plus diffusés en France. Les publications consacrées à la sexualité des adultes autistes se focalisent souvent sur l’éducation sexuelle à l’adolescence, et n’explorent que rarement les questions d’orientation à l’âge adulte.

Une légende populaire fallacieuse entretient l’idée selon laquelle la vie de couple constituerait un remède à l’autisme79, ce qui n’est évidemment nullement le cas, comme le démontrent les réponses détaillées ici.

2.7.1.Êtes-vous en couple ?

Oui : 36,2% Non, plus maintenant : 23,3% Non, mais j’aimerais bien : 15,5% Non, je ne l’ai jamais été : 25,0%
175 (36,2%) : Oui
113 (23,3%) : Non, plus maintenant
75 (15,5%) : Non, mais j’aimerais bien
121 (25,0%) : Non, je ne l’ai jamais été

484 personnes ont répondu à cette question. Premier constat, les vies de couple sont minoritaires (36,2 %) parmi les répondants, par comparaison aux célibataires, que ces répondants le fussent (23,3 %), le souhaitent (15,5 %) ou n’aient aucune expérience ni désir manifeste de l’être (25 %). Le taux de ruptures, mis en relation avec l’âge moyen des répondants, apparaît élevé.

Le taux de personnes autistes en couple est très nettement inférieur à celui de la population française générale, 32 millions de Français étant en couple sur une population (mineurs inclus) de 63 millions de personnes à la même époque80.

2.7.2.Si oui, votre partenaire est-il / est-elle :

Autiste : 3,2% Non autiste : 56,2% Peut-être, non diagnostiqué(e) : 21,9% Autre : 18,7%
7 (3,2%) : Autiste
123 (56,2%) : Non autiste
48 (21,9%) : Peut-être, non diagnostiqué(e)
41 (18,7%) : Autre

219 personnes ont répondu à cette question, soit une marge d’erreur quantitativement importante par comparaison à la question précédente : un certain nombre de personnes ayant été en couple par le passé ont probablement répondu. La majorité des répondants (56,2 %, ainsi qu’une majorité de réponses du champ autre) sont en couple avec une personne non-autiste. Un peu plus d’un cinquième d’entre eux (21,9 %) ont des doutes quant à un possible diagnostic de leur partenaire. Il est cependant notable que la réception d’un diagnostic pour soi puisse entraîner un biais perceptif poussant à voir, en quelque sorte, des autistes partout. Un autre phénomène, non-exploré, est celui d’un possible sur-diagnostic (ou sur-auto-diagnostic), de femmes ayant vécu en couple avec un(e) autiste, et plus ou moins imité le comportement de leur partenaire.

3,2 % des répondants (7 personnes) sont en couple avec une personne autiste. Cela constitue un taux plus élevé que le nombre théorique de personne autistes dans la population générale (1 %).

Parmi les réponses du champ Autre, des répondants évoquent d’autres profils chez leur partenaire, tels que sadique, TDAH, psychophobe et HPI.

2.7.3.L’autisme est-il, ou a-t-il été un problème dans votre relation ?

Oui, beaucoup : 45,5% Oui, un peu : 36,4% Pas que je sache : 9,0% Non, pas vraiment : 4,1% Non, pas du tout : 4,9%
166 (45,5%) : Oui, beaucoup
133 (36,4%) : Oui, un peu
33 (9,0%) : Pas que je sache
15 (4,1%) : Non, pas vraiment
18 (4,9%) : Non, pas du tout

365 personnes ont répondu à cette question, indiquant là aussi une marge d’erreur. Dans leur très grande majorité, les répondants estiment que l’autisme pose problème dans leur relation de couple, 45,5 % des répondants estimant qu’il s’agit de problèmes majeurs. 36,4 % répondant oui, un peu. Ce sont donc 81,9 % des répondants qui estiment être gênés par l’autisme dans leur relation de couple. Cette réalité est largement attestée dans diverses publications81.

La question mériterait d’être détaillée : l’autisme est souvent réduit aux difficultés d’interactions sociales, ou plus brutalement à un repli pathologique sur soi dans les descriptions courtes82, reflétant quel critère apparaît comme le plus important, ou problématique, pour le monde médical. J’ai souvenance, lors d’un classement d’ouvrages effectué à Bruxelles, d’un livre de référence des années 1990 dont la première phrase introductive débutait à peu près ainsi : L’autisme est une maladie terrible, en ce qu’elle détruit ce que l’être humain a de plus précieux, la capacité à communiquer. Décrire la capacité à communiquer comme la plus précieuse qualité de l’être humain n’est qu’un point de vue subjectif ; l’existence de telles formulations démontre clairement quel aspect de l’autisme est perçu comme le plus pénible par les personnes non-autistes.

Il existe aussi, sur les forums et réseaux sociaux, de nombreux témoignages de parents et de partenaires en attente de gestes d’affection, allant du croisement de regard aux mots doux, en passant par l’acceptation de contacts physiques ; l’absence de ces manifestations d’affection chez les personnes autistes est souvent interprétée comme du désintérêt ou de la volonté d’ignorer, alors que les personnes concernées peuvent être attachées à leur entourage, mais ne pas le montrer de la manière attendue.

L’aspect problématique posé par l’autisme dans les relations affectives semble bilatéral, résidant tant dans la difficulté de la personne autiste à exprimer son affection de la manière attendue, qu’à celle du/de la partenaire à l’interpréter.

2.7.4.Vous vous considérez plutôt comme

Hétérosexuel(le) : 47,1% Bisexuel(le) : 6,8% Homosexuel(le) : 5,2% Asexuel(le) : 8,7% Pansexuel(le) : 3,5% Demisexuel(le) : 9,1% Greysexuel(le) : 8,7% Autre : 11,0%
228 (47,1%) : Hétérosexuel(le)
33 (6,8%) : Bisexuel(le)
25 (5,2%) : Homosexuel(le)
42 (8,7%) : Asexuel(le)
17 (3,5%) : Pansexuel(le)
44 (9,1%) : Demisexuel(le) (nécessite un fort lien émotionnel avant une possible attraction sexuelle)
42 (8,7%) : Greysexuel(le) (rare attirance sexuelle envers son partenaire mais n’empêche pas une relation romantique)
53 (11,0%) : Autre

484 personnes ont répondu à la question de l’orientation sexuelle. Il existe encore peu d’études consacrées, bien qu’un nombre potentiellement élevé d’orientations sexuelles éloignées de la norme ait été souligné, notamment par Fabienne Cazalis. Cela est cohérent avec la résistance des adultes autistes aux normes sociales, telle que l’a soulignée la D r en psychologie sociale Julie Dachez dans sa thèse83.

Dessin de Blequin

Moins de la moitié des répondants se déclarent hétérosexuels. Cependant, la part totale réelle dépasse 50 %, en raison du chevauchement de certaines orientations : la question aurait dû séparer l’orientation de genre (hétérosexuel, bisexuel, homosexuel ou pansexuel) du degré d’attirance sexuelle (demisexuel, greysexuel ou asexuel). Un certain nombre de réponses du champ autre concernent d’ailleurs des associations entre attirance de genre et degré d’attirance sexuelle, telles que bisexuelle et demisexuelle  ou homosexuel et greysexuel.

Dessin de Blequin

La réponse demisexuel(le) (9,5 % en comptant les 2 réponses du champ autre) est la seconde en ordre de fréquence, témoignant aussi de l’importance du vécu émotionnel. Vient ensuite l’asexualité (9,5 % en comptant les 4 réponses du champ autre), notoirement plus fréquente chez les adultes autistes que parmi la population générale, puis l’orientation bisexuelle (6,8 %) ; homosexuelle (5,2 %), et enfin pansexuelle (3,5 %).

Une étude sur 24 hommes autistes a déterminé que l’orientation bisexuelle est fréquente84. Une autre, sur 82 adultes dont 55 femmes et 17 hommes, conclut à une fréquence importante de l’asexualité, et à une orientation hétérosexuelle plus rare chez les femmes, avec notamment des attirances homosexuelles plus fréquentes85. Ces résultat s sur petits échantillons sont assez cohérents avec ceux du présent sondage.

Les réponses du champ autre comportent des refus de réponse en raison de l’aspect potentiellement intrusif et intime de la question, des je ne sais pas, et d’autres commentaires qui ne peuvent être exploités.

Ces réponses méritent d’être mises en lien avec les constats faits en matière d’emploi.

2.7.5.Avez-vous des enfants ?

Oui : 27,7% Non : 72,3%
134 (27,7%) : Oui
350 (72,3%) : Non

484 personnes ont répondu à cette question. La grande majorité des répondants (72,3 %) n’ont pas d’enfants, ce qui marque une nette différence avec le taux de maternité et de paternité dans la population générale.

Des explications possibles peuvent être à creuser dans la faible qualité de vie (ressources, emploi), n’incitant pas à fonder une famille.

2.7.6.Si non,voulez-vous en avoir ?

Oui : 32,1% Non : 67,9%
100 (32,1%) : Oui
212 (67,9%) : Non

312 personnes ont répondu à cette question. Il y a une marge d’erreur conséquente, 350 personnes ayant déclaré ne pas avoir d’enfants à la question précédente. Le désir d’enfants apparaît peu fréquent, puisque moins d’un tiers des répondants l’expriment.

2.7.7.Dans les deux cas (de la question 2.7.6), pourquoi ?

280 personnes ont répondu à cette question ouverte, une trentaine de répondants à la question précédente n’ayant donc pas fourni de réponse à celle-ci.

La grande majorité des répondants s’expriment concernant leur choix de ne pas avoir d’enfants. Des émotions de peur sont fréquentes : c’est inconcevable, ça me terrorise ; les bébés me terrifient, ou encore peur de reproduire des maltraitances, parfois en raison d’une enfance chaotique. De nombreux répondants ont le sentiment d’avoir trop de difficultés à gérer leur propre vie pour accepter la responsabilité d’un enfant. Le temps et les responsabilités induites par l’éducation d’un enfant sont évoqués, de même que la peur de vivre une grossesse et un accouchement. Des répondants estiment que l’avenir est trop incertain pour mettre des enfants au monde, ou encore que la planète est surpeuplée, réponse dont la fréquence apparaît élevée (au moins une dizaine de fois). Quelques réponses font appel à l’humour : C’est plus difficile à entretenir qu’une orchidée et ça ne reste pas en pot. Certains répondants rappellent que l’absence de désir d’enfant découle de leur asexualité ou de l’absence de volonté de vie en couple, parfois en des termes cinglants : pas envie de devoir me coltiner une relation avec un homme sexiste, intolérant….

Des particularités sensorielles sont citées, évoquant un problème avec les pleurs des bébés, leur odeur (ça fait du bruit et ça sent mauvais), ou encore la fatigue qu’ils génèrent.

La peur d’avoir des enfants eux-mêmes autistes, ou avec des pathologies, est citée au moins six fois, celle d’avoir des enfants qui ne soient ni autistes ni zèbres l’est une fois. Un répondant estime : je ne pense pas que ce soit souhaitable pour un enfant d’être élevé par un parent autiste. Ces faits découlent sans doute largement du manque d’auto-estime déjà constaté dans la section relative au permis de conduire.

Les réponses concernant le désir d’enfants, plus rares, sont aussi moins détaillées, plusieurs répondants expliquant dans quelles circonstances leurs enfants ont été conçus, leur volonté de fonder une famille, le fait d’avoir répondu au désir de l’autre membre du couple, la volonté de transmettre leurs gènes (deux fois), ou encore une peur de regretter de ne pas avoir tenté l’expérience de la maternité ou de la paternité.

Dessin de Blequin

Quelques personnes répondent plus factuellement être trop âgées (ménopause notamment) pour avoir des enfants.

2.8.Formation

Le sujet le plus abordé en matière d’autisme en France depuis une bonne dizaine d’années est indéniablement celui de la scolarisation86, en particulier des jeunes enfants. Les associations de familles en ont fait leur fer de lance, sur fond de condamnations régulières de la France par le Conseil de l’Europe, pour défaut d’accès aux droits fondamentaux.

En raison de la focalisation sur l’enfance, la scolarisation en collège, en lycée, et dans l’enseignement supérieur, reste moins abordée dans l’espace public que celle à l’école maternelle ou primaire.

2.8.1.Êtes-vous actuellement en poursuite ou en reprise d’études ?

Oui : 28,6% Non : 71,4%
137 (28,6%) : Oui
342 (71,4%) : Non

479 personnes ont répondu à cette question. Parmi elles,137, soit 28,6 %, ont le statut d’étudiant. Cela reflète la moyenne d’âge assez jeune des répondants.

2.8.2.Choisissez le dernier cursus fréquenté ou celui en cours

Lycée général : 7,3% Lycée professionnel ou technologique : 6,5% BTS : 6,3% CAP : 3,8% Prépa : 0,8% IUT : 2,9% Licence : 19,2% Master : 20,9% Doctorat : 5,9% Primaire : 0,6% Collège : 1,7% Autre : 24,1%
35 (7,3%) : Lycée général
31 (6,5%) : Lycée professionnel ou technologique
30 (6,3%) : BTS
18 (3,8%) : CAP
4 (0,8%) : Prépa
14 (2,9%) : IUT
92 (19,2%) : Licence
100 (20,9%) : Master
28 (5,9%) : Doctorat
3 (0,6%) : Primaire
8 (1,7%) : Collège
115 (24,1%) : Autre

478 personnes ont répondu à cette question. Le dernier niveau d’études fréquenté est diversifié, varié, globalement un peu plus élevé que celui de la population générale, avec principalement des niveaux licence (19,2 %) et master (20,9 %).

Les réponses du champ autre confirment cette diversité de cursus, et par là, la nécessité de permettre une accessibilité des personnes autistes à tous types de filières d’études.

Cela permet aussi de contredire une croyance relativement répandue dans les médias, selon laquelle les personnes diagnostiquées Asperger ou de haut niveau poursuivraient toujours leur cursus jusqu’à un niveau d‘études très élevé. Les personnes qui se sont arrêtées en primaire ont vraisemblablement subi une déscolarisation, phénomène également mentionné parmi les réponses du champ autre.

2.8.3.Quel est le diplôme le plus élevé que vous ayez obtenu ?

Baccalauréat : 27,2% CAP : 4,7% BEP : 4,0% DUT/BTS : 9,1% Licence : 17,9% Master : 18,1% Doctorat : 4,5% Diplôme Grande École : 6,8% Diplôme National du Brevet : 1,9% Aucun : 5,7%
128 (27,2%) : Baccalauréat
22 (4,7%) : CAP
19 (4,0%) : BEP
43 (9,1%) : DUT/BTS
84 (17,9%) : Licence
85 (18,1%) : Master
21 (4,5%) : Doctorat
32 (6,8%) : Diplôme Grande École
9 (1,9%) : Diplôme National du Brevet
27 (5,7%) : Aucun

470 personnes ont répondu à cette question. Là aussi, les niveaux de diplôme sont diversifiés, globalement un peu plus élevés que parmi la population générale. Cela peut découler du mode de recrutement des répondants. Ces résultats restent cohérents avec le niveau de diplôme déterminé dans le cadre de l’enquête de la Fondation Malakoff-Médéric handicap, en 2015, laquelle avait conclu à des niveaux de diplômes relativement comparables à ceux de la population générale, avec quelques cas de personnes surdiplômées parmi les 99 personnes interrogées87. Elle soulignait aussi une tendance fréquente à abandonner les filières d’études pour devenir autodidactes, en raison d’une inadéquation entre les attentes et l’expérience de l’étudiant.

Par comparaison, le nombre de personnes titulaires d’un doctorat dans la population générale se situe autour de 1 %, pour 4,5 % chez les répondants. Les niveaux master sont de 15 % en population générale contre 18,1 % ici, et les niveaux licence de 10 % en général, contre 17,9 % parmi les répondants88.

Le diplôme le plus fréquemment mentionné est, néanmoins, le baccalauréat (27,2 %).

2.8.4.Avez-vous rencontré des difficultés au cours de votre scolarité ?

Pas du tout : 0,8% Pas tellement : 6,5% Un peu : 28,2% Beaucoup : 64,5%
4 (0,8%) : Pas du tout
31 (6,5%) : Pas tellement
134 (28,2%) : Un peu
307 (64,5%) : Beaucoup

Dessin de Blequin

476 personnes ont répondu à cette question. La mention de difficultés recouvre une très nette majorité, 64,50 % des répondants en déclarant beaucoup, et 28,15 % un peu. Au total, 92,65 % déclarent que leur scolarité fut difficile. L’absence de difficultés n’est mentionnée que par une extrême minorité, soit 0,84 % des répondants (4 personnes).

2.8.5.Si oui, quels types de difficultés ?

100 200 300 400 Stress Communication Contact avec les autres Mauvaise intégration Prise de notes Problèmes d’organisation Compréhension des consignes Désintérêt pour certaines matières Décrochage scolaire Autre
368 (79,0%) : Stress
335 (71,9%) : Communication
377 (80,9%) : Contact avec les autres
333 (71,5%) : Mauvaise intégration
159 (34,1%) : Prise de notes
224 (48,1%) : Problèmes d’organisation
223 (47,9%) : Compréhension des consignes
289 (62,0%) : Désintérêt pour certaines matières
155 (33,3%) : Décrochage scolaire
105 (22,5%) : Autre

466 personnes ont répondu à cette question à choix multiples. La première difficulté évoquée est le contact avec les autres (80,9%), suivie de près par le stress (79 %). Il est vraisemblable que la mention du contact avec les autres, de même que celle de la mauvaise intégration (71,5%) recouvre de nombreux cas de harcèlement : une étude américaine menée à l’université de l’Indiana a montré que 63 % des élèves ayant déclaré être harcelés ont un TSA89. Par ailleurs, une enquête auprès de 920 parents d’adolescents américains avec TSA, publiée en 2012, montre que 46 % d’entre eux témoignent de faits de harcèlement90. Le taux de scolarisation honteusement bas en France ne permet évidemment pas de mener ce type d’études…

Dessin de Blequin

Le harcèlement est très clairement la première réponse en termes de fréquence dans le champ autre (24 mentions), 25 avec la mention d’un bizutage, soit 5,37 % du total des réponses.

Quelques répondants font mention de violences physiques. Les mentions de souffrances à l’école sont parfois détaillées en des termes forts : J’aurais du arrêter l’école bien plus tôt. Cela a été un enfer de A à Z pour moi sous tous les aspects […]. Il est logique que ces violences physiques concernent essentiellement les hommes autistes.

Les problèmes intrinsèques à l’enseignement (décrochage scolaire, prise de note, désintérêt pour certaines matières, compréhension des consignes et difficultés d’organisation) sont mentionnés beaucoup moins souvent que ceux liés à la sociabilisation, au contact avec autrui et à la communication. Le stress, souvent mentionné, peut avoir différentes origines : harcèlement ou peur du harcèlement, surcharges sensorielles, imprévus…

La mention assez haute (62 %) du désintérêt pour certaines matières est notable. Une hypothèse serait que ce désintérêt soit un corollaire des intérêts spécifiques. Cela étant, les élèves dans leur ensemble montrent rarement de l’intérêt pour l’enseignement en tant que tel, et il est notoirement difficile de capter leur attention. Il ne semble pas exister de statistiques comparatives en la matière.

Il est possible que les résultats de cette section et de celle qui précède soient instrumentalisés dans le futur pour justifier la déscolarisation des personnes autistes, ou bien leur maintien dans des lieux de soin uniquement, comme l’a montré une récente affaire de fermeture d’une école primaire communale le 22 mai 2018, pour protester contre la présence de deux élèves avec AVS dans cet établissement91. Il est essentiel de rappeler que dans leur majorité, les répondants n’ont ni bénéficié d’une assistante de vie scolaire, ni eu connaissance de leur condition d’autiste durant leur scolarisation, comme nous le verrons plus loin.

2.8.6.Avez-vous bénéficié d’aménagements pendant vos études ?

Dessin de Blequin

Oui : 20,8% Non : 79,2%
99 (20,8%) : Oui
377 (79,2%) : Non

476 personnes ont répondu à cette question. La grande majorité (79,2 %) n’ont pas bénéficié d’aménagements pour leurs études.

2.8.7.Si oui, lesquels ?

20 40 60 80 AVS Tiers temps École spécialisée Classes à petits effectifs Dispense d’assiduité Autre
37 (34,9%) : AVS (Auxiliaire de Vie Scolaire)
69 (65,1%) : Tiers temps
9 (8,5%) : École spécialisée
13 (12,3%) : Classes à petits effectifs
20 (18,9%) : Dispense d’assiduité
33 (31,1%) : Autre

106 personnes ont répondu à cette question, soit 7 de plus par comparaison au champ non de la question précédente. Le tiers temps, allongement d’un tiers du temps accordé pour passer un examen ou une évaluation, constitue l’aménagement le plus fréquent (65,1%).

Seconde réponse en ordre de fréquence, l’attribution d’une assistante de vie scolaire (AVS), théoriquement obligatoire pour tous les élèves autistes ayant des difficultés en classe. Ramené au total des répondants à la question 2.8.6, 7,77 % des répondants ont bénéficié d’une AVS. La troisième réponse en termes de fréquence est la dispense d’assiduité (18,9%). Par ailleurs, 12,3 % des répondants à la présente question ont fréquenté des classes à petits effectifs, et 8,5 % ont fréquenté une école spécialisée dans l’accueil d’enfants ou adolescents autistes.

Les réponses du champ autre sont variées. Elles fournissent de très intéressants compléments, témoignant d’une certaine souplesse et inventivité des enseignants et, plus globalement, de l’éducation nationale, pour permettre d’accueillir les élèves autistes. Plusieurs répondants ont bénéficié de la mise à disposition d’une salle isolée et d’un ordinateur pour passer leurs examens, ou prendre leurs notes. La possibilité de suppression des oraux est mentionnée. La dispense d’éducation physique est signalée au moins deux fois, notamment en raison de la dyspraxie. La sensibilisation de la classe en début d’année est citée au moins une fois, permettant sans doute une diminution notable des cas de harcèlement. Est également citée l’autorisation de porter un casque anti-bruits durant le cours. Ces champs de réponse permettent de mettre en évidence une liste d’aménagements qui facilitent la vie des étudiants autistes :

2.8.8.Si non, pourquoi ?

50 100 150 200 250 300 350 Je ne savais pas que j’y avais droit Le diagnostic n’était pas établi C’était jugé inutile par le corps enseignant C’était impossible financièrement J’ai du mal avec les procédures administratives
76 (21,2%) : Je ne savais pas que j’y avais droit
326 (91,1%) : Le diagnostic n’était pas établi
41 (11,5%) : C’était jugé inutile par le corps enseignant
15 (4,2%) : C’était impossible financièrement
47 (13,1%) : J’ai du mal avec les procédures administratives

Dessin de Blequin

358 personnes ont répondu à cette question à choix multiples, soit un peu moins que les 377 répondants non à la question 2.8.6. Une immense majorité de répondants (91,1 %) précise l’absence de diagnostic comme étant le principal motif d’absence d’aménagement, renforçant le constat d’une difficulté d’accès au diagnostic, fait en section 2.1. Les générations d’adultes autistes nées avant les années 2000 (année d’inclusion du syndrome d’Asperger à la classification française) ont vraisemblablement beaucoup souffert de la nécessité de s’adapter au système scolaire français, particulièrement en termes de harcèlement par les autres élèves.

Deuxième motif avancé, mais beaucoup moins fréquent : l’ignorance du droit aux adaptations (21,2 %). 11,5 % des répondants se sont vus apposer un refus par le corps enseignant. 13,1 % évoquent leurs difficultés à gérer des procédures administratives, ce qui rejoint le constat fait à la question 2.4.2. Quelques personnes (4,2 %) soulignent un coût financier trop élevé.

2.8.9.Avez-vous eu votre diagnostic :

Avant la scolarité : 4,4% Pendant la scolarité : 15,2% Après la scolarité : 39,3% La procédure est en cours : 41,0%
21 (4,4%) : Avant la scolarité
72 (15,2%) : Pendant la scolarité
186 (39,3%) : Après la scolarité
194 (41,0%) : La procédure est en cours

Dessin de Blequin

473 personnes ont répondu à cette question. Les cas de diagnostics obtenus avant (4,4 %) ou pendant (15,2 %) la scolarité (total 19,6 %) sont nettement minoritaires par comparaison aux diagnostics en cours (41 %) ou après (39,3 %) la scolarité (total 80,3 %). Si des effets de génération sont évidemment à prendre en compte, ce constat ne peut qu’appuyer la nécessité d’une sensibilisation accrue auprès des établissements scolaires français. Certains comportements tels que le harcèlement d’un(e) élève n’ayant pas ou très peu d’amis, et des réactions à l’éclairage et aux bruits, devraient constituer autant d’indices d’alerte permettant d’orienter les parents de l’élève concerné vers une procédure de diagnostic.

2.9.Emploi

Si plusieurs études ont souligné que les personnes autistes (à tous degrés de handicap) sont en majorité capables d’avoir un emploi, et détiennent des compétences précieuses pour le marché du travail92, la réalité, dans les pays occidentaux qui ont mené ce type d’étude, est celle d’un taux de chômage parmi les plus élevés tous handicaps confondus. La question de l’emploi émerge dans les débats français, beaucoup plus tardivement en particulier que dans les pays anglophones93, après de longues années d’inertie ou d’ignorance. Les adultes autistes ayant été, dans leur ensemble, tenus pour incapables de travailler, un nombre important de professionnels de santé continuent de juger l’exercice d’un emploi et le diagnostic de TSA comme incompatibles.

Les adultes autistes exclus de leur domaine d’intérêt et gérés par le Pôle emploi sont fréquemment renvoyés vers des postes que personne ne souhaite occuper (type petits métiers de vente et d’usinage, d’entretien, etc)94, ce qui se traduit pour eux par de faibles ressources (voir section 2.3) et, probablement, par des états dépressifs.

Les premiers contenus écrits relatifs au sujet ont été rédigés par des adultes autistes voilà une dizaine d’années95.

Dessin de Blequin

En septembre 2015, la fondation Malakoff-Médéric handicap a mené, à notre connaissance, la première étude statistique consacrée à l’accès à l’emploi des personnes autistes diagnostiquées Asperger ou de haut niveau, sur la base des réponses de 99 personnes. Cette étude sera abondamment citée dans le présent chapitre. Sa conclusion, implacable, reste largement d’actualité :

L’emploi des personnes porteuses d’un handicap cognitif […] est jusqu’à présent focalisé sur des activités particulièrement peu reconnues, répétitives, avec un potentiel économique faible, et sans perspective d’évolution personnelle ou professionnelle. Souvent, le choix de l’activité en question est le fait de l’institution et non pas des envies de la personne, encore moins des besoins de l’économie en général. Les effets délétères à long terme en sont connus : démotivation, nécessité de lourdes subventions et de dérogations au droit du travail pour maintenir l’activité à flot, impossibilité de s’épanouir sur le plan personnel

Rapport de la fondation Malakoff Médéric handicap96

En 2014, l’association Autisme Europe a publié un document en français intitulé Autisme et travail : ensemble c’est possible97 ; lui aussi sera largement cité dans le présent chapitre, de même que le rapport de la CNSA paru en mai 2016 98.

En février 2017, lorsque Josef Schovanec remet le premier rapport français consacré à l’emploi des adultes autistes, il précise qu’en France, le chantier de l’emploi des personnes autistes n’en est de toute évidence qu’à ses premiers balbutiements99.

2.9.1.Avez-vous eu un emploi pendant les six derniers mois ou êtes-vous actuellement employé(e) ?

Oui : 49,0% Non : 51,0%
224 (49,0%) : Oui
233 (51,0%) : Non

457 personnes ont répondu à cette question. Une courte majorité des répondants (51 %) ne sont pas en emploi, et ne l’ont pas été au cours des six mois précédant la réponse. 224 répondants (49 %) sont en emploi, ou l’ont été au cours des six derniers mois.

Dessin de Blequin

Ces statistiques sont meilleures que celles des personnes TSA au global, que l’association Autisme Europe estimait être 76 à 90 % à expérimenter le chômage à l’échelle européenne en 2014100. Elles restent bien évidemment très en-deçà des statistiques nationales du chômage à la même période, avec un taux de 8,6 % pour le 4e trimestre de 2017.

2.9.2.Si oui, quel type de contrat ?

20 40 60 80 100 120 CDI CDD Temps partiel Temps complet Alternance Formation rémunérée Contrat aidé Non-salarié Autre
112 (47,7%) : CDI
52 (22,1%) : CDD
39 (16,6%) : Temps partiel
19 (8,1%) : Temps complet
2 (0,9%) : Alternance
4 (1,7%) : Formation rémunérée
6 (2,6%) : Contrat aidé
8 (3,4%) : Non-salarié
60 (25,5%) : Autre

235 personnes ont répondu à cette question, ce qui inclut 11 répondants supplémentaires par comparaison à la question précédente. L’absence de choix multiples pose le même problème que lors de la question de l’orientation sexuelle : les réponses possibles ne devraient pas être exclusives, et laisser la possibilité de répondre séparément concernant le temps de travail (partiel ou complet) et le type de contrat (CDI, CDD, alternance, etc.). Il est, de ce fait, difficile d’analyser les réponses fournies.

Le contrat le plus fréquent est le CDI (contrat à durée indéterminée), qui concerne 47,7 % des répondants. Le second en termes de fréquence est le CDD, avec 22,1 % de personnes concernées. Même en prenant en compte une perte de réponses en raison de la présence des champs Temps partiel et temps complet, ces taux montrent une nette différence avec les types de contrats de travail établis parmi la population française générale : les CDI représentent environ 85 % des contrats en cours101. Il apparaît que la population autiste française, dans l’ensemble, a plus souvent des contrats de travail précaires, et rencontre des difficultés pour accéder à un CDI.

Les réponses du champ Autre comportent un certain nombre d’erreurs et de protestations contre le monde de l’emploi, mais aussi des mentions du statut de fonctionnaire (cité 9 fois ; 3,83 %), de travailleur indépendant ou micro/auto-entrepreneur (réponses qui entrent dans le champ non-salarié, cité 10 fois en comptant les mentions à mon compte, à ajouter au champ non-salarié), de vacations, d’intérim, et de métiers difficiles à classer tels que ceux de l’illustration et de la rédaction.

2.9.3.Si oui, quel type d’emploi ?

Ouvrier : 8,5% Employé : 48,4% Cadre : 35,4% Technicien : 7,6%
19 (8,5%) : Ouvrier
108 (48,4%) : Employé
79 (35,4%) : Cadre
17 (7,6%) : Technicien

223 personnes ont répondu à cette question, ce qui montre une perte de répondants par comparaison aux deux questions précédentes. Il est vraisemblable que ces absences de réponses découlent du fait que des répondants potentiels ne se reconnaissent pas dans les possibilités de réponse (indépendants notamment).

La plupart des répondants (48,4 %) sont sous statut d’employé, ce qui semble assez cohérent avec les statistiques INSEE établies pour la France entière (28 %, avec une section professions intermédiaire à 25 %, qui n’existe pas dans le présent sondage102. Le nombre de professions d’ouvrier est nettement plus bas parmi les répondants (8,5 %) que pour la France entière (20 %) selon ces mêmes statistiques, reflétant probablement un biais d’échantillonnage (recrutement sur forum) plutôt qu’une moindre présence de personnes autistes parmi ce type de professions. La réponse technicien (7,6 %) est difficile à analyser, en ce qu’elle n’existe pas dans les statistiques INSEE.

Le nombre de cadres apparaît élevé (35,4 %, contre 18 % selon l’INSEE pour la France entière). L’influence du biais d’échantillonnage joue là aussi certainement un rôle, mais mis en relation avec le niveau de diplôme, ce taux indique aussi que les adultes autistes ayant suivi une formation jusqu’à son terme, et étant parvenus à se maintenir dans l’emploi, sont le plus souvent en capacité de travailler sur des postes de cadre en cohérence avec leur niveau de formation.

2.9.4.Dans quel type d’établissement était-ce/est-ce ?

Entreprise adaptée : 0,8% ESAT : 2,5% Secteur privé : 37,0% Fonction publique : 36,6% Auto-entrepreneur ou travailleur indépendant : 10,7% Autre : 12,3%
2 (0,8%) : Entreprise adaptée
6 (2,5%) : ESAT
90 (37,0%) : Secteur privé
89 (36,6%) : Fonction publique
26 (10,7%) : Auto-entrepreneur ou travailleur indépendant
30 (12,3%) : Autre

243 personnes ont répondu à cette question. Une courte majorité (37 %) déclarent relever du secteur privé, la fonction publique étant mentionnée dans 36,6 % des cas.

L’attrait des adultes autistes pour la fonction publique est notable, en ce que les statistique INSEE pour la France entière, aussi bien en 2014 que fin 2017, montrent que la part des emplois de fonctionnaire en France représente environ 20 % de l’emploi total, contre environ 75 % de postes dans le secteur privé103. Ce résultat est cohérent, à la fois avec les statistiques de l’étude de la fondation Malakoff-Médéric handicap, et avec la contribution effectuée par Florian Forestier, Dr en philosophie et membre du Think-Tank LePlusImportant, en matière d’emploi public et d’autisme. Cette note souligne de nombreuses raisons pour lesquelles l’emploi public attire les autistes, notamment la sécurité d’emploi (pour une population largement à risque de perdre un poste en raison de mauvaises relations), l’importance mise sur le diplôme et les concours d’entrée plutôt que sur des entretiens d’embauche ou le contenu du CV, mais aussi une aspiration à remplir des missions de service public104. Par extension, il est intriguant que cette aspiration pour le service public rejoigne en partie la conclusion d’une étude d’archéologie de l’université de Cambridge, concluant que les personnes autistes ont probablement été intégrées aux communautés humaines préhistoriques en raison de l’avantage sélectif apporté par leurs compétences d’ingénierie et de technique, profitant à l’ensemble du groupe105.

Le faible nombre de déclarations de postes dans le secteur privé (37 %) par comparaison aux statistiques INSEE semble cohérent avec le constat d’une lourde discrimination subie par la population autiste française à l’embauche et à l’emploi, notamment en raison de l’accent mis sur le savoir-être et sur les émotions, plutôt que sur le diplôme ou le savoir-faire106. Une autre piste pourrait être l’inadaptation fondamentale des gens autistes aux métiers impliquant par exemple du commerce, représentant une part importante des emplois dans le secteur privé.

Les autres réponses sont plus rares. La part d’auto-entrepreneurs / micro-entrepreneurs ou de travailleurs indépendants (10,7 %) semble un peu plus élevée que dans la population française générale (1,1 million de micro-entrepreneurs environ, avec de grosses fluctuations d’une année sur l’autre)107. Il est vraisemblable que cela découle de la discrimination à l’embauche et des difficultés au maintien dans l’emploi, poussant un certain nombre d’adultes autistes à tenter d’organiser leur propre activité.

La part d’emplois en ESAT (2,5 %) ou en entreprise adaptée (0,8 %) est très faible.

Parmi les réponses du champ Autre figure une nette prédominance d’activités associatives rémunérées, une activité en GIP – groupement d’intérêt public, un emploi d’artisan-commerçant dans le cercle familial, des emplois dans des secteurs très spécifique (édition…), et des mentions ne précisant pas le type d’établissement (télétravail).

2.9.5.Êtes-vous actuellement en recherche d’emploi ?

Oui : 30,0% Non : 70,0%
137 (30,0%) : Oui
320 (70,0%) : Non

457 personnes ont répondu à cette question. 70 % ne sont pas en recherche d’emploi, ce qui inclut aussi la part quantitativement importante d’étudiants parmi les répondants. 30 % déclarent être en recherche d’emploi, ce qui constitue un taux de recherche d’emploi actif très nettement supérieur à celui de la population française générale108, indicateur d’une forte discrimination à l’embauche, et de difficultés de maintien dans l’emploi.

2.9.6.Bénéficiez-vous vous avez-vous bénéficié d’un suivi (avant, après, ou pendant votre diagnostic) ?

Oui : 24,3% Non : 43,3% Non, mais j’aimerais bien/aurais aimé : 32,4%
111 (24,3%) : Oui
198 (43,3%) : Non
148 (32,4%) : Non, mais j’aimerais bien/aurais aimé

457 personnes ont répondu à cette question. La grande majorité des répondants n’ont jamais bénéficié d’un suivi (43,3 %, + 32,39 % qui l’auraient souhaité, quel que soit leur statut diagnostique, avant, pendant ou après). Seuls un peu moins d’un quart (24,29 %) ont connu un tel suivi.

2.9.7.Si oui, quel type de suivi ?

20 40 60 80 100 Pôle Emploi Cap Emploi Agence d’intérim Association ou professionnel spécialisé dans l’autisme Association d’usagers
53 (33,8%) : Pôle Emploi
36 (22,9%) : Cap Emploi
5 (3,2%) : Agence d’intérim
98 (62,4%) : Association ou professionnel spécialisé dans l’autisme
12 (7,6%) : Association d’usagers

157 personnes ont répondu à cette question à choix multiples, ce qui indique un net supplément de réponses par comparaison aux déclarations oui à la question précédente. Il est probable que ces réponses recouvrent le recours à des associations d’usagers et à des associations ou professionnels spécialistes de l’autisme.

La majorité des répondants ont en effet eu recours à une association ou à un professionnel de l’autisme (62,4 %). La seconde réponse en termes de fréquence est le Pôle Emploi (33,8%), suivie par le Cap Emploi (22,9 %). La mention des associations d’usagers est rare (7,6 %), et le recours aux agences d’intérim, davantage (3,2 %).

2.9.8.Si non, pourquoi ?

20 40 60 80 100 120 Je ne pense/pensais pas en avoir besoin Je n’en ai/avais pas envie J’ai du mal avec les procédures administratives C’est trop contraignant Ça ne me correspond pas
76 (32,6%) : Je ne pense/pensais pas en avoir besoin
42 (18,0%) : Je n’en ai/avais pas envie
120 (51,5%) : J’ai du mal avec les procédures administratives
67 (28,8%) : C’est trop contraignant
92 (39,5%) : Ça ne me correspond pas

233 personnes ont répondu à cette question à choix multiples. Sans surprises et en parfaite cohérence avec la question 2.4.2, la difficulté avec les procédures administratives constitue le premier frein rencontré (51,5%).

En seconde position, 39,5 % des répondants estiment que le recours à ce type de suivi ne leur correspond pas. Les raisons ne sont pas détaillées dans le présent questionnaire, mais les accompagnements tous handicaps, ou le suivi par des centres médico-sociaux, peuvent être vécus comme particulièrement infantilisants et/ou misérabilistes dans leur approche. La discrimination à l’embauche et au travail est souvent minimisée, et dans les organismes d’accompagnement à l’emploi (Pôle Emploi), et dans le discours public et médiatique, tendant à blâmer le chômeur pour sa prétendue volonté de fainéantise, à mettre l’accent sur la faiblesse et/ou la déficience des personnes autistes (et plus largement des personnes en situation de handicap) plutôt qu’à questionner les employeurs potentiels au sujet de l’absence d’adaptation des postes au profil des personnes autistes, et à favoriser de telles adaptations. Un autre exemple fréquemment constaté lors de cas individuels, et restant à étudier, est l’ inadéquation entre le type de poste proposé et les compétences de la personne. Pour ne citer que trois cas individuels : un poste en nettoyage de poulailler intensif fut proposé à une femme Dr en linguistique et ingénieur agronome, ayant une RQTH, par son Pôle Emploi de référence, et accepté afin d’éviter la perte d’allocations de chômage ; un poste d’éboueur fut proposé, sinon imposé, à un jeune homme autiste diagnostiqué, inéligible au RSA et titulaire d’un BTS de paysagiste ; un poste d’emballage de viande en abattoir me fut proposé alors que j’étais déjà en poste comme assistante de recherches en télétravail avec le Québec, sous la direction du P r Laurent Mottron.

La troisième réponse en termes de fréquence (32,6 %), Je ne pense/pensais pas en avoir besoin, peut découler du constat précédent. Josef Schovanec a noté, dans son rapport au sujet de l’emploi, que l’autisme est souvent vu, dans les structures tous handicap, comme n’en étant pas véritablement un, ou comme constituant une extension erronée de la notion de handicap109.

La notion de contrainte est évoquée en quatrième ordre de fréquence des réponses (28,8 %). Á ce titre, il semble nécessaire de rappeler, comme constaté en 2.3.1, que 17,4 % des répondants sont soit suivis par la CAF pour leur versement de RSA, soit en suivi chômage par leur Pôle Emploi de référence. Ces deux types de suivi ont un point commun : la menace de coupure des aides versées en cas de refus de deux ou trois postes à la suite, fussent-ils inadaptés au profil de la personne. Il ne s’agit pas de la seule forme de contrainte induite par ce type de suivi : les rendez-vous obligatoires sont généralement notifiés par courrier quelques jours à une semaine avant la date, et toute demande de modification induit l’utilisation du téléphone, le personnel ne donnant que rarement une adresse mail professionnelle aux personnes suivies. Les rendez-vous de suivi, impliquant des contacts avec des personnes inconnues, peuvent être vécus comme particulièrement stressants, voire aggraver le cas de la personne en cas d’ignorance de ce qu’est l’autisme, par exemple si une réponse est perçue comme une manifestation de pédantisme, ne respecte pas la hiérarchie induite, ou est analysée comme volonté de fainéanter.

L’absence d’envie est évoquée par 18 % des répondants, cette absence d’envie pouvant également découler des constats ci-dessus.

2.9.9.Bénéficiez-vous de la RQTH ?

Oui, je l’ai : 29,2% Je l’ai demandée : 10,7% Elle m’a été refusée : 1,3% Je ne l’ai pas demandée : 58,8%
133 (29,2%) : Oui, je l’ai
49 (10,7%) : Je l’ai demandée
6 (1,3%) : Elle m’a été refusée
268 (58,8%) : Je ne l’ai pas demandée

456 personnes ont répondu à cette question, ce qui inclut des répondants diagnostiqués et non-diagnostiqués. La majorité (58,8 %) n’ont jamais demandé de RQTH. En seconde réponse, 29,17 % des répondants en disposent. 10,75 % sont en cours de demande, 1,32 % se la sont vue refuser.

Les raisons de la fréquente absence de demande sont sans doutes multifactorielles, découlant en particulier des problèmes de gestion administrative, mais aussi d’une méconnaissance de ce droit, en particulier de l’ignorance du rattachement officiel de l’autisme au domaine du handicap.

2.9.10.Avez-vous demandé une orientation vers un centre spécialisé ?

Oui, je l’ai eue : 4,2% Oui, mais j’ai été refusé(e) : 1,8% Oui, la demande est en cours : 5,5% Oui, j’ai été en centre : 0,9% Non, je ne sais pas ce que c’est : 47,7% Non, ça ne m’intéresse pas : 40,0%
19 (4,2%) : Oui, je l’ai eue
8 (1,8%) : Oui, mais j’ai été refusé(e)
25 (5,5%) : Oui, la demande est en cours
4 (0,9%) : Oui, j’ai été en centre
218 (47,7%) : Non, je ne sais pas ce que c’est
183 (40,0%) : Non, ça ne m’intéresse pas

457 personnes ont répondu à cette question. La plupart des répondants (47,7%) ignorent quel est l’objet désigné par l’expression centre spécialisé, une requête en français sur un moteur de recherche amenant des réponses variées à la saisie centre spécialisé autisme, incluant (pour les adultes) des foyers d’accueil médicalisés (FAM) constituant des lieux de vie concentrationnaires et isolés à plein temps, des centres d’aide par le travail (CAT) et Établissements et Services d’Aide par le Travail (ESAT) ne concernant que l’activité professionnelle, les CRA (concernant l’accès au diagnostic), ou encore des associations spécialisées autisme. Cette diversité de réponses à la requête centre spécialisé autisme, concernant des établissements différents dans leurs objectifs, a certainement créé de la confusion : la question concerne manifestement les centres spécialisés dans les activités professionnelles, mais il est peu probable qu’elle ait été comprise dans ce sens.

Seconde réponse en ordre de fréquence, 40% des répondants déclarent ne pas être intéressés par ces centres spécialisés. Ce constat est logique, la vie en liberté, en milieu dit ordinaire étant, bien que rendue difficile, notoirement plus enviable et enviée que celle dans tout type de lieu d’accueil fermé et spécialisé, notamment en raison des violations de droits humains qui y sont régulièrement constatés. Mme la Rapporteuse des droits auprès de l’ONU, Catalina Devandas-Aguilar, a à ce titre rappelé fin 2017, qu’il n’y a pas de bons établissements110.

5,5 % de répondants font état d’une demande en cours. 4,16 % ont obtenu une telle demande, 1,75 % se la sont vue refuser, enfin 0,9 % des répondants ont par le passé fréquenté un centre spécialisé.

2.9.11.Un médecin du travail vous a-t-il prescrit des aménagements pour votre emploi ?

Oui : 8,1% Non : 91,9%
37 (8,1%) : Oui
418 (91,9%) : Non

455 personnes ont répondu à cette question, ce qui inclut un nombre conséquent de répondants dont la situation personnelle ne permet pas de demander des aménagements par la médecine du travail. Il est donc logique que le différentiel résulte des réponses de personnes ayant eu un emploi par le passé, qu’elles soient diagnostiquées ou non.

Une écrasante majorité (91,9 %) de répondants n’ont jamais eu droit à des aménagements durant l’emploi. Josef Schovanec avait déjà souligné dans son rapport la rareté de telles adaptations de poste111.

Une explication parfois évoquée112 serait que les demandes d’aménagement portées par la population autiste rejoignent des demandes plus générales : adaptation des horaires de travail, refus des open-spaces,demande à passer en télétravail, réduction du bruit et des lumières vives… Il semble exister une méfiance générale des employeurs vis-à-vis de ces demandes, craignant qu’elles entraînent davantage de demandes d’aménagements spécifiques de la part d’autres catégories de personnes.

2.9.12.Avez-vous rencontré des problèmes concernant votre emploi ?

Oui : 84,9% Non : 15,1%
326 (84,9%) : Oui
58 (15,1%) : Non

384 personnes ont répondu à cette question. Sans surprise, une très nette majorité (84,9 %) de répondants déclarent avoir rencontré des problèmes à l’emploi. Ces résultats sont cohérents avec ceux des sondages similaires, notamment l’enquête Malakoff-Médéric, mais aussi avec les données de la National Autistic Society (NAS) britannique collectées en 2012, 81 % des répondants déclarant avoir avoir subi du harcèlement, des injustices ou un manque de soutien sur leur lieu de travail113.

Cette très haute fréquence des problèmes à l’emploi, au vu de la cohérence des résultats selon une variété de sources, ne saurait être remise en cause.

2.9.13.Si oui,lesquels ?

50 100 150 200 250 300 Entretien d’embauche Stress Intégration au sein d’une équipe de collègues Contact avec les autres Communication Fatigabilité Bruits Lumières Connaissances de consignes Codes sociaux Autre
128 (37,6%) : Entretien d’embauche
263 (77,4%) : Stress
226 (66,5%) : Intégration au sein d’une équipe de collègues
250 (73,5%) : Contact avec les autres
216 (63,5%) : Communication
265 (77,9%) : Fatigabilité
223 (65,6%) : Bruits
141 (41,5%) : Lumières
119 (35,0%) : Connaissances de consignes
271 (79,7%) : Codes sociaux
77 (22,6%) : Autre

340 personnes ont répondu à cette question à choix multiples, ce qui inclut quelques répondants supplémentaires par comparaison à la réponse oui à la question précédente.

En premier lieu, les répondants citent les codes sociaux (79,7 %), suivis de très près par la fatigabilité (77,9 %), le stress (77,4 %) et le contact avec les autres (73,5 %). Ce n’est pas étonnant, de nombreux auteurs (américains notamment) ayant souligné que l’un des défis majeurs posés par les TSA à l’emploi réside dans la gestion des compétences sociales, des amitiés, et des difficultés à deviner les désirs et pensées des autres (théorie de l’esprit). De même, environ 80 % des adultes autistes interrogés pour l’enquête Malakoff-Médéric ont déclaré ne pas se sentir à l’aise dans un groupe114. Les données collectées dans d’autres pays (États-Unis) démontrent que le facteur relationnel constitue, dans tous les cas, un motif majeur de rejet des personnes autistes dans les entreprises115, comme l’a par ailleurs souligné le rapport de la CNSA publié en 2016.

Ce phénomène d’incompréhension des codes sociaux et de difficultés dans le relationnel est bilatérale le blâme ne pouvant en aucun cas retomber uniquement sur les travailleurs autistes. Si les adultes autistes interprètent souvent les intentions de leurs employeurs et collègues de façon erronée, ces derniers mésinterprètent souvent aussi les intentions des travailleurs autistes, par exemple en leur prêtant à tort des intentions égoïstes116, une volonté d’impolitesse, ou une volonté de remise en questions de la hiérarchie. Des situations de stress peuvent découler d’une peur d’être incompris(e) et de perdre son emploi.

La fatigabilité, citée à 77,9 %, peut avoir diverses causes. La cohérence avec l’enquête Malakoff-Médéric est remarquable, puisque 80 % des personnes interrogées ont déclaré expérimenter une fatigabilité plus importante que les personnes non-autistes117. Si la fatigue sensorielle est souvent évoquée dans les médias et publications diverses (lumière, bruits…), celle qui est liée à l’adaptation sociale est régulièrement passée sous silence. La grande majorité des interventions de coaching visent aujourd’hui l’adaptation des travailleurs autistes à l’entreprise bien davantage que l’inverse, mais oublient que les efforts d’adaptation sociale ne seront probablement jamais naturels pour une personne autiste. Il est en ce sens probable que les relations sociales, en particulier dans un groupe nombreux, continuent à générer une fatigue. Permettre aux adultes autistes de travailler avec peu de relations sociales imposées apparaît davantage dans l’intérêt des entreprises concernées plutôt que de forcer les adultes autistes à des efforts d’adaptation permanents.

Pour ce qui concerne les difficultés sensorielles, le bruit est cité plus souvent (65,6 %) que les lumières (41, 5%). La CNSA avait souligné que les facteurs sensoriels puissent constituer un fréquent motif de perte d’emploi. Là aussi, l’autorisation de porter un casque anti-bruits et/ou des lunettes de soleil apparaît rare.

La mention des difficultés à l’entretien d’embauche (37,6 %) apparaît étonnamment peu fréquente par comparaison aux données de l’enquête Malakoff Médéric, qui avait conclu que l’entretien d’embauche apparaît comme une barrière très discriminante pour une personne autiste qui joue mal la comédie sociale attachée à ce rite de passage. Elle échoue aux tests psychologiques dont elle ne déjoue que rarement les pièges118. Il est possible qu’un phénomène de cooptation entre naturellement en compte, facilitant l’insertion des adultes autistes dont la famille bénéficie d’un bon réseau relationnel, bien qu’il soit difficile de le quantifier.

La connaissance des consignes est citée comme problématique par 35 % des répondants.

Parmi les 22,6 % de réponses du champ autre, le harcèlement (moral ou non) revient au moins 9 fois (2,64 %) ; on peut présumer que ce type de cas soit plus fréquent qu’indiqué, en cohérence avec les chiffres de la NAS. Son également indiquée le surmenage / burn-out, des manipulations, humiliations ou malveillances de la part de collègues, des difficultés d’organisation (administrative notamment) et de distraction, de l’ennui au travail, des mises au placard, un manque d’estime de soi, des temps de transport trop longs, une difficulté avec l’utilisation du téléphone, des agressions sexuelles, enfin, d’autres problèmes sensoriels tels que la perception d’odeurs ou une inadaptation à l’open-space.

2.9.14.Souhaiteriez-vous bénéficier d’aménagements dans votre travail ?

(Si oui, choisissez lesquels parmi les items proposés, sinon passez directement à la question 2.10)

50 100 150 200 Coach Aménagement des horaires Passage à un temps partiel Aménagement du poste de travail Organisation du travail Télétravail ou depuis le domicile Assistance pour certaines tâches Autre
95 (30,5%) : Coach
151 (48,6%) : Aménagement des horaires
119 (38,3%) : Passage à un temps partiel
171 (55,0%) : Aménagement du poste de travail (lumières, sons, espace…)
147 (47,3%) : Organisation du travail
140 (45,0%) : Télétravail ou depuis le domicile
86 (27,7%) : Assistance pour certaines tâches
47 (15,1%) : Autre

311 personnes ont répondu à cette question à choix multiples. La demande la plus fréquente concerne l’adaptation du poste de travail en matière de lumière, de son et d’espace, seule proposition à susciter l’adhésion d’une majorité (55 %) de répondants.

Il est notoire que l’aménagement en open-space ne convient pas aux personnes autistes, car cumulant un ensemble de difficultés : bruit119, promiscuité avec des collègues, visibilité par de nombreuses personnes, éléments visuels en mouvement. La demande d’un bureau individuel est fréquente, mais rarement prise en compte, y compris malgré l’existence d’une note de la médecine du travail précisant ce besoin120.

En seconde position, la demande d’aménagement des horaires (48,6 %) vise très logiquement à éviter les heures typiques des mouvements pendulaires, particulièrement éprouvants pour les adultes autistes (bruit, foule…) ainsi qu’à éviter la présence d’un grand nombre de collègues de travail autour de soi. Il s’agit d’une demande régulièrement portée dans divers autres domaines, tels que les horaires d’ouverture des bibliothèques par exemple.

L’organisation du travail est la troisième demande en ordre de fréquence (47,3 %), la demande de consigne écrites plutôt qu’orales, ainsi que la non-utilisation du téléphone, entrant probablement dans ce type de demandes. Rejoignant cette dernière, le passage en télétravail, ou depuis le domicile, est aussi une demande forte (45 %), qui permettrait de résoudre les questions d’aménagement du poste et celle des horaires. 38,3 % des répondants souhaitent un passage à temps partiel.

La demande en coaching (30,5 %), solution souvent préconisée dans diverses publications, avec d’évidents intérêt financiers du côté des prestataires concernés, est moins fréquente qu’attendu de la part des travailleurs autistes. Plusieurs raisons pourraient l’expliquer, en particulier les dérives régulières (dérives sectaires, application de méthodes douteuses…) constatées dans ce domaine, dérives qui nuisent nettement à sa crédibilité121 ; par ailleurs, le manque de connaissance de certains coachs en matière d’autisme est souligné dans un commentaire du champ autre.

27,7 % des répondants souhaitent être assistés sur des taches spécifiques. Avec la question du coaching, ces réponses montrent une nette volonté de s’autonomiser en organisant soi-même son espace de travail de manière plus agréable, plutôt qu’un souhait d’être encadré.

Les 15,1 % de réponses du champ autre mentionnent les transports, un souhait de devenir travailleurs indépendants, la demande pour un espace de retrait sensoriel, une demande d’évitement des contacts sociaux, la présence d’une personne référente, ainsi que de fréquents dégoûts vis à vis de mauvaises expériences dans le monde professionnel.

Certaines situations décrites reflètent une nette urgence, notamment celle-ci :

Je n’ai pas d’atelier et suis obligée de travailler dans
un coin de mon garage, sans lumière du jour, au froid…
j’aurais besoin qu’on m’attribue un atelier près de chez
moi mais je ne sais pas comment interpeller les organismes
ou personnes privées pour cela.

Dessin de Blequin

La liberté vestimentaire est citée deux fois ; bien que cela paraisse très peu, ce point méritera certainement d’être creusé, ne serait-ce que dans la mesure où il peut constituer un facteur de rejet durant l’entretien d’embauche et à l’emploi. Un répondant précise être gêné par la couleur et la matière de la tenue de travail qui lui est imposé.

2.10.Accès aux soins

L’accès au soin est l’une des demandes-phare du 4e plan autisme. En effet, comme le souligne notamment le Dr Djéa Saravane, l’importante réduction de l’espérance de vie des personnes autistes (17 ans en moyenne par comparaison à la population générale122) résulte très fréquemment d’un mauvais accès aux soins, entre autres pour des cas d’épilepsie, mais aussi de maladies somatiques diverses. Il existe en effet une tendance générale des professionnels de santé à croire que la qualité d’autiste prémunit des problèmes de santé somatique, croyance dont les manifestations caricaturales sont des remarques du type :

Il ne peut pas avoir mal au ventre, il fait juste une crise parce qu’il est autiste

Cette croyance, doublée à l’absence d’accessibilité des lieux de soin pour les personnes ayant des troubles sensoriels et de communication, se traduit logiquement par de grandes difficultés d’accès aux soins.

Certains aspects restent non-explorés par la présente section, en particulier les troubles gastro-intestinaux, que l’on sait être fréquents sans par ailleurs entrer dans la question houleuse des causes. La fréquence des maladies cardio-vasculaires, qui forment la première cause de mortalité pour la population-type de ce sondage123, mériterait aussi une exploration.

2.10.1.Avez-vous des difficultés pour l’accès aux soins ?

Oui : 72,4% Non : 27,6%
325 (72,4%) : Oui
124 (27,6%) : Non

449 personnes ont répondu à cette question. Une nette majorité de répondants (72,38 %) signalent des difficultés d’accès aux soins.

2.10.2.Si oui, lesquelles ?

50 100 150 200 250 Peur du contact physique Pudeur Hypersensibilité sensorielle Peur des médecins en général Peur des aiguilles/piqûres Difficultés à prendre rendez-vous par téléphone Difficultés dans la salle d’attente (agoraphobie…) Difficultés avec l’accès administratif aux droits Manque de ressources Manque de complémentaire santé Difficultés à trouver un médecin
127 (37,8%) : Peur du contact physique
110 (32,7%) : Pudeur
140 (41,7%) : Hypersensibilité sensorielle
102 (30,4%) : Peur des médecins en général
68 (20,2%) : Peur des aiguilles/piqûres
226 (67,3%) : Difficultés à prendre rendez-vous par téléphone
104 (31,0%) : Difficultés dans la salle d’attente (agoraphobie…)
122 (36,3%) : Difficultés avec l’accès administratif aux droits
85 (25,3%) : Manque de ressources
35 (10,4%) : Manque de complémentaire santé
130 (38,7%) : Difficultés à trouver un médecin

336 personnes ont répondu à cette question à choix multiples, soit une dizaine de personnes supplémentaires par comparaison à la question précédente. La première difficulté évoquée, par les deux tiers des répondants, est l’utilisation du téléphone (67,3%), à une fréquence remarquablement plus élevée que tout le reste. Si des prises de rendez-vous par internet commencent à se développer, le téléphone reste largement, en France, l’unique moyen de contacter un professionnels de santé. Cette réponse pose question en matière d’appel sur des plate-formes d’urgence (Samu, pompiers…) ; les deux-tiers des répondants ayant des difficultés avec le téléphone, les situations d’urgence peuvent, hélas, facilement déboucher sur des drames, potentiellement démultipliés par les difficultés d’élocution (homme autiste passant à tort pour alcoolique, etc).

En second ordre de fréquence, les hypersensibilités sensorielles sont évoquées par 41,7 % des répondants. Il existe des témoignages isolés, sur des forums et réseaux sociaux, relatifs à de mauvais diagnostics ou à des rejets de soins en raison d’ hyper- ou, il est important de le souligner, d’ hyposensibilités sensorielles. Ainsi, différents témoignages relatent des problèmes de caries dentaires ou d’appendicites qui n’ont pas été ressenties, ou très tardivement. À l’inverse, au moins une personne autiste fut refusée après une séance de soins dentaires car le praticien estimait impossible que la personne ressente réellement une douleur après injection de l’anesthésiant. La sensibilité au niveau de la peau peut rendre le contact avec un stéthoscope, objet froid et métallique, particulièrement désagréable. La peur du contact physique, citée par 37,8 % des répondants, entre dans cette catégorie.

Les difficultés à trouver un médecin, citées par 38,7 % des personnes, sont certainement liées à la pénurie nationale de médecins généralistes en France. Les difficultés d’ordre administratif (36,3 %) déjà largement évoquées, peuvent se complexifier du fait de situations personnelles hors de la norme, ayant notamment conduit plusieurs personnes autistes à perdre leur sécurité sociale de base124. Un répondant à la question 2.10.4 précise ainsi avoir vécu de 1994 à 20 11 sans mutuelle santé et avec des périodes sans même de sécurité sociale (parce que je ne savais pas que j’y avais droit).

La pudeur, liée à une réticence, sinon une impossibilité à se déshabiller chez un professionnel de santé, est citée par 32,7 % de répondants. En lien avec une réponse à la question 2.10.4, une répondante évoque une angoisse liée à l’épilation, précisant je ne m’épile pas car je trouve que cela est une perte de temps.

Des difficultés dans la salle d’attente sont citées par 31 % des répondants ; la présence de nombreuses autres personnes est souvent synonyme de rencontre avec de jeunes enfants turbulents et bruyants. 30,4 % des répondants disent avoir peur des médecins de manière générale, les mauvaises expériences passées ne pouvant qu’accroître cette peur.

Plus inquiétant, un quart des répondants (25 ,3%) renoncent à des soins faute de ressources financières, ils sont par ailleurs 10,4 % à signaler l’absence de complémentaire santé comme étant un problème. Enfin, 20,2 % des répondants ont peur des aiguilles et des piqûres, une phobie par ailleurs relativement répandue parmi la population générale125.

2.10.3.Quelles solutions envisageriez-vous ?

50 100 150 200 250 300 350 Prise de rendez-vous par SMS et/ou email Aménagement des rendez-vous aux heures creuses Médecin référent connaissant l’autisme Remboursement des frais de psychologue Remboursement des frais d’entraînements aux habiletés sociales Cartes personnelle de présentation de l’autisme Outils de préparation d’un rendez-vous chez le médecin Autre
220 (49,1%) : Prise de rendez-vous par SMS et/ou email
119 (26,6%) : Aménagement des rendez-vous aux heures creuses
320 (71,4%) : Médecin référent connaissant l’autisme
221 (49,3%) : Remboursement des frais de psychologue
152 (33,9%) : Remboursement des frais d’entraînements aux habiletés sociales
160 (35,7%) : Cartes personnelle de présentation de l’autisme
71 (15,8%) : Outils de préparation d’un rendez-vous chez le médecin
63 (14,1%) : Autre

448 personnes ont répondu à cette question à choix multiples, avec un plébiscite (71 %) en faveur d’un médecin référent connaissant l’autisme. Cette solution apparaît cohérente avec d’autres constats, un grand nombre de difficultés d’accès aux soins découlant en effet de méconnaissances de l’autisme.

Seconde réponse en termes de fréquence, la demande de remboursement des frais de psychologue rencontre l’adhésion de 49,3 % des répondants. Bien qu’elle puisse constituer une solution à la peur d’utiliser le téléphone, la prise de rendez-vous par courriel ou par SMS n’est citée que par 49,1 % des répondants. Cette possibilité existe déjà via certains sites web, tels que Doctolib126. La proposition de port d’une carte personnelle de présentation de l’autisme est soutenue par 35,7 % des répondants. Vient ensuite la proposition de remboursement des frais d’entraînements aux habiletés sociales, avec 33,9 % de mentions. L’aménagement des rendez-vous aux heures creuses est assez peu cité, par 26,6 % des répondants. L’accès à des outils de préparation aux rendez-vous chez le médecin ne rencontre l’adhésion que de 15,8 % de répondants.

Parmi les réponses du champ autre (14,1 %), le rappel du manque de formation des médecins généralistes est fréquent. La proposition consistant à voir un médecin spécialiste à dates fixes et conjointement décidées, par exemple tous les mois, est assez remarquable car elle répond à un besoin de routines. Sont mentionnés des renoncements volontaires aux soins, le souhait d’un accès à une médecine robotisée à domicile, de grouper les rendez-vous médicaux, d’adapter les lieux médicaux aux hypersensibilités sensorielles, de pouvoir se rendre chez le médecin avec un animal, ou encore des besoins de remboursements de frais de transport, et d’approches qui ne sont pas remboursées actuellement (TCC, médiation animale…).

2.10.4.Avez-vous déjà renoncé à des soins :

50 100 150 200 250 300 Pour des raisons financières Pour des raisons administratives À défaut de médecin Par peur/angoisse Autre
177 (39,5%) : Pour des raisons financières
126 (28,1%) : Pour des raisons administratives
143 (31,9%) : À défaut de médecin
269 (60,0%) : Par peur/angoisse
100 (22,3%) : Autre

448 personnes ont répondu à cette question à choix multiples. Le premier motif de renoncement aux soins est nettement la peur/angoisse, 60 % des répondants étant concernés. Ils sont 39,5 % à avoir renoncé à des soins faute de moyens financiers. Le manque de médecin est la troisième raison citée, à 31,9 %. Les raisons administratives sont plus rares, citées par 28,1 % des répondants.

Les réponses du champ autre comportent une large part de réponses non ou jamais, et font part d’incompréhensions avec le personnel médical, de procrastinations, de souhaits d’éviter la salle d’attente, de manque de médecins connaissant l’autisme, ou encore d’un souhait d’éviter tout contact.

2.10.5.De quel(s) droit(s) disposez-vous actuellement pour le remboursement des soins ?

50 100 150 200 250 300 350 Sécurité sociale de base CMU de base CMU complémentaire Mutuelle Je ne sais pas
311 (69,4%) : Sécurité sociale de base (CPAM, MSA…)
33 (7,4%) : CMU de base
36 (8,0%) : CMU complémentaire
290 (64,7%) : Mutuelle
55 (12,3%) : Je ne sais pas

448 personnes ont répondu à cette question à choix multiples. L’association entre Sécurité sociale de base (69,4 %) et mutuelle (64,7 %) forme le tableau le plus fréquent. Cependant, 8 % des répondants disposent d’une CMU complémentaire, et 7,4 % d’une CMU de base. 12,3 % ignorent quels sont leurs droits aux remboursements des soins.

2.10.6.Avez-vous déjà été hospitalisé(e) en Hôpital Psychiatrique (HP) ?

100 200 300 400 Pour des séjours Pour des soins Je n’ai pas été hospitalisé(e) en Hôpital Psychiatrique
70 (15,6%) : Pour des séjours
32 (7,1%) : Pour des soins
359 (80,1%) : Je n’ai pas été hospitalisé(e) en Hôpital Psychiatrique

448 personnes ont répondu à cette question. La grande majorité des répondants n’ont jamais expérimenté d’hospitalisation en hôpital psychiatrique (80,1%). Ils sont cependant 15,6 % à déclarer y avoir séjourné, et 7,1 % à y avoir été reçus en soins.

2.10.7.Si vous avez été hospitalisé(e) en HP, pensez-vous que c’était :

Nécessaire/utile : 26,0% Justifié : 17,7% Inutile : 13,5% Nuisible : 26,0% Abusif : 16,7%
25 (26,0%) : Nécessaire/utile
17 (17,7%) : Justifié
13 (13,5%) : Inutile
25 (26,0%) : Nuisible
16 (16,7%) : Abusif

96 personnes ont répondu à cette question, un peu moins que l’ensemble des répondants oui à la question précédente. Les avis sont très partagés, le nombre de répondants estimant que cela leur fut nécéssaire ou utile (26 %) étant égal à celui des répondants décrivant la procédure comme nuisible. En parallèle, presque autant la décrivent comme justifiée (17,7 %) que comme abusive (16,7 %). 13,5 % des répondants estiment que cela leur fut inutile.

Il existe de nombreux témoignages de souhaits d’éviter l’HP sur internet, permettant de déduire, sans trop de risques, que l’HP semble plutôt mieux perçu en cas de risque vital immédiat (dépression résistante, tentative de suicide…), et moins bien perçu lorsqu’il ne constitue qu’un choix par défaut pour des personnes auxquelles aucune place dans la société n’est proposée. La Cour des comptes a pour sa part décrit l’envoi des adultes autistes en HP comme étant, le plus souvent, coûteux et inadapté127.

2.10.8.Avez-vous déjà connu des épisodes dépressifs :

Avec fortes envies suicidaires : 21,8% Avec tentatives de suicide : 12,0% Avec idées suicidaires : 33,6% Sans idées suicidaires : 20,9% Aucun épisode dépressif à ma connaissance : 11,6%
98 (21,8%) : Avec fortes envies suicidaires
54 (12,0%) : Avec tentatives de suicide
151 (33,6%) : Avec idées suicidaires
94 (20,9%) : Sans idées suicidaires
52 (11,6%) : Aucun épisode dépressif à ma connaissance

449 personnes ont répondu à cette question. La réponse la plus fréquente concerne des épisodes dépressifs avec idées suicidaires (33,6 %), suivie des épisodes dépressifs avec fortes envies suicidaires (21,8 %). Cela, additionné aux épisodes dépressifs avec tentatives de suicide, fait que 67,4 % des répondants, plus des deux tiers, ont connu des épisodes dépressifs avec idées suicidaires.

Ce n’est hélas pas étonnant : les données collectées par l’étude de Sarah Cassidy et Simon Baron-Cohen, parue en 2014 dans The Lancet et portant sur 374 adultes autistes, montre que 66 % d’entre eux ont éprouvé des pensées suicidaires, et qu’un tiers ont prévu ou fait une tentative128. Plus récemment, la recension de Hedley et Uljarević, parue en 2018 et portant sur 13 études consacrées au lien entre autisme et suicide, détermine qu’entre 1 et 35 % des personnes autistes ont fait au moins une tentative de suicide, et que 11 à 66 % ont éprouvé des pensées suicidaires129. De plus, 0,31 % des décès précoces de personnes autistes y sont attribués à un suicide, ce qui est significativement plus élevé que dans la population générale. Le suicide est aussi la seule cause de mortalité qui soit plus fréquente chez les personnes autistes dites à haut niveau de fonctionnement que chez les personnes considérées comme ayant un handicap mental. En France, cela se traduit plus concrètement par des disparitions, aussi subites que discrètes, d’adultes autistes considérés comme bien insérés, que leur diagnostic soit public ou non.

Les taux de dépression ont largement été analysés comme élevés chez les adultes autistes : la recension de Hedley et Uljarević a déterminé qu’environ 49 % des personnes autistes répondent ou ont répondu au tableau clinique de la dépression à un moment de leur vie, les femmes étant davantage concernées que les hommes. Le taux trouvé dans le présent sondage est plus élevé (67,4 %), et pourrait s’expliquer par de moins bonnes qualités de vie en France par comparaison aux pays dans lesquels ont été menées les études à l’origine de la recension de Hedley et Uljarević, ou encore par une sur-représentation de répondantes, si les statistiques de la recension Hedley et Uljarević sont correctes.

2.11.Représentations et militantisme

D’après Florence Vallade, le mot autisme était presque inconnu dans les médias français jusque dans les années 1990130.

La première association constituée entre personnes autistes, SATEDI, le fut en 2004. Le militantisme des personnes elles-mêmes autistes reste cependant balbutiant. Une émission grand public diffusée sur TF1, en 2007, a permis à plusieurs adultes autistes d’être invités. Cependant, de multiples raisons expliquent le faible nombre de militants de l’autisme en France.

D’une part, les associations françaises se sont historiquement constituées entre parents, en réaction à l’approche psychanalytique131, laissant peu de place à l’expression des personnes directement concernées. D’autre part, la prise en compte de l’existence de personnes autistes capables de s’exprimer a été plus tardive que dans les pays anglo-saxons, situation aggravée par la classification CFTMEA, qui a longtemps maintenu des étiquettes diagnostiques différentes (dysharmonie psychotique, dysharmonie évolutive…) permettant à des professionnels de santé d’éviter de diagnostiquer l’autisme ou le syndrome d’Asperger132 ; il n’existe évidemment pas d’associations ou de militance de dysharmoniques ou de psychotiques.

L’année de Grande cause nationale pour l’autisme, en 2012, a entraîné une accélération conséquente à la présence de débats autour de l’autisme dans l’espace public, mais guère du nombre de militants réguliers. On ne peut que souscrire aux propos de Josef Schovanec lorsqu’il souligne une méconnaissance bilatérale entre monde de l’autisme et médias133 : de façon très régulière, la presse présente les adultes autistes conférenciers comme des malades appelés à témoigner (sous-entendu, de leur quotidien de malades). À ce titre, soulignons que le premier ouvrage de Hugo Horiot a reçu un prix intitulé Paroles de patients, ce alors qu’il dit de façon régulière dans ses interventions que l’autisme n’est pas une maladie.

Les premiers films français consacrés à l’autisme, après Elle s’appelle Sabine, sorti en salles début 2008, sont concomitants ou subséquents à l’année de Grande Cause nationale : Le Mur, Le cerveau d’Hugo et Shameful en 2012 ; Le goût des merveilles en 2015 ; Monsieur je-sais-tout en 2018.

Même phénomène en ce qui concerne l’édition : le premier ouvrage français écrit par une personne autiste fut probablement La vie éphémère d’un papillon de Romuald Grégoire, sorti de manière posthume. Je suis né un jour bleu de Daniel Tammet, paru en 2007, est traduit de l’anglais ; c’est après 2012 que les auteurs autistes français ont trouvé une place. Je suis à l’Est ! de Josef Schovanec et L’Empereur, c’est moi de Hugo Horiot sont parus, respectivement, en 2012 et 2013. Depuis, tous deux ont écrit d’autres ouvrages. D’autres auteurs, notamment Julie Dachez, se sont depuis fait connaître.

En complément de la section du présent sondage consacrée aux préjugés, l’utilisation fréquente du mot autiste comme insulte dans l’espace public, aussi bien dans les cours de récréation des écoles primaires et collèges, que dans des émissions de télévision et de la part d’hommes politiques, mérite elle aussi d’être soulignée…

2.11.1.Trouvez-vous qu’il y a une représentation correcte des personnes autistes en France (associations, médias…) ?

Absolument pas : 44,6% Pas vraiment : 38,3% Sans opinion : 12,2% Plutôt, oui : 4,7% Tout à fait : 0,2%
198 (44,6%) : Absolument pas
170 (38,3%) : Pas vraiment
54 (12,2%) : Sans opinion
21 (4,7%) : Plutôt, oui
1 (0,2%) : Tout à fait

444 personnes ont répondu à cette question. Ce type de question, posée à une population directement concernée, est connu pour induire un biais dans les réponses, qui pourrait être évalué en posant la même question à des personnes différemment concernées, ou non-concernées. Cela étant, l’ampleur statistique des réponses Absolument pas (44,6 %) et Pas vraiment (38,3 %), pour un total de 82,9 % de répondants mécontents de la représentativité en matière d’autisme, est extrêmement nette. 12,2 % des répondants ne s’expriment pas. Les 4,7 % de répondants Plutôt, oui sont une nette minorité. Une seule personne répond Tout à fait, représentant 0,2 % du total des réponses.

En parallèle de l’aspect correct ou non de la représentation, il semble important d’explorer la question du temps médiatique accordé à l’autisme. Si les personnes autistes représentent environ 1 % de la population (en cohérence avec le consensus international actuel), une représentation proportionnelle accorderait 1 % de l’espace médiatique à des personnes autistes déclarées, ou identifiables comme telles. Nul besoin d’analyser le paysage médiatique français bien longtemps pour constater combien nous en sommes loin. Cela étant, cette observation mérite sans doute trois compléments :

2.11.2.Trouvez-vous que l’information autour de l’autisme en France est :

Très insuffisante : 64,2% Assez insuffisante : 25,0% Sans opinion : 7,2% Assez suffisante : 3,2% Très suffisante : 0,5%
285 (64,2%) : Très insuffisante
111 (25,0%) : Assez insuffisante
32 (7,2%) : Sans opinion
14 (3,2%) : Assez suffisante
2 (0,5%) : Très suffisante

444 personnes ont répondu à cette question, induisant le même biais que la précédente. Cependant, le taux de mécontentement est là aussi massif et indéniable, une nette majorité (64,2 %) des répondants estimant que l’information en matière d’autisme est très insuffisante. Un quart des répondants la jugent assez insuffisante. Au total, ce sont 89,2 %, presque 9 répondants sur 10 qui concluent à une insuffisance de l’information en matière d’autisme.

7,21 % des répondants ne s’expriment pas. 3,15 % jugent l’information assez suffisante, 0,45 % (soit deux personnes) la trouvent très suffisante, pour un total de 3,50 % d’opinions favorables.

2.11.3.Trouvez-vous qu’il y a encore beaucoup de préjugés sur l’autisme en France ?

Oui, énormément : 76,1% Oui, plutôt : 20,5% Sans opinion : 3,4%
338 (76,1%) : Oui, énormément
91 (20,5%) : Oui, plutôt
15 (3,4%) : Sans opinion
0 (0,0%) : Non, pas vraiment
0 (0,0%) : Non, pas du tout

444 personnes ont répondu à cette question. Fait notable, aucune n’a répondu non à la question de savoir s’il y a beaucoup de préjugés concernant l’autisme en France, plus des trois quarts (76,1 %) estimant qu’il en reste énormément, un cinquième (20,5 %) répondant oui, plutôt. 3,4 % ne s’expriment pas à ce sujet.

Il est cependant à signaler que la formulation de la question induit un biais dans les réponses, les questions contenant une affirmation présente dans les possibilités de réponse (ici : il y a encore beaucoup de préjugés sur l’autisme) induisant une tendance des répondants à choisir cette même réponse. Cependant, même en l’existence de ce biais, le oui reste franc et massif.

2.11.4.Donnez quelques exemples de préjugés dont vous avez connaissance ou que vous avez déjà rencontrés :

50 100 150 200 250 300 350 Les autistes sont déficients intellectuels Les autistes sont tous des surdoués Les autistes ne parlent pas L’autisme n’existe pas Tout le monde est un peu autiste L’autisme, c’est à la mode Autre
337 (75,9%) : Les autistes sont déficients intellectuels
279 (62,8%) : Les autistes sont tous des surdoués
323 (72,7%) : Les autistes ne parlent pas
104 (23,4%) : L’autisme n’existe pas
285 (64,2%) : Tout le monde est un peu autiste
291 (65,5%) : L’autisme, c’est à la mode
108 (24,3%) : Autre

444 personnes ont répondu à cette question à choix multiples. Les préjugés les plus fréquemment cités sont relatifs à la déficience intellectuelle. Il est probable que les répondants à ce sondage soient plus sensibles à ce préjugé qu’à d’autres, s’agissant essentiellement de personnes diagnostiquées sans déficience intellectuelle. Ce constat est cohérent avec l’observation faite par Laurent Mottron dans son ouvrage de 2004. Le deuxième préjugé cité, à 72,7 %, concerne la verbalité. En cohérence avec l’observation précédente, il confirme que les représentations de l’autisme restent, pour le public français, majoritairement associées à l’image d’un enfant mutique et déficient.

En troisième mention, l’idée selon laquelle l’autisme serait devenu une mode est citée par 65,5 % des répondants. Ce préjugé est certainement lié à la médiatisation croissante de l’autisme en France, en particulier depuis 2012, et à l’idée largement répandue selon laquelle très peu de personnes seraient concernées134. La phrase tout le monde est un peu autiste vient en quatrième position (64,2%).

Ensuite est citée l’image opposée à cette représentation majoritaire du handicap sévère, l’idée selon laquelle les autistes seraient tous surdoués (62,8 %). Cette image, dont on peut aisément dater la naissance à la sortie du film Rain Man en 1988, a été longuement entretenue par divers émissions de télévision sensationnalistes, ainsi que des séries télévisées américaines.

En revanche, le préjugé selon lequel l’autisme n’existerait pas est assez peu cité (23,4%).

Parmi les réponses riches et nombreuses du champ autre, figurent des clichés relatifs à l’image déficient (tous les autistes bavent et se tapent la tête contre les murs ; les autistes sont des malades mentaux), comme au cliché des surdoués : les autistes sont tous des Rain Man / ont tous une mémoire extraordinaire / ont tous un don extraordinaire / sont tous doués en sciences. Sont citées d’autres représentations contraires, notamment celle selon laquelle l’ autisme se verrait (handicap visible, par ex. balancement postural) ou ne se verrait pas (handicap invisible) chez la personne concernée. À ce sujet, un répondant signale avoir entendu dans un CRA que Si quelqu’un est autiste, cela se voit forcément à son attitude qui suscite un certain sentiment de malaise, un autre que un Asperger doit ressembler à [Josef] Schovanec.

Sont évoquées les notions de bulle et d’enfermement dans son monde des croyances relatives à l’absolu évitement du regard (réponse citée 8 fois), à l’absolu manque d’empathie (cité 4 fois), une perception des gens autistes comme potentiellement dangereux, incapables d’aimer ou de s’attacher à autrui, et le manque de représentation des personnes autistes qui ne sont ni surdouées, ni déficientes. Plusieurs répondants se sont entendus dire qu’ils ne pouvaient pas être autistes car ils ont le permis de conduire, un(e) conjoint(e), un logement, des enfants et/ou des diplômes.

9 répondants rejettent l’association entre l’autisme et la maladie, en particulier la maladie mentale. En revanche, un répondant insiste sur le fait que, pour lui, l’autisme est une maladie.

Sont encore citées les fake news  (autisme causé par les vaccins, le gluten, la télévision), le décalage entre la vision française de l’autisme et les connaissances internationales (les autistes sont psychotiques, l’autisme est dû à la mère , le syndrome d’Asperger est une invention des américains, l’autisme disparaît en grandissant / se guérit). Une demi-douzaine de répondants se révoltent contre l’utilisation du mot autiste comme insulte, associée à des représentations erronées, d’autres signalent la récurrence des situations au cours desquelles il leur a été reproché de ne pas avoir d’émotions ou de vie intérieure.

2.11.5.Êtes-vous membre d’une association ?

50 100 150 200 250 300 350 De personnes autistes Regroupant des personnes autistes et des parents Je ne suis pas membre d’une association Autre
40 (9,0%) : De personnes autistes
76 (17,1%) : Regroupant des personnes autistes et des parents
318 (71,6%) : Je ne suis pas membre d’une association
40 (9,0%) : Autre

444 personnes ont répondu à cette question. Dans leur grande majorité, les répondants ne sont membres d’aucune association (71,6 %). Ceux qui ont rejoint une association sont surtout (17,71 %) membres de structures regroupant des personnes autistes et des parents. Il est logique que ces réponses concernent une bonne partie de membres d’Asperansa, qui a adopté ce type de fonctionnement, avec au moins 20 % de personnes autistes membres du comité d’administration (CA). Une nette minorité (9 %) de répondants sont membres d’une association de personnes autistes uniquement.

Parmi les 9 % de réponses du champ autre,figurent des mentions d’engagement associatif des parents des répondants, de participations à des forums ou des groupes de discussion sans engagement associatif, des attentes d’adhésion, et des participations associatives hors du domaine de l’autisme (avec la mention de Mensa 4 fois). Un répondant souligne que, pour les personnes qui chercheraient un engagement associatif en se renseignant sur internet, il peut être intimidant ou révoltant que l’une des premiè res réponses apparaissant à la requête soit l’association Vaincre l’autisme.

2.11.6.Comment trouvez-vous que les personnes autistes doivent être représentées (plusieurs réponses possibles) ?

50 100 150 200 Par des associations uniquement composées de personnes autistes Par des associations majoritairement composées de personnes autistes Par des associations regroupant des personnes autistes, des parents et d’autres personnes Par des associations regroupant des personnes autistes, des parents, d’autres personnes, avec des droits spéciaux pour les personnes autistes Je n’ai pas d’avis sur la question Autre
61 (13,7%) : Par des associations uniquement composées de personnes autistes
133 (30,0%) : Par des associations majoritairement composées de personnes autistes
165 (37,2%) : Par des associations regroupant des personnes autistes, des parents et d’autres personnes
160 (36,0%) : Par des associations regroupant des personnes autistes, des parents, d’autres personnes, avec des droits spéciaux pour les personnes autistes (commissions, présence au conseil d’administration…)
77 (17,3%) : Je n’ai pas d’avis sur la question
28 (6,3%) : Autre

444 personnes ont répondu à cette question à choix multiples. Les réponses sont très hétérogènes, aucune majorité ne se dégageant de façon nette. La première réponse en nombre privilégie les associations regroupant des personnes autistes, des parents et d’autres personnes (37,2 %), suivie de très près (36 %) par les associations regroupant des personnes autistes, des parents, d’autres personnes, avec des droits spéciaux pour les personnes autistes (commissions, présence au conseil d’administration…). Cette dernière organisation est celle qu’a choisie l’association Asperansa, ce qui induit un biais logique dans les réponses. Ainsi, selon 73,2 % des avis exprimés, les associations comptant une majorité de personnes elles-mêmes autistes ne seraient pas souhaitables.

30 % des répondants estiment qu’ une association majoritairement composées de personnes autistes est préférable. Seules 13,7 % expriment un souhait en faveur d’associations uniquement composées de personnes autistes.

Les quelques réponses du champ autre soulèvent des questions intéressantes, telles que l’absence de présence médiatique des personnes autistes très handicapées, les difficultés rencontrées pour participer à des conseils d’administration associatifs, un sentiment d’infantilisation dans les associations avec parents, et le refus absolu d’être représenté par une association telle que Autism Speak aux États-Unis, association connue pour offrir une vision misérabiliste de l’autisme et mettre l’accent sur la recherche de guérison. Un répondant exprime son dégoût envers la visibilité d’adultes autistes qui ont un intérêt commercial et marketing à vouloir se médiatiser à tout prix, un autre les problèmes d’ego dans le milieu associatif, un troisième le manque d’union des personnes autistes entre elles. Un répondant estime que les militants associatifs dans l’autisme seraient avant tout malheureux :

Les surdoués heureux n’ont pas besoin d’aller
dans des associations pour surdoué malheureux.
Eh bien c’est la même chose pour les autistes !
Donc, si on laisse les associations d’autistes malheureux
choisir un représentant, il ne sera certainement
pas représentatif du spectre de l’autisme !

Le sujet de la représentation reste sensible, dans la mesure où la situation française apparaît en décalage avec le point 37 du Rapport de la Rapporteuse spéciale des droits des personnes handicapées paru en 2016, concernant l’application de la Convention relative aux droits des personnes handicapées en matière de prises de décisions. Ce point souligne en effet qu’il est souhaitable d’accélérer la création d’organisations composées de personnes atteintes d’un handicap mental ou d’autisme ou d’autres personnes qui défendent elles-mêmes leurs droits et peuvent avoir besoin d’un accompagnement poussé pour pouvoir exprimer leurs vues, signalant par ailleurs qu’au sein de ces organisations, le rôle des parents devrait s’orienter de plus en plus vers la prestation d’un appui, les personnes handicapées ayant les pleins pouvoirs.

Ce rapport insiste enfin sur la nécessité de distinguer les organisations de personnes handicapées de celles pour les personnes handicapées, qui s’expriment en leur nom, et sur les tensions qui en découlent en matière de légitimité, choix, contrôle et allocation des ressources. Il recommande que les États veillent à promouvoir la participation véritable des personnes handicapées aux processus de prise de décisions135.

Les questions de représentation sont fréquemment discutées sur les réseaux sociaux ou par échanges de mail : il apparaît que les associations comptant un nombre minoritaires de personnes autistes connaissent un important turn-over136. Une explication logique à cela serait que l’inclusion d’un très faible nombre de personnes autistes à une association ne leur permette pas d’exprimer réellement leurs points de vue et souhaits, en particulier en raison de la différence de compétences sociales, conduisant à une sensation d’être la caution autiste d’un point de vue non-partagé par les personnes directement concernées137.

Cette discussion évoque d’autres raisons conduisant à des échecs d’associations composées uniquement de personnes autistes, notamment l’absence de point commun autre que l’autisme lui-même, et un manque d’expérience de la culture associative.

2.12.Commentaires libres des répondants

Une section, correspondant à la question 71 dans le sondage, permet de laisser un commentaire ouvert. Certains de ces commentaires sont ici reproduits.

Un nombre assez important de ces commentaires (environ 20-25 %) évoquent des difficultés ou questions techniques concernant le sondage, telles que l’absence d’une possibilité de réponse correspondant à un cas spécifique, un doublon dans une question, des erreurs de numérotation, ou l’impossibilité de préciser si le questionnaire a été rempli par la personne concernée seule, ou bien avec une aide. Une part importante également remercient les concepteurs du sondage (peut-être 15 % des commentaires).

Si un second thème revient de façon récurrente, il s’agit de celui du décalage à la norme attendue, plus ou moins ressenti et exprimé par les répondants, en des termes tels que J’ai lutté depuis mes 7 ans contre un monde où je me suis sentie mal, ou encore "Pour vivre heureux, vivons cachés" est une maxime qu’appliquent certainement de nombreux autistes face à la montée de l’intégrisme normalisant actuel qui risque fort de devenir tyrannique comme l’histoire le prouve. Ce ressenti exprimé s’accompagne parfois de demandes d’aides, et d’un certain fatalisme : il n’y a rien d’autre à faire que continuer son chemin seul, et se démerder seul, comme on l’a toujours fait… Seul on est et seul on restera jusqu’à la fin de ses jours.

Un sentiment d’angoisse sur le devenir est fréquemment exprimé.

Deux commentaires reflètent un grave problème lié à l’acceptation des personnes autistes en France. Je n’ai pas fait de reconnaissance MDPH, car mon fils est tsa et je préfère dans les circonstances actuelles en France que cela ne se sache pas (que je suis autiste), et Je suis assez soulagé de m’être tiré sans trop de dommages de tous les pièges de la vie et d’arriver en fin de vie professionnelle en ayant réussi à cacher ma qualité d’Asperger. J’ai beaucoup souffert et pris sur moi pour ce parcours que je quitterai prochainement incognito car il y a plus à perdre qu’à gagner en se révélant qu’en taisant sa qualité véritable, quand on peut le faire. Cela a déjà été remarqué dans le cadre de mon travail avec Laurent Mottron : une part quantitativement importante de personnes diagnostiquées et auto-diagnostiquées ne souhaitent pas que l’information à propos de leur autisme devienne publique, craignant, à juste titre, d’être discriminées dans le milieu professionnel notamment.

Un répondant écrit Au vue du choix des réponses, ça se devine que c’est une personne non autiste qui a crée le questionnaire, car c’est un choix qui reflète beaucoup plus l’autisme vue (sic) de l’extérieur que vue de l’intérieur, avec des choix de réponses trop souvent dans la norme, ne permettant pas d’aborder certaines particularités telles que la gestion des émotions et des ressentis.

Dans la même thématique, une personne se demande pourquoi le seul moyen de contact de nombreuses associations actives dans l’autisme est le téléphone (parfois avec une hotline disponible 24h/24), alors qu’il est notoire que les adultes autistes ont de fréquentes difficultés à téléphoner ; la conclusion évoque le fait que l’aide soit réservée aux familles, et non aux adultes autistes considérés comme perdus pour la patrie.

Un autre répondant regrette l’absence de section permettant d’aborder la question des violences familiales subies dans l’enfance, reflétant un tabou du milieu associatif de l’autisme en France, résultante probable du traumatisme Bettelheim. Il est certain, sans que cela ne puisse nullement être la cause de leur autisme, que des adultes autistes français ont vécu des maltraitances et des abus sexuels durant leur enfance. Le commentaire associé, crève-cœur, précise mes parents me battaient dès que j’avais un comportement qui n’était pas neurotypique (ne pas regarder dans les yeux, me balancer, exprimer un inconfort sensoriel, vouloir passer du temps sur mes intérêts spécifiques…) et j’ai subi des agressions sexuelles quotidiennes dans ma famille jusqu’à mes 17 ans, ainsi que plusieurs viols pédophiles. La possibilité d’aborder ces sujets sans risque de conforter des signalements de maltraitance abusifs permettrait de lever un non-dit qui, actuellement, met probablement en souffrance une part conséquente des adultes autistes.

Un répondant demande à détailler la question de l’accessibilité au logement individuel : Si vous avez 30 personnes qui disent vivre chez leur parents […] Certains se sera par crise économique, d’autre par problème affectif avec une/un ex, d’autre pour un autisme nécessitant un soutien très important, avec déficience intellectuel ou déficit du langage, d’autre se sera pour cause de déménagement temporaire, ou parce que c’est la coutume (italienne, africaine, chinoise, autre ?) etc…

Les propositions de solutions pour faciliter le quotidien sont peu nombreuses, aussi, ce commentaire se détache du lot :

Quelques idées sur la façon de rendre mon quotidien moins perturbant :

  1. Une campagne massive, visible, de longue durée et sans détour sur la situation des adultes autistes au moyen de tous les médias possibles mettant en évidence la souffrance et le non accès à l’emploi générés uniquement par le rejet des autres et absolument pas par l’autisme.
  2. Un auxiliaire de vie, pas au sens standard des soins ou aides ménagères, mais une personne qui puisse ponctuellement prendre en charge un appel téléphonique, un problème avec un voisin bruyant (la loi oblige à une confrontation avec le sujet en tout premier lieu, pour un autiste, c’est impossible. Voire même des conseils pour un entretien, toutes les choses qui nécessitent une communication difficile.
  3. Un droit aux consultations médicales à domicile (dans les cas où c’est possible) avec pour seul motif l’angoisse qui donne souvent lieu à la renonciation à cette consultation. Une sensibilisation des médecins en tout cas pourrait contribuer à ne pas renforcer cette angoisse, le cas échéant.
  4. Un site web dédié aux autistes afin de leur permettre de se rencontrer sur des plates-formes de jeux en ligne ou via des conférences ou même des sujets de discussion sur un vocal.

Enfin, les commentaires de comparaison entre pays tendent à montrer que la situation des adultes autistes ne serait pas globalement meilleure en Suisse ou en Belgique qu’en France, mais pourrait être plus enviable au Québec. L’affirmation souvent entendu des 40 à 50 années de retard que la France aurait accumulées en matière d’autisme ne saurait être aussi simplement résumée.

3.Profil des répondants

3.1.Quel est votre âge ?

16 ⏵ moins de 20 ans : 8,2% 20 ⏵ moins de 25 ans : 18,5% 25 ⏵ moins de 30 ans : 15,5% 30 ⏵ moins de 35 ans : 13,3% 35 ⏵ moins de 45 ans : 24,4% 45 ⏵ moins de 60 ans : 17,6% 60 ans et plus : 2,6%
35 (8,2%) : 16 ⏵ moins de 20 ans
79 (18,5%) : 20 ⏵ moins de 25 ans
66 (15,5%) : 25 ⏵ moins de 30 ans
57 (13,3%) : 30 ⏵ moins de 35 ans
104 (24,4%) : 35 ⏵ moins de 45 ans
75 (17,6%) : 45 ⏵ moins de 60 ans
11 (2,6%) : 60 ans et plus

427 personnes ont répondu à cette question. Les profils de répondants sont variés, avec une moyenne d’âge un peu plus basse que dans la population générale (plus de la moitié des répondants ont moins de 35 ans), et notamment un très faible taux de personnes de 60 ans et plus (2,6 %, soit 11 répondants). Cela s’explique probablement par l’accès tardif au diagnostic.

3.2.Genre

Féminin : 51,3% Masculin : 41,9% Autre : 6,8%
219 (51,3%) : Féminin
179 (41,9%) : Masculin
29 (6,8%) : Autre

427 personnes ont répondu à cette question : Le nombre de répondantes (51,3 %) est nettement plus élevé que le nombre de répondants (41,9 %). Ce phénomène est en contradiction avec les statistiques théoriques au niveau du diagnostic, établissant presque toujours que l’autisme est plus fréquemment diagnostiqué chez des hommes que chez des femmes.

Deux explications sont possibles : un biais de recrutement dû à la diffusion du sondage sur des groupes de femmes autistes, notamment celui de l’AFFA, Association francophone de femmes autistes. Ou bien une tendance naturelle des femmes autistes à se mobiliser davantage, comme l’illustre par ailleurs la forte représentation de femmes militantes dans l’autisme à l’échelle internationale (citation très parcellaire : Temple Grandin (E.U), Donna Williams (AUS), Gunilla Gerland (SUE), etc). Par ailleurs, il est possible que l’autisme lui-même soit plus fréquemment un centre d’intérêt chez les femmes que chez les hommes, tendance accentuée chez les mères d’enfants eux-mêmes autistes.

3.3.Type d’autisme

Syndrome d’Asperger : 53,9% Autisme de haut niveau (sans déficience intellectuelle) : 7,5% Autisme typique : 1,9% TED non spécifié : 0,7% Trouble du spectre de l’autisme : 4,2% Non diagnostiqué : 31,9%
230 (53,9%) : Syndrome d’Asperger
32 (7,5%) : Autisme de haut niveau (sans déficience intellectuelle)
8 (1,9%) : Autisme typique
3 (0,7%) : TED non spécifié
18 (4,2%) : Trouble du spectre de l’autisme
136 (31,9%) : Non diagnostiqué

427 personnes ont répondu à cette question. La majorité des répondants sont concernés par le syndrome d’Asperger, ce qui est logique en raison de l’orientation de l’association Asperansa, à l’origine de ce questionnaire. La réponse suivante concerne les répondants non-diagnostiqués, 31,9 %. Loin derrière, les diagnostics d’autisme de haut niveau concernent 7,5 % des répondants. Une nette minorité (4,2 %) ont reçu un diagnostic de TSA. Les répondants diagnostiqués avec autisme typique (1,9 %) ou TED non spécifié (0,7 %) sont très peu.

Ces propositions de réponses renvoient presque toutes à d’anciennes classifications de l’autisme, qui ne sont plus d’actualité en 2018, saut pour ce qui concerne l’entité TSA – Trouble du spectre de l’autisme.

3.4.Situation familiale

Seul : 64,4% En couple : 35,6%
275 (64,4%) : Seul
152 (35,6%) : En couple

427 personnes ont répondu à cette question. Une grande majorité, soit presque les deux tiers (64,4 %) des répondants vivent seuls. Un peu plus d’un tiers (35,6 %) vivent donc en couple.

3.5.Situation juridique

Sous tutelle : 1,9% Sous curatelle : 2,3% Sous curatelle renforcée : 2,3% Sans mesure de protection juridique : 93,4%
8 (1,9%) : Sous tutelle
10 (2,3%) : Sous curatelle
10 (2,3%) : Sous curatelle renforcée
398 (93,4%) : Sans mesure de protection juridique

427 personnes ont répondu à cette question. Une très grande majorité ne sont pas sous mesure de protection juridique (93,4 %) On note cependant que 2,3 % (10 répondants) sont sous curatelle, et le même nombre sous curatelle renforcée. 1,9 % sont sous tutelle. Dans la section des commentaires, plusieurs répondants expriment s’être sentis insultés par cette question.

3.6.Région

Bretagne : 17,1% Hauts-de-France : 7,7% Île-de-France : 15,2% Auvergne-Rhône-Alpes : 9,4% Bourgogne-Franche-Comté : 4,0% Centre-Val-de-Loire : 2,1% Grand-Est : 5,9% Normandie : 4,2% Nouvelle-Aquitaine : 5,9% Occitanie : 8,0% Pays-de-la-Loire : 6,8% Provence-Alpes Côte-d’Azur : 8,0% DOM-TOM : 0,5% Belgique : 2,1% Suisse : 0,9% Québec : 0,5% Autre : 1,9%
73 (17,1%) : Bretagne
33 (7,7%) : Hauts-de-France
65 (15,2%) : Île-de-France
40 (9,4%) : Auvergne-Rhône-Alpes
17 (4,0%) : Bourgogne-Franche-Comté
9 (2,1%) : Centre-Val-de-Loire
25 (5,9%) : Grand-Est
18 (4,2%) : Normandie
25 (5,9%) : Nouvelle-Aquitaine
34 (8,0%) : Occitanie
29 (6,8%) : Pays-de-la-Loire
34 (8,0%) : Provence-Alpes Côte-d’Azur
2 (0,5%) : DOM-TOM
9 (2,1%) : Belgique
4 (0,9%) : Suisse
2 (0,5%) : Québec
8 (1,9%) : Autre

424 personnes ont répondu à cette question. En toute logique, c’est la Bretagne qui accueille le plus de répondants, l’association Asperansa étant implantée dans cette région. Cependant, la diversité des origines géographique est globalement bien respectée, et suit dans une certaine mesure les densités de populations françaises. Par exemple, 15,22 % de répondants sont originaires de la région Île-de-France, c’est à dire de Paris et des départements de petite et grande couronne. Il est à noter que 5,4 % des répondants ne résident pas en France, et que certaines questions étaient de ce fait non-pertinentes pour eux.

4.Conclusion

Ainsi s’achève ce qui tient sans doute moins de l’analyse de sondage que du rapport statistique sur la situation des adultes autistes en France. Merci à l’association Asperansa de m’avoir permis de conclure ce travail, à l’époque où j’étais menacée d’un travail d’ESAT.

Il est notoirement déconseillé de travailler une étude qui nous touche ou nous concerne directement, en raison d’un risque de biais bien connu. Une réalité instrumentalisée ou déformée pour éloigner les personnes autistes des sujets qui les concernent… peut-être qu’une dizaine d’années à rechercher la neutralité encyclopédique sur Wikipédia aide à réussir l’exercice : les commentaires au présent travail le diront.

De tous les chapitres constitutifs, celui des hobbies fut de loin le plus agréable à explorer. Nombre d’autistes aujourd’hui adultes ont sans doute ont passé une grande partie de leur vie à croire qu’il n’existe personne d’aussi bizarre qu’eux-mêmes. Ainsi découvre-t-on, à travers ces réponses, les fragments de ce qui nourrit la joie, voire maintient en vie les répondants du présent sondage : joie de lire, collectionner des figurines, dessiner pour inventer ses propres mondes, depuis la petite enfance… Qualifiés bien à tort de restreints ces centres d’intérêt m’émerveillent par leur diversité, à tel point que plus d’une fois l’on en vient à souhaiter expérimenter ce lien des autres personnes autistes avec leur domaine favori.

Parmi les commentaires à ce sondage figurent aussi tant et tant de situations de détresse, de profondes injustices, qu’il est pour ainsi dire impossible de les lire sans revivre de scènes similaires, sans revoir les multiples visages de l’exclusion, sans entendre les phrases assassines qui nous éloignèrent, ici d’une école, là d’une bibliothèque. Combien de vies brisées par une exclusion scolaire, par des agressions sexuelles, par de multiples discriminations au travail, par des pertes de logement, par le refus du corps médical de poser un diagnostic juste ?

Un sondage vise en premier lieu, selon la formule consacrée, à photographier une situation. Ainsi, la photographie de la situation des adultes autistes en France en 2018 apparaît emplie de déchirures et fort dépourvue de couleurs ; cruelle, car trop souvent tissée de rejets et d’une certaine résignation, dans un contexte où, en tous domaines, l’accent est mis sur le savoir être, sur la communication et sur l’aspiration au pouvoir, plutôt que sur le savoir-faire. On n’en peut que souhaiter à chaque répondant de continuer à expérimenter les joies qui font le sel de leur existence, le plus longtemps possible.

Dans l’espoir de lendemains meilleurs

Amélie Tsaag Valren, personne autiste.

Remerciements pour leur relecture : Josef Schovanec, Copper Lebrun, Jean Vinçot.

Bléquin

Dessins de Benoît Quinquis, dit Bléquin, graphiste entre autres :

Le questionnaire a été réalisé par Abigaïl Jean, étudiante en psychologie.

5.Notes

1Le syndrome d’Asperger n’existe plus dans les classifications CIM-11 (2018) et DSM-V (2013), et est de ce fait de moins en moins diagnostiqué. Néanmoins, les répondants à ce questionnaire ne sont pas représentatifs de l’ensemble du spectre de l’autisme, s’agissant de personnes qui vivent pour l’essentiel en milieu dit ordinaire, et n’ont pas reçu de diagnostic de déficit intellectuel associé. La terminologie la plus proche correspondrait à la dénomination anglaise de high-functioning autism, traduite de façon erronée en français par autisme de haut niveau, mais dont la traduction correcte serait à haut niveau de fonctionnement.

2Enquête du CRAIF : Plaidoyer pour les adultes autistes (archive)

3Patricia Howlin et Philippa Moss, Adults with Autism Spectrum Disorders, The Canadian Journal of Psychiatry.57,‎ 2012, pp.275–283.

4Josef Schovanec, Rapport présenté à la Secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre l’exclusion sur le devenir professionnel des personnes autistes, Ministère des affaires sociales et de la santé, mars 2017.

5Ibid. p.7

6Observations préliminaires de la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées, Mme Catalina Devandas-Aguilar au cours de sa visite en France, du 3 au 13 octobre 2017.

7Gil Eyal, The Autism Matrix, 2010, Polity, pp.51 ; 61-62

8Laurent Mottron, L’Autisme, une autre intelligence : diagnostic, cognition et support des personnes autistes sans déficience intellectuelle, Mardaga, 2004, p.44.

9Ibid, chap. Responsabilité de la nosographie française des troubles mentaux de l’enfant dans la méconnaissance des TEDSI. Éric Fombonne, lors du congrès 2016 d’Autisme France, a également souligné la persistance de ce sous-diagnostic français.

10Différents professionnels de santé et cliniciens ont fait état, en privé, de demandes insistantes de diagnostic d’autisme, généralement portées par des femmes, conduisant à un possible phénomène de sur-diagnostic. Ce point reste à étudier plus précisément.

11La recommandation du 4e plan autisme (2018) serait de poser le diagnostic de TSA dès 18 mois, au possible. Les résultats de ce sondage montrent une certaine cohérence avec ceux de l’enquête L’autisme en France — Diagnostic et parcours de soin, menée par la Fondation FondaMental, le 28 mars 2013, auprès de 900 personnes. Le diagnostic de syndrome d’Asperger y concernait 16,6 % des répondants. Les signes sont repérés en moyenne à l’âge de 3 ans par les parents, mais le diagnostic n’est posé que beaucoup plus tard. Par ailleurs, un tiers des personnes diagnostiquées Asperger ne se voient proposer aucune aide ni aucun accompagnement à l’issue de leur diagnostic, et trop de parents sont victimes d’errances diagnostiques et thérapeutiques qui retardent d’autant la pose du diagnostic.

12Trouble du spectre de l’autisme ; Syndrome d’Asperger

13Autisme : émergence d’un réservoir caché de mères autistes non diagnostiquées

14D’après Tony Attwood, (Syndrome d’Asperger in Traité Européen de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, Lavoisier, 2012, p.303), la dépression est plutôt la règle que l’exception, notamment chez les adolescents.

15Stewart et al., Presentation of depression in autism and Asperger syndrome: A review, Autism, 2006, 10(1), 103-116.

16Pourquoi nous avons besoin d’outils pour la dépression chez les personnes autistes, traduction par Jean Vinçot de Sam Brice & Jacqui Rodgers : Why we need screens for depression in people with autism.

17Pour Jacques Hochmann, les adultes autistes qui demandent un accès au diagnostic enfilent un vêtement social par mimétisme après la lecture de biographies d’adultes autistes célèbres, et pratiquent le communautarisme : Jacques Hochmann, Le communautarisme dans la bataille de l’autisme, PSN, volume 14,‎ 22 septembre 2016, pp.7–16.

18Le médecin généraliste et la personne autiste, Dr Rouquette Caroline, juin 2012.

19Berrué Arnaud : Comment les médecins généralistes font-ils le repérage des Troubles du Spectre Autistique ? (thèse), voir notamment p.23, repérer mais pour quoi faire ?

20Ibid, p.26.

21L’Obs, Rue89 : Écrans et autisme : la thèse farfelue et virale d’un médecin

22Voir entre autres : Wikipédia : Controverse sur le rôle de la vaccination dans l’autisme, article qui recense la totalité des publications à ce sujet.

23I.G.A.S. : Évaluation des Centres de ressources autisme (CRA) en appui de leur évolution

24D’après le Pr Laurent Mottron (communication personnelle), la réception du diagnostic est généralement vécue en soi comme un événement libérateur.

25INJEP : Âge moyen des jeunes quittant le domicile parental (archive), d’après Eurostat : Un portrait statistique du mode de vie des jeunes.

26Ainsi, Josef Schovanec rappelle régulièrement lors de ses conférences, et avec humour, que son adresse officielle est toujours celle du domicile de ses parents (il aura 37 ans en décembre 2018).

27Pourquoi le marché de la colocation est un business qui explose

28Autism and homelessness – the missing piece of the puzzle?

29Alasdair Churchard, Morag Ryder, Andrew Greenhill et William Mandy, The prevalence of autistic traits in a homeless population, Autism: The International Journal of Research and Practice,‎ 2018.

30Calculé à partir de l’estimation 2014 : Plus nombreux, les SDF vivent aussi dans des conditions plus difficiles qu’en 2001, et des chiffres de la population française fournis par l’INSEE cette même année.

31EXPAT : Devenir nomade digital aux États-Unis

32Exemple récent, le recalage systématique des camionnettes aménagées en habitation au contrôle technique (Les camionnettes aménagées seront recalées au contrôle technique) ne permettra plus aux propriétaires de ces véhicules de s’en servir comme habitations. Si un certain nombre de personnes concernées sont des surfeurs qui en font un usage de loisir, cette décision pénalise aussi des travailleurs saisonniers (montagne, récolte de fruits…) qui évitaient de perdre leurs gains de saison en louant un logement sédentaire onéreux.

33L’accent est mis sur la lutte contre le risque de fraude par captation de ces revenus pour vivre dans un pays étranger et moins onéreux, mais comme le souligne l’ATD quart monde depuis des années, la majorité des personnes touchant le RSA, ou des prestations de même type, sont honnêtes.

34Voir, entre autres, Le non-recours aux aides personnelles au logement : l’exemple de la CAF du Havre, et ODENORE : Vivre en situation de non-recours.

35Patricia Howlin Social Disadvantage and Exclusion: Adults With Autism Lag Far Behind in Employment Prospects, Journal of the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry, vol. 52,‎ septembre 2013, p.897–899

36Observations préliminaires de la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées.

37INSEE, Tableaux de l’économie française, Édition 2017

38Non, le syndrome d’Asperger n’est pas une mode !

39Josef Schovanec, communication personnelle : le Canada et la République tchèque connaissent le plein emploi, mais la situation des adultes autistes sans emploi y est extrêmement précaire.

40France. Le portrait d’un pays en voie d’appauvrissement et d’inégalité.

41Déjà évoqué par Josef Schovanec lors de ses conférences données en 2016.

42Il ne s’agit que d’un exemple spécifique unique, faute d’exploration de la question.

43Tony Attwood (trad. Josef Schovanec), Le syndrome d’Asperger : Guide complet, Bruxelles, De Boeck,2010, 3ème éd, p.403.

44Entre autres : Laarhoven, T. V., E. Kraus, K. Karpman, r. Nizzi et J. Valentino. A comparison of picture and video prompts to teach daily living skills to individuals with Autism dans Focus on Autism and Other Developmental Disabilities, 2010, vol. 25, no 4, p. 195–208 et Smith, L. E., M. J. Maenner et M. M. Seltzer. Developmental Trajectories in Adolescents and Adults with Autism: The Case of Daily Living Skills dans Journal of the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry, 2012, vol. 51, no 6, p. 622-631, et Stoddart, K.P., L. Burke et R. King. Asperger Syndrome in Adulthood: A Comprehensive Guide for Clinicians, New York, NY, Norton Publishers, 2012.

45Les femmes et filles autistes rencontrent de plus grandes difficultés dans les tâches du quotidien que leurs homologues masculins

46Impôts : comment lutter contre la phobie administrative ?

47La phobie administrative pouvant servir à justifier des gros oublis déclaratifs sans que la case prison ne suive, une reconnaissance de cette particularité pour la population autiste ne serait que justice…

48Tidy Desk or Messy Desk? Each Has Its Benefits

49Quiet hour launched in Coles supermarkets to help shoppers with autism

50Je cuisine un jour bleu, livre collaboratif de recettes de cuisine

51Expression employée par un ami auteur belge, Denis Nerincx, pour qualifier mes propres productions culinaires en 2007.

52Je n’ai pu trouver de sources officielles corroborant ces faits, relatés par une amie cadre dans le secteur des cosmétiques, chargée d’étudier les évolutions de ce marché.

53Schovanec 2017, p.75

54Sadlier, M., Cooney, C., Philbin-Bowman, E., & Lewis, A. (2011). Diogenes syndrome and autistic spectrum disorder. Irish Journal of Psychological Medicine, 28 (4), 224-226.

55Source INSEE : Bilan démographique 2018

56Combien de français sans permis de conduire ?et Entre 300 000 et 2,5 millions de Français conduisent sans permis

57Je m’inscris à titre personnel dans cette configuration.

58Arrêté du 21 décembre 2005 fixant la liste des affections médicales incompatibles avec l’obtention ou le maintien du permis de conduire ou pouvant donner lieu à la délivrance de permis de conduire de durée de validité limitée.

59Ce fait m’a été rapporté par deux femmes qu’il est impossible de nommer ici, l’une ayant obtenu son diagnostic auprès du CRAIF en Île de France (car répondant à tous les autres critères), la seconde se l’étant fait refuser par le CRA de Brest. L’absence de centre d’intérêt fixe fut dans les deux cas évoqué pour justifier une inadéquation avec les critères diagnostiques.

60Josef Schovanec, Nos intelligences multiples, p.182.

61Voir Nadia Chomyn (page Wikipédia exhaustive).

62Étude du CNC : Alors, on est combien à vraiment jouer en France ?

63Ryan Rigney, For gamers with autism, online worlds a cycle of attraction and fear, Wired News, 14 novembre 2012

64John P. Charltona et Ian D.W. Danforthb (2010) Validating the distinction between computer addiction and engagement: online game playing and personality, Behaviour & Information Technology, 29, 6, p.601-613

65Eric Bland, Gamers show Asperger’s traits, sur ABC Science

66Tony Attwood, Le syndrome d’Asperger, p.28.

67En particulier l’étude d’Isabelle Soulières, Michelle Dawson, Morton Ann Gernsbacher et Laurent Mottron, The Level and Nature of Autistic Intelligence II: What about Asperger Syndrome?, PLOS ONE, vol. 6, no 9, 28 septembre 2011.

68Voir entre autres le rapport de Josef Schovanec, 2017, p.49.

69Comment les français regardent-ils la télévision ?

70Fabienne Cazalis, communication personnelle.

71Il n’existe pas semble-t’il de sondage récent permettant de connaître le nombre de Français qui écrivent, mais uniquement des sondages sur le nombre de professionnels de l’écriture.

72Tony Attwood cite régulièrement J. K. Rowling comme ayant des caractéristiques autistiques, et pour avoir décrit en Hermione (Harry Potter) un exemple de femme autiste. Et les auteurs et visiteurs de salons spécialisés tels que les Utopiales, à Nantes, ont souvent des profils bien de chez nous

73Reconstitution non-précise à partir des chiffres de l’INSEE, et de ceux du Centre national du Cinéma, pour l’année 2014.

74Craig, Jaime ; Baron-Cohen, Simon ; Scott, Fiona (2001). Drawing ability in autism: A window into the imagination. The Israel Journal of Psychiatry and Related Sciences ; Jerusalem, 38, 3/4, 242-53.

75Schovanec 2017, p.50.

76Wiley Online Library : Special interests and subjective wellbeing in autistic adults.

77Eyal 2010, p.62.

78Isabelle Hénault, Sexualité et syndrome d’Asperger : Éducation sexuelle et intervention auprès de la personne autiste, De Boeck, 2010.

79Le film Le cerveau d’Hugo entretient largement cette croyance, à travers le déroulé de son scénario. Croyance citée également par Josef Schovanec, lors de ses conférences, concernant un professionnel de santé disant d’une femme autiste ça lui passera quand elle aura un mari.

80INSEE : Le couple dans tous ses états.

81Entre autres Attwood 2010, pp.367-368 ; Henault 2010 ; Maxine C. Aston, Aspergers in Love: Couple Relationships and Family Affairs, Jessica Kingsley Publishers, 2003.

82Larousse, définition autisme.

83Julie Dachez, Envisager l’autisme autrement : une approche psychosociale, Université Bretagne Loire, 2016.

84Hellemans, H., Colson, K., Verbraeken, C., Vermeiren, R., & Deboutte, D. (2007). Sexual behavior in high-functioning male adolescents and young adults with autism spectrum disorder. Journal of autism and developmental disorders, 37 (2), 260-269.

85Gilmour, L., Schalomon, P. M., & Smith, V. (2012). Sexuality in a community based sample of adults with autism spectrum disorder. Research in Autism Spectrum Disorders, 6 (1), 313-31 8.

86La seule source glanée pour attester cet évident constat de terrain est un article de Brigitte Chamak et David Cohen, Transformations des représentations de l’autisme et de sa prise en charge, Perspectives Psy,46, 3,‎ 2007, p. 218–227.

87Malakoff-Médéric 2015, p.31.

88Extrait de L’état de l’Enseignement supérieur et de la Recherche n° 4 [édition 2010] (document PDF).

89Indiana Resource Center for Autism : Bullying and Students on the Autism Spectrum.

90Sterzing PR, Shattuck PT, Narendorf SC, Wagner M, Cooper BP. Bullying Involvement and Autism Spectrum Disorders : Prevalence and Correlates of Bullying Involvement Among Adolescents With an Autism Spectrum Disorder. Arch Pediatr Adolesc Med. 2012 ; 166(11) : 1058–1064. doi : 10.1001/archpediatrics.2012.790

91Un maire ferme une école pour dénoncer la violence de deux jeunes élèves.

92Melissa Scott, Marita Falkmer, Sonya Girdler et Torbjörn Falkmer, Viewpoints on Factors for Successful Employment for Adults with Autism Spectrum Disorder, PLOS ONE, vol. 10, ‎13 octobre 2015.

93Alissa Levy et Adrienne Perry, Outcomes in adolescents and adults with autism: A review of the literature, Research in Autism Spectrum Disorders, 5, 2011, pp.1271–1282. Les premières initiatives américaines recensées remontent à la fin des années 1990 (voir entre autres : Michael Bernick et Richard Holden, The Autism Job Club: The Neurodiverse Workforce in the New Normal of Employment, Skyhorse Publishing, Inc., 2018.

94Tiré d’un échange de communications personnelles avec Josef Schovanec.

95Ibid.

96Rapport Malakoff-Médéric 2015, p.9

97Autisme et travail : ensemble c’est possible, Autisme Europe, 2014.

98Troubles du spectre de l’autisme — Guide d’appui pour l’élaboration de réponsesaux besoins des personnes présentantdes troubles du spectre de l’autisme, CNSA, mai 2016.

99Schovanec 2017, p.5.

100Rapport autisme et travail 2014.

101France-info : Aujourd’hui, 85% des contrats de travail sont des CDI (replay radio).

102INSEE : Tableaux de l’Économie Française, Édition 2016.

103Le Figaro Économie : Les 7 chiffres à retenir sur la fonction publique.

104Florian Forestier, Autisme et emploi public, note transmise à l’administrateur du FIPHFP, 2018.

105Catriona Pickard, Ben Pickard et Clive Bonsall, Autistic Spectrum Disorder in Prehistory, Cambridge Archaeological Journal, vol. 21, no 3, ‎octobre 2011, p. 357–364

106Le Figaro Décideurs : Les employeurs délaissent le diplôme au profit des émotions.

107Les Echos Entrepreneurs : 1,1 million d’auto-entrepreneurs en France !.

108D’après le croisement de plusieurs sources, dont les statistiques du Pôle emploi, ainsi que l’article Chômage en France de Wikipédia, qui indique un taux de chômage d’environ 10 % sur les dernières années (2010-2018).

109Schovanec 2017, pp.16-17.

110Observations préliminaires de la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées, Mme Catalina Devandas-Aguilar au cours de sa visite en France, du 3 au 13 octobre 2017.

111Schovanec 2017, pp.34-35

112Notamment par Florian Forestier.

113Third of adults with autism experience workplace discrimination, Learning Disability Today

114Enquête Malakoff-Médéric 2015, p.30

115Hannah Furfaro, Jobs, relationships elude adults with autism, Spectrum | Autism Research News,‎ 15 février 2018.

116Brett Heasman, Employers may discriminate against autism without realising, LSE Business Review, ‎ 31 juillet 2017.

117Enquête Malakoff-Médéric 2015, p.35.

118Enquête Malakoff-Médéric 2015, p.28

119Bruit au travail : comment survivre à l’open space ?

120Communication personnelle anonymisée.

121Il existe de nombreux ouvrages consacrés aux dérives dans le coaching, entre autres celui de Jean-François Amadieu, DRH : Le livre noir, chez Le Seuil, et celui de Renaud Leblond, Dérives sectaires: Les nouveaux gourous, chez StoryLab.

122D’après la synthèse effectuée pour cet article : Mortalité des personnes autistes (Wikipédia).

123Rapport Autistica 2016, p.5.

124Deux exemples sont, d’une part, celui de Josef Schovanec qui en a publiquement parlé lors de ses conférences ; d’autre part, celui d’une personne qui ignorait le fonctionnement d’un régime spécial lié au statut de cheminot des parents, la caisse de prévoyance.

125Europe 1 : Don du sang : ne plus avoir peur des aiguilles, c’est possible.

126Doctolib, site permettant de prendre des rendez-vous en ligne chez des professionnels de santé.

127Le Figaro Société : Autisme : un rapport accablant de la Cour des Comptes.

128Sarah Cassidy, Paul Bradley, Janine Robinson, Carrie Allison, Meghan McHughet Simon Baron-Cohen, Suicidal ideation and suicide plans or attempts in adults with Asperger’s syndrome attending a specialist diagnostic clinic: a clinical cohort study, The Lancet Psychiatry, vol. 1,‎ 2014.

129Darren Hedley et Mirko Uljarević, Systematic Review of Suicide in Autism Spectrum Disorder: Current Trends and Implications, Current Developmental Disorders Reports, vol. 5, no 1, ‎1er mars 2018, pp.65–76. Il est à noter que cette recension prend aussi en compte des personnes autistes institutionnalisées.

130Florence Vallade, Autisme : l’écran des évidences éducatives, Éducation et sociétés, 36, ‎ 2015, pp.35–49.

131Brigitte Chamak et David Cohen, Transformations des représentations de l’autisme et de sa prise en charge, Perspectives Psy, vol. 46, no 3, ‎mars 2007, pp.218–227.

132Mottron 2004, op. cit.

133Schovanec 2017, p.19.

134D’après Sophie Le Callenec et Florent Chapel (préf. Josef Schovanec), Autisme, la grande enquête, Les Arènes, 2016 ; 85 % des Français estiment que l’autisme ne concernerait que 5000 à 50000 personnes en France.

135Ce rapport était hébergé à l’époque sur le site de la CNNAF : (lien périmé).

136Jean Vinçot et Josef Schovanec, communications personnelles.

137Notamment inspiré par Stéf Bonnot-Briey




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