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Le parcours de Cyril

par Bénédicte Prigent

Il y a un peu plus de deux ans, notre fils Cyril a été diagnostiqué autiste Asperger au CIERA de Brest par le Dr Lemonnier. Il a 14 ans ½, est actuellement collégien scolarisé en cinquième, et bénéficie d'une AVS (auxiliaire de vie scolaire) à quart temps.

Photo de Bénédicte Prigent

C'est à l'âge de 2 ans ½ que sont apparus brutalement, au cours d'une hospitalisation, des troubles comportementaux de l'ordre de la relation et de la communication que nous savons désormais être d'origine neurobiologie et génétique, bien qu'aucun cas familial ne soit connu, aggravés et déclenchés par des facteurs environnementaux. Je souligne toutefois que c'est souvent dans cette tranche d'âge que surviennent ou sont observés des signes révélateurs d'autisme, et que la plupart des autistes n'ont pas de problèmes de naissance ni de santé particuliers susceptibles d'être a priori imputable à leur handicap.

Cyril est né à 34 semaines par césarienne sous péridurale, le 13 décembre 1990, avec un poids de naissance d'1,4 kg. Un placenta calcifié découvert tardivement est à l'origine de sa prématurité. Il allait bien, mais présentait une malformation uro-génitale, appelée hypospadia scrotal, qui nécessitera des interventions ultérieures. Il a grandi ensuite sans poser de problèmes majeurs, et était suivi très régulièrement par le corps médical, qui n'a jamais rien noté de particulier ni d'anormal dans son développement. Il était éveillé, enjoué, a prononcé ses premiers mots sans retard apparent, a boudé le quatre pattes, marché tardivement à 16 mois passés et n'a été propre qu'à 5 ans.

C'est à 16 mois, en mai 1992, qu'il subit la première intervention nécessitée par son absence d'urètre. Dans l'immédiat, les suites opératoires furent classiques par rapport à ce type de chirurgie. Elle fut suivie d'une seconde intervention qui eût lieu à 2 ans ½. C'est au cours de cette hospitalisation-là que Cyril a coupé soudainement toute communication avec l'entourage et le monde environnant avec fuite du regard et arrêt brutal du langage … Il ne prononçait plus que deux mots en hurlant : « Au secours » et « Delta », le nom de son chien. Ces signes réactionnels ont été estimés liés à la souffrance physique et psychologique et qualifiés d'hospitalisme par le corps médical. Ils étaient censés disparaître. Ce ne fut pas le cas.

Il y eût un avant et un après …

À 2 ans, Cyril avait acquis un vocabulaire de base classique, ne parlait ni mieux ni moins bien a priori que d'autres. Son deuxième anniversaire, en décembre 1992, fut une formidable fête à laquelle il a participé en chantant, applaudissant, riant comme en témoigne très heureusement une vidéo familiale. Lors de sa première rentrée scolaire en maternelle, en janvier 1993, il a un peu plus de 2 ans. L'institutrice se plaint alors de refus d'obéissance et de sieste, d'escalades intempestives. Mais rien, dans tout cela, n'alarme les médecins. Cyril a besoin d'apprendre à accepter la vie en société ! Avant ses 2 ans ½, si Cyril a eu des signes précurseurs d'autisme, ils sont passés inaperçus. J'avais toutefois noté une sensibilité exacerbée aux bruits, surtout inattendus, des jets d'objets surprenants et une manière de marcher un peu sautillante (mais ce n'était pas de façon flagrante une marche sur la pointe des pieds). Il alignait ses jouets les uns derrière les autres, en procession à travers les pièces. Par ailleurs, il était câlin, rieur, démonstratif. Particulièrement crapahuteur une fois la marche acquise, il grimpait sur tout et n'était pas douillet … Cyril était stimulé par sa fratrie plus âgée, mais, soucieux de favoriser la socialisation avec ses pairs et d'optimiser son éveil, nous l'avons confié de façon ponctuelle et progressive à une halte-garderie vers la fin de sa première année. Il y manifestait une importante intolérance à la séparation et demeurait un peu réservé vis-à-vis des enfants de son âge.

L'après s'installe donc comme un déclic tragique au cours des trois semaines d'hospitalisation de septembre 1993, lorsque Cyril a 2 ans ½. De retour à la maison, toutes les perturbations observées au décours de celle-ci persistent : cris, pleurs, colères, détournement du regard systématique, insomnies. Toute communication, même avec l'entourage le plus proche, est coupée. Il ne prononce plus les mots « papa », « maman », n'est pas mutique mais « baragouine ». Ses propos sont incompréhensibles, incohérents, répétitifs, écholaliques. Il ne supporte pas d'être touché, ne tolère pas davantage nos tentatives de câlins dont il se dégage avec force en hurlant, se cache sous son matelas, derrière ou sous les meubles, en proie à une terreur indescriptible, se ronge les ongles jusqu'au sang, arrache violemment ses cheveux par poignées et les mange compulsivement. J'en retrouve des bourres impressionnantes dans ses couches. Il ne répond plus quand on l'appelle mais n'a pas de surdité, d'après les examens effectués. Il présente une hyperactivité nocturne et diurne au cours de laquelle il vide frénétiquement tous les placards et les tiroirs. Il galope d'une pièce à l'autre sans interruption, tourne inlassablement autour des tables comme une tornade, se jette les mains en avant sur les vitres de la véranda, manipule sans arrêt les commutateurs électriques … Impossible de canaliser cette énergie débordante. Nous avons été obligés d'installer des targettes et des crochets en hauteur sur tout, même les portes de communication des pièces. Cyril se comporte comme un animal traqué pris de panique. Il attache les objets entre eux, les pieds et poignées des meubles les uns aux autres avec toutes sortes de liens ou ficelles, utilisant même des chaussettes et des collants, créant ainsi de véritables toiles d'araignées. Nous imaginions que c'était une transposition des liens qui l'avaient entravé durant ses hospitalisations. Il lance inlassablement de façon particulière, répétitive et bruyante les toupies, billes, balles et autres jouets ainsi que des cintres, qu'il plie en deux. L'alimentation, variée auparavant, est devenue soudain hyper-sélective et très carencée.

Premier diagnostic

C'est un médecin de PMI qui m'a ouvert les yeux en me faisant énumérer tous les signes cliniques et prononcer moi-même le mot d'autisme, mot qui ne sera à nouveau utilisé par un professionnel que dix ans plus tard, au CIERA. Cyril a 3 ans. Que faire alors ? Nous avons énergiquement refusé la prise en charge en milieu psychiatrique. Comment imaginer une telle chose pour notre petit bonhomme, aussi perturbé soit-il ? Autre alternative proposée : le CMPP. Cyril y fut pris en charge effective en juin 1994.

J'y ai connu les traditionnelles et classiques allusions à la causalité du trouble en question provoqué par une altération du lien mère-enfant, sans que soit repris ou reconnu le terme d'autisme, le CMPP lui préférant celui de psychose infantile. Au bout de quelques mois, devant l'absence d'amélioration de l'état de Cyril, nous entreprenons une prise en charge complémentaire auprès du SESSAD Arc en ciel, mais le corps enseignant de l'établissement dans lequel Cyril est scolarisé envisage mal l'intrusion dans l'école d'une éducatrice du SESSAD. Nous décidons alors de changer d'établissement scolaire et une véritable troménie commence, afin d'en trouver un qui accepte Cyril avec ses troubles et les particularités de sa prise en charge.

Au fil des ans

Les maternelles

Petite et moyenne section (1994/1995 et 1995/1996)

Cyril a 4 ans. Il est « miraculeusement » accepté, après maints refus de diverses écoles, par une directrice salvatrice qui sera aussi son institutrice. Elle materne Cyril, le sécurise, s'adapte avec patience à ses particularités comportementales et, alors que toutes les tentatives graphiques se sont jusque là soldées par d'épouvantables gribouillis, il fait son premier vrai dessin représentant toute la famille : j'en pleure de joie et d'émotion ! Il s'exprime toujours dans un charabia difficilement compréhensible, ponctué de quelques expressions toutes faites, son hyperactivité est épuisante, et les divers troubles de comportements perdurent. L'éducatrice spécialisée du SESSAD est remarquable, et travaille en réel partenariat avec l'institutrice. Ce tandem exceptionnel va favoriser une amorce de progrès capitale …

Grande section (1996/1997)

Cyril a 6 ans. Même établissement, mais changement d'institutrice. Celle-ci estime que Cyril n'a pas besoin de l'éducatrice en classe et l'évince à notre insu, annihilant ainsi tout son travail de communication et de relation avec les autres enfants ! Il ne bénéficie plus désormais de l'intervention de l'éducatrice que dans les locaux du SESSAD. Elle l'initie à l'informatique. Les progrès sont alors fulgurants, et le langage s'améliore …

Durant les années de maternelle, j'ai stimulé inlassablement Cyril par des jeux éducatifs et surtout des livres, pour lesquels il a une véritable fascination. Nos moments de lecture sont les seuls durant lesquels il reste en place, les seuls qui paraissent fixer suffisamment son attention (en dehors de l'ordinateur par la suite) pour inhiber son hyperactivité.

Première année de CLIS (1997/1998)

Cyril a 7 ans. Impossible d'envisager un CP traditionnel à l'époque. Ce sera une CLIS avec infirmière psychiatrique, institutrice et éducatrice spécialisées. Un dilemme déchirant s'impose par ailleurs : il y a deux CLIS possibles. L'une dans notre ville de résidence, l'autre à vingt kilomètres. Pour des raisons de prises en charge complexes, seule celle qui est éloignée nous autorise administrativement à conserver le SESSAD Arc en Ciel. Or les troubles alimentaires de Cyril sont si importants (lors de multiples essais infructueux de cantine, il ne se nourrissait que de pain sec) que nous ne pouvons envisager la demi-pension. Nous choisissons la proximité qui permet aussi à l'enfant, qui s'endort toujours très tard, de conserver un temps de sommeil précieux, et abandonnons le SESSAD Arc en Ciel, et surtout sa fantastique éducatrice, la mort dans l'âme.

Après beaucoup d'angoisse parentale concernant cette étape, nous avons l'impression de pouvoir souffler un peu malgré tout. Cette trêve est de courte durée car, devant l'importance des troubles du comportement de Cyril, l'équipe pédagogique de la CLIS nous fait, sous peine de déscolarisation, obligation d'une prise en charge complémentaire à mi-temps en secteur hospitalier psychiatrique.

À l'hôpital, Cyril va découvrir divers ateliers thérapeutiques et aussi d'autres pathologies plus lourdes que la sienne dans leurs manifestations. Les premiers temps, il va s'approprier, notamment, un rire « sardonique » qui ne lui appartient pas, mais qu'il imite inlassablement en écholalie. C'est alors que s'arrête la prise en charge du CMPP. De 7 à 10 ans, Cyril va être ainsi partagé entre la CLIS et l'hôpital psychiatrique, avec une augmentation très progressive du temps de scolarisation.

Constatations de l'équipe pédagogique en première année de CLIS :

Deuxième année de CLIS (1998/1999)

Tentative d'intégration en EPS avec des élèves extérieurs à la CLIS, malgré la persistance des difficultés au niveau du tonus corporel, de l'équilibre et du rythme d'exécution.

Constatations de l'équipe pédagogique :

Troisième année de CLIS (1999/2000)

Ce sont ses progrès en lecture et sa meilleure conscience du groupe qui lui permettent une autre intégration avec des élèves de CE1 pour une activité bibliothèque. Des gestes stéréotypés provoquent des battements de mains et des rires lorsqu'il y écoute des histoires qui le fascinent.

Constatations de l'équipe éducative :

En parallèle, durant ces années de CLIS, la socialisation en dehors de la scolarisation a été infructueusement tentée à des périodes diverses en centre aéré avec un accompagnement spécifique. L'angoisse et la terreur éprouvées par Cyril en rapport avec les changements de lieux, la perte de repères, nous y ont fait renoncer.

Après ces trois années de CLIS, il doit changer d'établissement scolaire et d'équipe pédagogique.

Quatrième et cinquième années de CLIS (2000/2002)

De 10 à 12 ans, Cyril a un maître exceptionnel qui sera à l'origine d'une réelle et complète intégration. Il est à noter que Cyril a toujours des problèmes d'organisation dans la prise du matériel demandé, mais il parle de mieux en mieux malgré un phrasé haché à la limite du bégaiement par intermittence. Il adore s'exprimer sur un sujet qui relève d'un de ses centres d'intérêts, plus pour le plaisir que cela lui procure que pour communiquer avec les autres, et pratique la lecture courante à voix haute. Ses écrits sont cohérents mais racontent rarement des faits vraisemblables.

Il est intégré partiellement en CE2 et CM1 pour certaines matières.

Le CE2 (2002/2003)

À la rentrée, Cyril a presque 12 ans. Il bénéficie d'une intégration complète en CE2, toujours dans le même établissement, avec une institutrice qui accepte ce challenge. Il s'agit là d'un début de scolarité normale, mais tout peut être remis en cause du jour au lendemain. Cyril se conduit à peu près comme les autres élèves, à condition que les consignes ne soient pas trop nombreuses à la fois ; il est très fier de son intégration et le manifeste. Il fait d'importants progrès en EPS. Le CE2 est une classe qui subit une évaluation nationale et pour la première fois, Cyril a des notes : 18 de moyenne à notre plus grande stupéfaction.

C'est alors qu'à la mi-décembre apparaissent soudain d'importants troubles du comportement, avec opposition, nervosité, angoisses, insomnies accrues … L'hôpital de jour pense que l'enfant est trop stimulé, trop poussé par l'école et les parents. C'est la période des orientations et du renouvellement des prises en charge pour l'année suivante. Celle-ci est un peu complexe du fait du cursus de Cyril. Notre fils ne rentre dans aucune case pré-établie. Solution : l'IME. Il nous faudra trois semaines d'investigation parentale pour découvrir enfin l'origine médicale de ses troubles du comportement (impossibilité d'uriner lors d'érections spontanées), tout à fait indépendants de son intégration scolaire. Lorsqu'on a offert à Cyril les moyens d'y pallier, la situation fut réglée instantanément, mais pas le choix médical de l'orientation en IME. Il nous a fallu argumenter avec ténacité et diplomatie pour faire entendre notre point de vue, et conserver à Cyril une intégration scolaire en rapport avec ses capacités intellectuelles.

Malgré la réussite de cette intégration complète en CE2, l'inspection d'académie décide d'orienter Cyril pour l'année suivante en UPI, suite logique d'une CLIS. Nous avons fais appel auprès de la CDES vis-à-vis de cette décision, et obtenu une dérogation du fait de son âge et son passage en CM1, le maintenant ainsi dans un circuit scolaire ordinaire.

C'est cette année là, en mai 2003, grâce aux journées de l'autisme, et ayant depuis peu Internet, que nous découvrons l'existence du syndrome d'Asperger, événement qui va bouleverser la vie de Cyril et la nôtre ! Il y aura là aussi un avant et un après … Cette révélation est ma plus belle fête des mères. Nous entamons une demande de diagnostic officiel auprès du CIERA de Brest. En parallèle, nous mettons en route, en libéral, une prise en charge orthophonique (rééducation logicomathématique) et une autre en psychomotricité.

Le CM1-CM2 (2003/2004)

CM1 au premier trimestre puis CM2 aux deuxième et troisième trimestres. Cyril a 14 ans. L'excellence des résultats scolaires est similaire à celle de l'an passé, malgré la persistance évidente des particularités comportementales inhérentes au syndrome autistique. L'inspecteur d'académie décide en décembre de faire passer Cyril en CM2 et, à ce moment là, pour pallier les importants troubles de l'attention de Cyril, nous acceptons de le mettre sous Ritaline. Cyril maintient le cap sur le plan des résultats scolaires, bien que perturbé par une classe surchargée au sein de laquelle des élèves tuteurs vont compenser ses oublis de rédaction. Il est toujours solitaire en récréation et visiblement très fatigué en fin de trimestre. Il emprunte régulièrement, par inadvertance, le blouson d'un camarade, met aux pieds des chaussures qui ne sont pas de la même paroisse, enfile le matin si l'on y prend pas garde son pantalon par dessus son pyjama ! Par ailleurs, la prise en charge en hôpital de jour perdure avec les importantes modifications suivantes : un changement de psychiatre et une orientation en CATTP.

Au cours de cette année, nous effectuons les démarches relatives à une demande d'intégration en sixième au collège avec une AVS, accordée en appel alors que l'orientation initialement retenue par la CDES pour l'année suivante était : soit à nouveau l' UPI, soit la sixième sans AVS.

C'est à l'instituteur de CLIS, à son efficacité, à son dévouement, à sa compétence et à son investissement personnel remarquable, que nous devons la complète et réelle intégration de Cyril dans le circuit ordinaire et son intégration en sixième. Nous ne l'en remercierons jamais assez.

Il est aussi à souligner que le travail scolaire de Cyril est suivi très attentivement par sa grand-mère paternelle, ancienne institutrice. Sa pédagogie est un atout supplémentaire dans le cursus de notre fils. Elle lui permet de doser ses efforts sans se décourager.

Sixième avec une AVS à mi-temps (2004/2005)

La Ritaline est alors remplacée par le Concerta, toujours pour limiter les troubles de l'attention. Une réunion à la prérentrée au collège, en présence du Dr Lemonnier, permet de répondre aux questions des enseignants, naturellement angoissés par le profil particulier d'un élève autiste. Une lettre de présentation du cursus de Cyril résumant son histoire leur a été préalablement remise, ainsi que de la documentation sur le syndrome d'Asperger.

Un cahier de liaison tenu par l'AVS nous tient informés de ses réactions et attitudes et permet un indispensable lien avec le collège. Cyril surprend ses professeurs par ses connaissances livresques, notamment scientifiques. Il communique toujours peu ou pas avec ses camarades, soulignant ainsi son immaturité relationnelle et ses faibles capacités d'empathie pour ses pairs. L'une d'elles est toutefois une indispensable roue de secours pour pallier les oublis de notation de devoirs et de leçons en l'absence d'AVS. Les qualités du professeur principal sont un atout supplémentaire dans la réussite de l'intégration. C'est grâce à lui que nous aurons l'opportunité d'expliquer aux autres enfants les raisons des particularités de comportements de Cyril et de répondre à leurs questionnements en aplanissant, par une juste et simple information, certaines interrogations anxieuses (« Est ce contagieux ? » ; « Pourra t-il avoir des enfants ? »).

À la fin du premier trimestre, le comportement non-violent de Cyril et ses capacités intellectuelles ont rassuré les professeurs initialement récalcitrants à l'accepter dans leur classe. Certains d'entre eux ont alors malheureusement envoyé l'AVS au CDI durant leur cours, sous couvert d'autonomie de Cyril. Cela souligne surtout, nous semble-t-il, deux difficultés importantes du corps enseignant : accepter la présence d'une tierce personne susceptible d'être éventuellement critique et percevoir judicieusement la réalité du handicap lié au syndrome d'Asperge malgré les informations données et le constat d'une évidente bonne volonté.

Les répercussions ne se font pas attendre : d'une part Handiscol nous signale dès janvier que va être supprimée l'AVS accordée initialement pour l'année et à mi-temps, d'autre part apparaissent progressivement chez Cyril, avec un temps de décalage, des troubles du comportement significatifs de tension et de stress. Même s'il fait preuve d'une relative autonomie, cela ne gomme en rien ses difficultés d'attention, son hypersensibilité sensorielle aux bruits, aux mouvements, lesquelles sont exacerbées par une importante fatigabilité et des moments de réelle panique. S'il a parfaitement identifié, en l'absence d'AVS, les personnes ressource du collège et y fait appel en maintes circonstances, il est livré en classe aux affres de l'incommunicabilité et du déficit d'intentionnalité spécifique au syndrome. L'apparition des troubles du comportement correspond aussi à une succession multiple de remplacements de professeurs au cours des deuxième et troisième trimestres. Nous nous sommes battu administrativement pour conserver l'AVS durant cette année de sixième, et obtenir son renouvellement pour l'année suivante. Nous aurons gain de cause en appel auprès de la CDES en juin 2005 avec un octroi diminué à un quart temps.

Le bilan de cette première année au collège souligne à la fois le bien fondé de nos refus antérieurs d'intégration en IME et UPI, la réalité des capacités intellectuelles de Cyril (plus de 15,5 de moyenne), qui pourtant ne le mettront jamais à l'abri d'une déscolarisation possible et préjudiciable, la nécessité d'un partenariat ouvert et souple avec une équipe pédagogique coopérante, impliquée, ayant intégré les informations sur les particularités du syndrome et l'importance d'un encadrement adapté à son handicap par le biais d'une AVS efficace et investie.

L'AVS est primordiale pour maintenir un lien entre tous les partenaires de l'intégration. Elle doit être un véritable guide, afin d'acquérir des stratégies d'adaptation indispensables pour éviter ou limiter d'éventuelles régressions et troubles du comportement liés à une mauvaise estimation ou une insuffisante perception des capacités effectives de la personne autiste.

En conclusion, Cyril a eu beaucoup de chance d'avoir toujours été scolarisé. La diversité des situations scolaires de nos enfants n'est pas seulement la conséquence de leurs capacités intellectuelles. Elle dépend beaucoup de la qualité de l'investissement de l'école concernée à prendre en charge leur différence. L'aide apportée par des enseignants informés, impliqués et réceptifs peut modifier cette scolarité du tout au tout.

L'autiste Asperger ou de haut niveau, quelque soit son niveau intellectuel, aura toute sa vie besoin, du fait de son handicap, de quelques aménagements de son environnement et des moyens de le compenser, ainsi que des aides individualisées et des prises en charge complémentaires adaptées à chaque cas particulier. Le développement de ses compétences sociales est une préoccupation majeure, autant, si ce n'est plus encore, que celui dans un milieu ordinaire, de leurs compétences intellectuelles. Ce sont les unes et les autres qui leur permettront de vivre demain autonomes, intégrés et heureux dans la société, sans être à la charge de celle-ci, ni oubliés par le système, sur le bord du chemin.

Soyez tous acteur de ce challenge, si vous le voulez bien, en soutenant notre association et en contribuant à donner de l'essor à notre engagement

Merci de votre patiente écoute.




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